La résilience du peuple rwandais a été célébrée à l’occasion de la commémoration de l’an 31 du génocide perpétré contre les Tutsi en 1994. Selon le nouvel ambassadeur, Bizimana Festus, de l’horreur a surgi une nation plus forte, plus unie, tournée vers l'avenir. Le pardon a triomphé de la vengeance et la réconciliation de la haine. Pour sa part, le ministre de l’Intérieur a rappelé que l’œuvre de paix doit être éternelle, d’autant plus que les braises de la haine et du ressentiment peuvent, dit-il, toujours resurgir.
L'Ambassade du Rwanda au Sénégal a organisé la 31e édition de commémoration du génocide perpétré contre les Tutsi au Rwanda en 1994, en présence du ministre de l’Intérieur, Jean Baptiste Tine, venu représenter le gouvernement. « Aujourd'hui, nous nous tenons ici pour nous souvenir et pour honorer la mémoire de plus d’un million de victimes du génocide perpétré contre les Tutsi au Rwanda en 1994. Nous nous souvenons de vies brisées, de familles décimées, d’enfants qui n’ont jamais eu la chance de grandir. Nous nous souvenons de l’horreur indescriptible qui s'est abattu sur notre nation lorsque des voisins se sont retournés contre leurs semblables », a d’emblée déclaré le nouvel ambassadeur du Rwanda au Sénégal, Bizimana Festus. A l’en croire, le génocide contre les Tutsi n’a pas été un accident de l’histoire, mais le fruit d'une planification de longue date, une idéologie de haine inculquée et martelée dans les esprits par des dirigeants cyniques et des médias appelant à l'extermination. « La division de la société rwandaise fut institutionnalisée par l'administration coloniale qui imposa des cartes d'identité ethnique semant ainsi les graines de la discorde. Puis en avril 1994, l'impensable devint réalité. En seulement 100 jours, femmes et enfants furent massacrés avec une cruauté indicible. Les corps jonchaient les routes, les rivières charriaient les cadavres. Ce fut une extermination systématique, planifiée et exécutée sous le regard indifférent du monde », se désole de rappeler le successeur de Karabaranga Jean Pierre. Devant ce spectacle ahurissant et le retrait des casques bleus, il n’a pas manqué de louer le courage du défunt capitaine Mbaye Diagne, dont la veuve et le fils étaient présents à cette commémoration. « Nous rendons hommage au courage exceptionnel du capitaine Mbaye Diagne, qui a désobéi à un ordre manifestement immoral. Il a incarné l'honneur et le courage sauvant plusieurs vies au prix de la sienne. Le Rwanda lui sera à jamais reconnaissant », témoigne l’ambassadeur. Cette page sombre de l’histoire du Rwanda tournée, Bizimana Festus se félicite de constater que son pays est devenu un symbole de résilience. « De l’horreur a surgi une nation plus forte, plus unie, tourner vers l'avenir. Là où l'on prédisait l'extinction, nous avons l'unité, le développement, la paix. Le pardon a triomphé de la vengeance, la réconciliation de la haine », précise le nouvel ambassadeur, avant de poursuivre : Le Rwanda a su transformer sa souffrance en force et cette histoire est aujourd’hui un message d’espoir pour l'humanité tout entière. Nous commémorons pour ne plus jamais oublier, mais aussi pour montrer que l'amour peut vaincre la haine, que la vie peut prévaloir sur la mort […]. Le Rwanda ne retournera jamais dans les ténèbres. Non, il portera haut la flamme de la paix et inspirera les peuples du monde entier à préserver l'harmonie et la dignité humaine », indique l’ambassadeur.
Jean B. Tine : "l’œuvre de paix doit être éternelle car les braises de la haine peuvent toujours resurgir"
« Le devoir de mémoire qui nous réunit aujourd’hui, nous rappelle que le passé détermine le présent. Nous devons ainsi tirer les enseignements de cette histoire malheureuse car l’Afrique a trop souffert de guerres fratricides. L’heure est à la concorde, au dialogue, mais aussi et surtout à la reconnaissance de l'être humain comme porteur d'une histoire sacrée par-delà les frontières, par-delà les peuples, par-delà les ethnies, par-delà les tribus. Sachons mettre l’homme au cœur de nos préoccupations. C’est alors que s’effacera dans notre conscience collective les notions de bantou, d’arabe, de noir, de blanc qui, en réalité, ne sont que des terreaux de distinction, de division et de communautarisme. Elles ne sont que les sources de troubles et de replis identitaires. Apprenons de nos erreurs, apprenons des erreurs des autres, il est temps, pour nous Africains, d’éduquer nos enfants à la paix et de leur offrir des lendemains meilleurs sous le sceau de la concorde », a plaidé le général Jean Baptiste Tine, ministre de l’Intérieur. Il y a 31 ans, poursuit-il, ce n’est pas le Rwanda qui a vacillé, mais l’Afrique tout entière. « L’Afrique de nos jours doit être debout. C’est pourquoi, nous devons respecter, honorer, le courage des survivants qui ont décidé - non pas d’oublier - mais de pardonner, de reconstruire un nouveau Rwanda qui, aujourd’hui, force le respect. Elle doit être éternelle cette œuvre de paix, car les braises de la haine et du ressentiment peuvent toujours resurgir », prévient le général Tine.
M. CISS