Le Directeur du bureau Afrique subsaharienne de Reporters Sans Frontières (Rsf) a présenté hier le rapport 2025 de la liberté de la presse en Afrique. Malgré des tensions avec le régime en place, Rsf dresse pour le Sénégal un classement meilleur qu’en 2024 avec 20 places gagnées. Mais Rsf plaide pour repenser le modèle économique des médias, renforcer les protections juridiques et garantir un accès équitable aux financements publics et privés.
Reporters Sans Frontières a publié son rapport annuel de l’année 2025 sur le classement mondial de la liberté de la presse. La liberté de la presse au Sénégal est passée au crible. Le rapport a révélé que les médias sénégalais sont pris en étau entre la garantie de leur indépendance et leur survie économique. «Défendre la presse aujourd’hui, c’est défendre la démocratie et le droit des citoyens à une information fiable». Présidant la cérémonie de présentation, le Directeur du bureau Afrique subsaharienne de Reporters sans frontières (Rsf) laisse entendre que «la principale menace à la liberté de la presse n’est plus uniquement la violence ou la censure : c’est désormais la précarité économique des médias. Quand les médias sont asphyxiés financièrement, ils ne peuvent pas résister aux logiques de désinformation, ni aux pressions politiques et économiques», a alerté Sadibou Marong. Mais le rapport présenté laisse entrevoir que «dans 160 des 180 pays évalués, les médias ne parviennent pas à atteindre une stabilité financière. Pire encore, dans un tiers des pays, des rédactions ferment régulièrement. Les cas de la Tunisie (129e, -11 places), de l’Argentine (87e, -21), ou des États-Unis (57e, -2) illustrent cette dégringolade structurelle, où la course à la rentabilité remplace progressivement la quête de vérité». Au Sénégal, informe-t-il, «la situation est problématique avec des convocations de journalistes, de chroniqueurs, d'auditions, les questions de sécurité des journalistes, mais aussi la situation économique des médias. Mais la presse sénégalaise, qui est passée à la 74e place en 2025 dans le classement mondial de la liberté de la presse, fait également face à une situation économique catastrophique. C’est une crise qui interpelle les autorités. Elles doivent trouver avec les différents acteurs les bonnes approches pour assurer la survie de la presse», recommande le directeur de Rsf.
Dans ce rapport, le classement du Sénégal est salué malgré les énormes efforts à consentir. «Le défi principal reste la viabilité économique des organes de presse. Sans un plan d’appui structuré, l’indépendance ne pourra être garantie sur le long terme. Dans plus de 85% des pays, les médias ne parviennent pas à atteindre une stabilité financière. Plus grave encore, dans près d’un tiers des nations, ils sont contraints de fermer», fait savoir Sadibou Marong. Ainsi, le pays de la Teranga se classe 7ème au sein de la Cedeao, 15ème au niveau africain et gagne 20 places par rapport à 2024. « Il y a un regain d’espoir avec les engagements récents en faveur d’un cadre plus protecteur pour les journalistes. Si l’on ramène ce classement à un contexte plus africain, on se rend compte que le Sénégal a gagné 20 places par rapport à l’année dernière. Ce qui n’est pas négligeable. Il occupe désormais la 15ᵉ place en Afrique, derrière des pays comme l’Afrique du Sud, la Namibie, le Cap-Vert, la Gambie et la Côte d’Ivoire. Si l’on considère l’espace Cedeao, le Sénégal se classe 7ᵉ. On remarque que des pays traditionnellement bien positionnés, comme le Cap-Vert, le Ghana, la Gambie récemment et la Côte d’Ivoire, sont juste devant lui», fait-il comprendre.
Baye Modou SARR