Les débats étaient houleux, hier, à Abuja. Pendant 5 heures, les avocats de Khalifa Sall, qui défendaient aussi Karim Wade, se sont opposés vigoureusement à l’agent judiciaire de l’Etat et ses avocats. Ils ont buté sur deux points essentiellement. La Cour de justice de la Cedeao rend finalement sa décision aujourd’hui.
L’audience était houleuse, hier, à la Cour de justice de la Cedeao. Même si ni Khalifa Sall ni Karim Wade ne vont participer à la présidentielle de 2019, les avocats des deux candidats éliminés se sont démenés comme de beaux diables à Abuja, hier. «Une question de principe», assure-t-on, du côté de cette défense qui se bat «pour la postérité». En face, l’agent judiciaire de l’Etat et ses avocats ne se sont pas laissés faire. Du côté des requérants, il y avait Mes Ciré Clédor Ly, Demba Ciré Bathily et Seydou Diagne qui ont défendu aussi bien les intérêts de l’ex-maire de Dakar que celui du fils d’Abdoulaye Wade. L’Etat du Sénégal était, pour sa part, représenté par l’agent judiciaire, Antoine Diome et ses avocats, en l’occurrence les deux anciens bâtonniers Mes Yérim Thiam et Moussa Félix Sow, mais également Me Samba Bitèye. Et ce n’est pas tout, l’Etat est allé pêcher dans les eaux du barreau de Paris un autre conseil, un certain Me Bertrand.
Les deux parties ne se sont pas fait de cadeaux, hier. Les robes noires se sont lancées dans des empoignades qui ont duré 5 tours d’horloge. Selon nos informations, la querelle des conseils des parties a porté essentiellement sur des points que sont la violation du droit de vote et la violation du droit de participer à l’élection présidentielle. Ces deux points soulevés par les requérants, aussi bien pour le cas de Karim Wade que celui de Khalifa Sall, n’ont pas été vus sous le même angle par l’agent judiciaire Antoine Diome et ses avocats, qui s’y sont opposés. Au final, les sages de la Cour de justice de la Cedeao ont mis les deux affaires en délibéré pour aujourd’hui.
Reste à savoir la conséquence immédiate de la décision de la juridiction sous-régionale, si elle donne raison aux requérants en constatant les violations de leurs droits. Lors de son entretien avec nos confrères de Jeune Afrique, le ministre de la Justice, Ismaïla Madior Fall, a déjà averti les deux candidats recalés, en soutenant que «la Cour de justice n’est pas une Cour d’appel ou une Cour de cassation pour invalider une décision du Conseil constitutionnel». Clair comme de l’eau de roche. Mais, pour les requérants, s’ils arrivent à faire constater la violation des droits de leurs clients, c’est déjà positif, car ils sont conscients que l’Etat du Sénégal, qui ne s’est jusque-là jamais plié à la décision d’une juridiction internationale, ne va pas le faire aujourd’hui.
Khalifa Sall et Karim Wade avaient déposé des recours devant la Cour de justice de la Cedeao pour dénoncer la violation de leurs droits, après que le Conseil constitutionnel les a écartés de la liste des candidats à la présidentielle. L’ex-maire de Dakar avait sollicité que la Cour ordonne la suspension du processus électoral, mais aussi qu’elle ordonne le report de l’élection.
Alassane DRAME