27 avril 1848-27 avril 2018, cela fera 178 ans depuis que l’esclavage a été aboli de manière officielle. Cette année, pour célébrer cet anniversaire, le Mémorial de Gorée compte organiser une randonnée pédestre, en partenariat avec le ministère de la Culture et d’autres Organisations non gouvernementales.
Considérant que cette commémoration permettra à l’Afrique et au Africains de reposer le débat sur la traite des noirs et comment les générations actuelles doivent se l’approprier, le coordonnateur de l’événement, Malick Kane, a estimé que cela permettra aussi de conscientiser la jeunesse et toutes les parties prenantes. «(…) Qu’ils comprennent que les questions de mémoire sont essentielles pour l’avenir du continent, pour la construction de notre identité panafricaine», a déclaré Malick Kane, animateur culturel, coordonnateur de la commémoration de l’abolition de l’esclavage.
«Cela permettra de mettre les bases d’une renaissance africaine pour qu’on puisse arriver à une confiance de soi qui permettra plus tard aux Africains de pouvoir bâtir leur propre avenir», dit-il, expliquant qu’au-delà du Sénégal et des Sénégalais, l’activité sera aussi celle de tous les Africains, Gorée et son histoire n’étant pas seulement pour le Sénégal.
Sur la forme, Malick Kane a noté que la commémoration de cette année sera symbolique, en cela qu’elle sera, avec l’association des jeunes dans les activités, comme un passage de témoin aux générations futures. «Cette année, le programme donne une occasion à 170 élèves de différentes écoles de venir participer. Et comme si on transmettait le relais dans un marathon, ce sera à la prochaine génération d’assumer cette identité, d’assumer ce legs et cet héritage pour pouvoir se projeter», dit-il. Et d’expliquer qu’au cours de la randonnée, neuf élèves vont, à tour de rôle, déclamer chacun un des neuf articles de la déclaration de l’abolition de l’esclavage.
Au chapitre des doléances, le coordonnateur de la commémoration a invité l’État du Sénégal à manifester un plus grand intérêt envers le Mémorial de Gorée. En effet, rappelle-t-il, le Sénégal, à travers une disposition du Sénat du 27 avril 2010, avait pris la décision de reconnaitre le 27 avril comme date de commémoration des résistances et de l’abolition de l’esclavage. «Mais, depuis le jour-là, rien n’a été fait. Il n’y a pas eu de commémoration assumée par l’État du Sénégal. On n’a vu que la société civile, la mairie de Dakar ainsi que d’autres Ong qui essaient de commémorer l’abolition de l’esclavage», regrette-t-il, estimant qu’une appropriation du Mémorial et de ses activités permettra de repositionner le contexte historique de l’abolition de l’esclavage. «Parce que, estime-t-il, toute la vérité n’est pas dite à propos de l’abolition de l’esclavage». Ainsi, pour parer à cet écorcement de l’histoire, Malick Kane propose la transformation de la résolution du défunt Sénat en ce sens en loi. Mais aussi que le gouvernement et les collectivités locales s’approprient la commémoration du 27 avril.
Mais, s’il en est ainsi, c’est parce que, estime-t-il, «aujourd’hui, nous sommes dans un monde où nous Africains sommes agressés culturellement». «Il y a une guerre culturelle à travers laquelle nous sommes en train de nous faire déposséder de notre identité culturelle. Pour parer à cela, il nous faut revenir sur notre passé, le fouiller et comprendre le legs historique pour pouvoir construire notre présent et notre futur», a-t-il dit, indexant l’urgence d’inviter les plus jeunes à s’approprier leur histoire, celle de la traite des noirs. Et d’ajouter : «On nous a parlé de la traite négrière et de l’esclavage de manière générale, mais on ne nous a pas dit de manière très précise comment, dans le temps présent, tout cela est articulé avec notre conscience historique, avec notre conscience collective, entre nous Africains et autres afro-descendants».
Sidy Djimby NDAO