Le départ de Abdoulaye Daouda Diallo n’aura pas fait cesser la vague de contestations contre le département du ministère de l’Intérieur. L’opposition est plus que jamais décidée à mener la vie dure à l’autorité en charge d’organiser les élections. Après le refus d’une frange de l’opposition de répondre à son invitation pour les concertations, elle s’est encore illustrée, hier, lors du passage du ministre de l’Intérieur à l’Assemblée nationale. Convoquant les manquements lors des dernières législatives, les députés de l’opposition ont flingué le régime de Macky Sall, mais c’était sans compter avec la détermination de la majorité à rendre les coups. Et Aly Ngouille Ndiaye, «en bon Djolof Djolof», a répondu aux interpellations, leur apportant des répliques les unes plus salées que les autres.
S’il y a un Département ministériel très difficile, c’est bien celui de l’Intérieur. 80 orateurs se sont inscrits pour parler des questions sécuritaires, mais surtout électorales. Les députés de l’opposition ont descendu en flammes le régime de Macky Sall. Parmi leurs inquiétudes, les manquements notés lors des dernières élections législatives, les milliards dilapidés pour la confection des cartes Cedeao, les problèmes de sécurité et l’incendie du Parc Lambaye, entre autres.Première à donner des coups, Aida Mbodji a juré que les chiffres donnés par les services du ministère de l’Intérieur sont loin d’être convaincants. Selon elle, ceux qui n’arrivent pas à disposer de leurs cartes d’identité sont largement supérieurs aux chiffres avancés. «Un collectif de Sénégalais sans papier a même été mis sur place à cause de ces manquements», a-t-elle assuré. A propos de l’incendie du Parc Lambaye, l’ancienne maire de Bambey attaque : «l’anarchie dans les installations, ce n’est pas du ressort des commerçants, mais de celui de la Direction de la protection civile. Ces deux incendies en ce laps de temps traduisent le manque de soutien de ces pauvres Sénégalais», déplore Aida Mbodji.
Pour Mamadou Diop Decroix, pour apaiser la tension, le gouvernement doit lâcher du lest : «De 1992 à 2014, il n’y avait pas de problème pour des élections, mais depuis le référendum passé, nous connaissons un regain de difficultés concernant les élections et si on ne fait pas attention, cela risque d’empirer. Nous devons essayer de dépasser les malentendus, mais cela ne se fera pas sans des efforts du gouvernement. Ce qui a réussi à Abdou Diouf et Abdoulaye Wade pourrait bien porter la chance à Macky Sall, s’il accepte de faire comme ses prédécesseurs».
Issa Sall : «limiter les partis politiques, c’est anticonstitutionnel»
El Hadji Issa Sall, lui, estime que «nous devons dépasser le fait de confier notre souveraineté à des sociétés étrangères». Dénonçant toujours cette forme de dépendance qui nous lie aux Occidentaux, le député de PUR affirme que c’est inadmissible que l’on pense aux sapeurs français à chaque fois qu’il y a un incendie au Sénégal. «Sur la concertation nationale, il aurait fallu éviter de stigmatiser les partis, en les classant d’opposition, de pouvoir ou de neutres et d’organiser une concertation pour tous les 300 partis, qui se mettraient en commission en fonction de leurs intérêts. Sur la liberté d’association, certains pensent à limiter les partis politiques, cela est anticonstitutionnel. Nous pensons que ni la Cena, ni le Cnra, ni la Dge, encore moins un représentant de parti ne peuvent présider ces concertations, ils sont tous parties prenantes», dit-il.Abdou Mbacké Bara Doli : «ne vous fatiguez pas, Touba ne votera que pour Me Abdoulaye Wade»
Abdou Mbacké Bara Doli, lui, multiplie le travail de Macky Sall à Touba par zéro. «Touba à un réel problème sécuritaire. Les dispositifs qui existent sur place ont été mis en place par le Président Abdoulaye Wade. Votre gouvernance laisse à désirer. 52 milliards pour des cartes d’identité qui ne peuvent même pas ouvrir un compte à la banque, c’est du gaspillage. Ne parlons même pas des arriérés de salaire pour 46 chefs de village de Touba, qui s’élèvent à plus d’un million. Je ne vois pas l’intérêt de la Direction de la sécurité nationale. L’ampleur de l’incendie du Parc Lambaye a démontré leur incompétence », clame-t-il, avant d’enchainer : «Ce qui s’est passé lors des élections législatives est déplorable, c’était du pur sabotage, mais ne vous fatiguez pas, Touba ne votera que pour Me Abdoulaye Wade. Je suis prêt à vous donner de l’argent pour organiser à nouveau des élections ; je suis sûr de les gagner sans sourciller».Bamba Dièye : «Notre vieille démocratie est devenue une machine à broyer les opposants»
Pour le leader de Fsd/Bj, la sécurité du pays est gérée de façon calamiteuse, l’état civil est en lambeaux, aucune crédibilité ne peut être apportée à la valeur de la carte d’identité. «Si le pouvoir ne change pas d’attitude, les conditions pour un dialogue sincère et constructif seront des chimères de plus. Le pouvoir a refusé à notre candidat de mener sa campagne électorale. C’est dans cette même démocratie que notre tête de liste s’est vu refuser son immunité parlementaire par une coalition politico-judiciaire. Notre vieille démocratie est devenue une machine à broyer les opposants. Nous savons entre politiques que les déboires de Khalifa Sall sont uniquement dus à sa volonté d’être candidat aux prochaines présidentielles. Prouvez-nous que le gouvernement veut dialoguer, en arrêtant la cabale et la diabolisation de vos adversaires», a fait savoir Bamba Dièye.Cheikh Mbacké Bara Doli : «Vous n’avez jamais gagné à Touba et vous ne gagnerez jamais Touba»
Cheikh Mbacké Bara Doli n’a pas non plus raté les organisateurs des élections. «Vous les administrateurs, vous avez sciemment saboté les élections de Touba. Vous n’avez jamais gagné à Touba et vous ne gagnerez jamais Touba. Comment est-ce qu’on peut vous battre lors du referendum avec 82% et vouloir saccager les bureaux de vote lors des législatives ? Il est temps que vous décampiez, les Sénégalais en ont ras-le-bol de ce régime incompétent. De toute façon, en 2019, les tendances de Touba vont se généraliser», promet-il.Mame Diarra Fam : «il n’y aura pas d’élection sans Karim Wade»
Dans le même registre, le député libéral Mame Diarra Fam s’attaque vertement à Aly Ngouille Ndiaye. «Venu assister à une cérémonie religieuse en Italie, alors que vous étiez juste ministre des Mines, vous ne vous êtes pas gêné de faire votre propagande politique vile et sans respect pour ladite cérémonie. Vous ne méritez aucune confiance de la part de l’opposition. Cette mascarade électorale qui a eu lieu en juillet prouve à suffisance que vous ne reculerez devant rien pour continuer à régner, mais tenez-le vous pour dit, il n’y aura pas d’élection sans Karim Wade», menace-t-elle.Embouchant la même trompette, Woré Sarr taxe les tenants du pouvoir de voleurs qualifiés. «Vous êtes pires que des voleurs, les élections législatives l’ont prouvé à suffisance. Vous voulez leurrer l’opinion avec vos semblants d’actions sociales, alors que vous avez transformé la population en de pauvres quémandeurs», lance-t-elle.
La majorité vole à son secours, Aly Ngouille Ndiaye nargue l’opposition
Les députés de la majorité ne se sont pas fait prier pour répondre à ceux de l’opposition. S’attaquant au Pds, Mame Bounama Sall lave à grande eau le Ps. «Il faut les comprendre, certains opposants pensent que dialoguer égale partage du pouvoir. Il y a certains, à chaque fois qu’ils ont accepté de dialoguer, c’était pour un gouvernement élargi. Opposez-vous dignement, respectez la volonté populaire», clame le jeune socialiste. Yeya Diallo, de son côté, invite le ministre à faire fi des détails. «Vous ne gérez pas une garderie d’enfants. Ceux qui veulent dialoguer viendront, ceux qui n’en font qu’à leur tête auront la population comme juge», affirme-t-elle.Le remplaçant de Abdoulaye Daouda Diallo ne s’est pas laissé faire. Aly Ngouille Ndiaye, en répondant aux interpellations des députés, a bien défendu son Département. En ce qui concerne la distribution des cartes d’électeur, le ministre de l’intérieur dira qu’il n’y a jamais eu 100% pour la distribution de cartes d’identité au Sénégal. Nous en sommes actuellement à 84%, ce qui lui semble raisonnable. «Vous criez sur tous les toits que les élections passées ne se sont pas déroulées dans les règles de l’art, on vous appelle à des concertations pour essayer de pallier à cela et vous vous renfermez sur vous-mêmes. Avant de récuser qui que ce soit, il faut d’abord venir et donner son point de vue», a fait savoir Aly Ngouille Ndiaye.
Pour le parc Lambaye, le ministre de l’Intérieur est catégorique : «il faut prendre nos responsabilités et je les prendrai pleinement. Tous ceux qui sont aux alentours des fils à haute tension quitteront les lieux. Il fallait dire la vérité aux victimes. Ce qui se passe au Parc Lambaye, c’est de l’anarchie et cela va cesser d’une façon ou d’une autre», prévient Aly Ngouille Ndiaye.
Aly Ngouille Ndiaye à Abdou Mbacké : «Vous vous nommez Mbacké, mais nous avons le même droit à Touba»
Quand il s’agit de répondre à ses détracteurs, le ministre de l’Intérieur ne met pas de gants. «Vous vous nommez Mbacké, certes, mais nous avons le même droit à Touba. Vous pouvez militer pour le parti de votre choix, mais ne parlez pas au nom de Touba, encore moins du Khalife. Il a déjà son porte-parole», a lancé le ministre de l’Intérieur à Abdou Mbacké Bara Doli.Ndeye Khady D. Fall
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