
Se prononçant lors du panel de haut niveau de NRGI sur le JETP, Pape Fara Diallo a attiré l’attention sur les effets négatifs du JETP. En effet, il estime que le projet JETP s’accompagne de technologie importée qui n’existe pas au Sénégal. Ce qui lui fait dire que si on n’y prend garde, on risque de déboucher sur une recolonisation verte. Il a aussi relevé le paradoxe du Sénégal qui commence l’exploitation de ses énergies fossiles et engage en même temps sa transition énergétique.
Transition énergétique juste : qu’elle gouvernance du JETP voulons-nous bâtir ensemble ? C’est le thème de la table ronde initiée par NRGI en présence d’acteurs de la société civile, entre autres participants. A cette occasion, les présentateurs de NRGI sont revenus sur l’état d’avancement du plan d’investissement du JETP qui vient d’être adopté en mai 2025 ; deux ans après les conclusions de l’accord du JETP le 22 juin 2023. Le document d’orientation stratégique a été adopté en mars 2024 avant le démarrage du plan d’investissement en juillet 2024 après que le projet JETP a été aligné au nouveau référentiel des politiques publiques du nouveau régime qui a hérité du projet. S’agissant de la composition du financement du JETP d’un montant total de 2,5 milliards d’euros, 6,6% sont sous forme de subventions, 69,2% sous forme de prêts concessionnels, 1,8% sous forme de prêts à taux du marché, 12% et le reste sous forme de prêts classiques ou dons.
69,2% du financement du JETP sont des prêts concessionnels
Cependant, les 69,2% de prêts concessionnels ont inquiété certains acteurs de la société civile, qui parlent d’un endettement de plus du Sénégal. Le contexte international incertain notamment avec le conflit russo-ukrainien, la guerre Iran-Israël, etc., soulève des interrogations sur l’effectivité des décaissements. Outre le contexte, le représentant de la Cdn relève des difficultés d’accès aux financements en mettant en avant des conditions et des critères de gouvernance et de transparence. Néanmoins, il considère que le JETP peut faciliter l’accès aux financements. Revenant sur le risque d’endettement, Yakhya Bodian de la Direction de la transition énergétique estime que l’autorité ne va pas accepter d’endetter le pays dans le cadre du JETP. Le JETP, dit-il, ce n’est pas une signature mais des déclarations volontaires des parties qui s’entraident pour atteindre les objectifs communs de transition énergétique.
Une recolonisation verte qui ne dit pas nom
Au cours de cette journée de réflexion, un panel de haut niveau sur le thème : « Piloter le JETP au Sénégal : vers une transition alignée sur les besoins, les droits et les ambitions nationales » a fait intervenir les parties prenantes, la société civile … Et Pape Fara Diallo, qui est intervenu pour le compte des communautés impactées, a attiré l’attention sur les externalités négatives du JETP. « Si on ne fait pas attention, on risque de déboucher sur une recolonisation verte qui ne dit pas son nom », fait-il observer. A l’en croire, il y a une technologie qui est utilisée dans le cadre des projets verts qui n'existe pas au Sénégal. « C’est une technologie importée. Est-ce que dans le cadre de la mise en œuvre du JETP, au niveau du plan de financement, il est prévu tout ce qui est recherche, développement, formation, transfert de technologie, renforcement de capacités des compétences locales pour ne plus continuer à vivre dans une dépendance culturelle vis à vis de l’Occident ? Poursuivant, il révèle qu’avant cette transition, il y a eu l’exploitation des énergies fossiles avec des capacités techniques et financières étrangères. Et, c’est pour dire avec ce nouveau concept de JETP que le Sénégal n’a pas encore les compétences et doit se faire accompagner. Ce qui lui fait dire que si on n’y prend garde, on risque de déboucher sur une recolonisation verte.
Le Sénégal ne pollue pas et on nous demande d’aller vers une transition
En outre, Pape Fara Diallo d’ajouter qu’il y a une dimension géopolitique ou géoéconomique qui n’a pas été assez prise en compte dans le cadre du JETP. « Le Sénégal à l’image de beaucoup de pays africains, ne pollue pas et on nous demande d’aller vers une transition. Il y a un désinvestissement progressif des grandes banques sur les projets d’énergies fossiles et les multinationales sont les chevaux de Troie de leurs Etats et sont en train de se positionner et de continuer à exercer une certaine domination qui frise la recolonisation verte. Il n y a pas d’incompatibilité à vouloir développer ce projet oïl and gaz et d’envisager une transition énergétique. Mais, il y a tout de même un paradoxe parce qu’on vient à peine d’entamer l’exploitation de nos énergies fossiles et au même moment, on s’engage dans une transition énergétique », relève M. Diallo.
M. CISS