Alors que certains compatriotes établis à l’étranger dénoncent le travail jugé insatisfaisant de leurs représentants à l’hémicycle, ces députés de la diaspora peinent encore à se faire une place à l’Assemblée. Entre humiliations, non prise en compte des propositions et un traitement discriminatoire, ces parlementaires, arrivés il y a juste un an, se sentent exclus par leurs pairs. Et au sein de la coalition Bby, les 12 députés de la diaspora n’arrivent toujours pas à s’intégrer. Même lors des différentes rencontres qu’ils organisent, ils ne sont pas toujours convoqués.
Les députés de la diaspora de Bby sont très frustrés par le traitement de leurs pairs à l’hémicycle. Élus au même titre que les autres parlementaires, ils se sentent isolés et ne sont pas informés de certaines rencontres. «Nous ne sommes même pas au courant de certaines manifestations», laisse entendre cette députée de la diaspora. «C’est après qu’on reçoit l’information. Seulement, parce que nous sommes de la diaspora. Et, pourtant, les autres n’ont jamais eu ce problème», soutient-elle.
«On nous traite souvent comme des étrangers à l’hémicycle»
Et à l’hémicycle, même leurs propositions ne sont pas prises en compte. «Avant d’être députés de la diaspora, nous sommes des députés du peuple. Donc, en plus d’être la voix des émigrés, nous devons venir en aide aux populations, aux habitants de nos localités. Mais hélas, nous ne pouvons pas entièrement le faire parce que certains responsables de la coalition nous mettent des bâtons dans les roues. Et à l’Assemblée, quand nous posons sur la table les problèmes de nos communes, on ne nous écoute même pas, tout simplement parce qu’ils pensent que notre devoir se limite à défendre les intérêts de nos compatriotes établis à l’extérieur, alors que c’est totalement faux», soutient-elle.
Avant de poursuivre : «nous sommes avant tout des Sénégalais nés ici. Les femmes sont allées à l’étranger parce que leurs maris y sont et les hommes sont partis faire fortune. Et pourtant, on nous traite souvent comme des étrangers à l’hémicycle».
Députés locaux absentéistes
Pour cette députée qui se désole de cette situation, leurs collègues ne font pas mieux qu’eux ; et pis, ils ne sont jamais à l’Assemblée, car préférant vaquer à d’autres occupations. «Ceux-là qui essayent de nous isoler ne viennent même pas à l’Assemblée. Ils se disent députés et pourtant, ils ne mettent jamais leurs pieds à l’hémicycle. Alors que nous, députés de la diaspora, sommes chaque jour présents», laisse-t-elle entendre.
Dans sa localité, elle ne lésine pas sur les moyens pour venir en aide aux populations, au moment où d’autres responsables de la majorité présidentielle, à qui les moyens sont donnés, préfèrent faire de la politique avec ce qui doit revenir à la population, ou le mettre directement dans leurs poches. «A l’approche de la fête de Tamkharit, des bœufs sont donnés aux responsables du parti et de la coalition pour qu’ils les distribuent aux populations. Dans ma localité, à Pikine Nord, quand les bêtes sont arrivées, l’année dernière, le soi-disant responsable a distribué une partie, l’autre partie, jusqu’à présent, on ne sait pas qui en a bénéficié», avance-t-elle.
«On m’a demandé de changer de place juste parce que je suis députée de la diaspora»
Avant d’ajouter : «j’ai été obligée d’acheter avec mon propre salaire des bœufs pour les populations devant ma maison. Cette année également, le même scénario s’est produit et j’ai encore une fois été obligée de mettre la main à la poche pour venir en aide aux habitants».
Des humiliations, cette députée en a vécu. Et la plus récente, c’est lors de la présentation des condoléances chez Aminata Tall, présidente du Conseil économique, social et environnemental, qui avait perdu son beau-père. «Je suis arrivée à la maison mortuaire, alors que plusieurs députés n’étaient pas encore venus. J’ai trouvé des chaises vides et je me suis assise. Une dame est venue me demander de me déplacer, parce que ces places étaient réservées. Je lui ai fait savoir que rien ne le montrait. Elle a insisté, parce que, explique-t-elle c’était pour les députés. Je lui ai dit que j’en étais une, en précisant que j’étais de la diaspora. Elle m’a fait savoir que ma place n’était pas là-bas et que je n’avais qu’à me mettre derrière. Ce que j’ai catégoriquement refusé».
Khadidjatou DIAKHATE