Même si la mobilisation n’a pas connu un grand succès, les rappeurs ont marché pour exiger la libération de Nit Doff et de tous les détenus politiques, sous l’œil vigilant des forces de l’ordre qui ont déployé des moyens sécuritaires dissuasifs pour encadrer cette manifestation.
Le préfet de Dakar a autorisé hier la marche pacifique organisée par les acteurs des cultures urbaines et les activistes pour la libération du rappeur Nit Doff, Mor Talla Guèye à l’état civil, et de tous les détenus politiques. Seulement, contrairement à l’itinéraire initial du stade Iba Mar Diop à la devanture des locaux du ministère de la Culture, le préfet a allégué des travaux du Brt pour tracer une nouvelle voie à suivre par les marcheurs qui partent du rond-point Sahm au rond-point Onu, à côté du ministère de la Culture. Sur place, un important dispositif sécuritaire avec plusieurs éléments de la police et des barrières sécuritaires érigées. Même le dragon de la police a été mobilisé pour parer à d’éventuels débordements. C’est dans ces circonstances que la procession – qui n’a pas enregistré la forte mobilisation des grands jours – est arrivée au lieu de chute pour un concert de réprobation du Président Macky Sall et de son régime, coupables des incarcérations intempestives décriées ; en présence du président de Pastef, Ousmane Sonko et de plusieurs rappeurs dont Fou Malade, Xuman, Mass, Simon, Thiat, Abdou Karim Guèye, Fata, entre autres. Le manageur de Nit Doff a porté à l’assistance le message de son rappeur qui, dit-il, n’était pas emballé à l’idée de manifester pour réclamer sa libération. A l’en croire, il préfère croupir en prison car, à ses yeux, seul son leader, Ousmane Sonko, mérite qu’on lutte pour le protéger ; non sans demander aux jeunes de veiller à son intégrité physique.
Mass : « c’est le vent du changement qui souffle en Afrique de l’Ouest »
« Le Sénégal, le Mali, le Burkina Faso et la Guinée appartenaient à une seule fédération, ce qui veut dire que nous sommes un même peuple ; donc nous pouvons réussir ce qu’ils ont fait. C’est le vent de changement qui souffle en Afrique de l’Ouest porté par une jeunesse qui a la même mentalité. On ne peut pas faire moins que cette jeunesse des pays voisins. Si le gouvernement croit qu’il peut nous intimider en nous envoyant en prison, c’est peine perdue ! La privation de liberté n’est rien par rapport à la privation de la liberté de ton. Et, c’est ce que ce régime veut nous imposer », ajoute le rappeur Mass qui invite, dans la foulée, tous les témoins des crimes perpétrés contre le peuple à immortaliser ces preuves car, dit-il, il n’y a pas de prescription en matière de crime et les auteurs seront jugés tôt ou tard. A l’en croire, l’emprisonnement de Hanibal sous prétexte de financement d’activités séditieuses et subversives n’est pas fondé. « Cette injustice ne doit pas passer. Vive la révolution ! », s’écrie-t-il. « Nous étions là en 2011 lorsque Mamadou Diop a été tué. Aujourd’hui, nous sommes encore présents à quelques encablures du Monument pour – approximativement - le même combat. Nous l’avons dit et redit, si l’on n’y prend pas garde, je le jure, ça va péter », souligne de son côté Xuman. « Macky Sall, tu peux tous nous jeter en prison, mais sache que le troisième mandat ne passera pas. Depuis que Macky Sall est à la tête du pays, le lac Rose a perdu de sa couleur rose, tous les parents sont dans l’inquiétude permanente de voir leurs fils en prison du jour au lendemain, nos mamans, de retour du marché, se plaignent toujours de la cherté du coût de la vie. Macky Sall, tu n’en peux plus et ton seule arme c’est l’intimidation, la torture, l’emprisonnement. Mais, dans 12 mois, tu vas quitter de gré ou de force », renchérit Thiat de Y’en a marre dont les remarques ont fait rire le président de Pastef.
Fata : « le rap a longtemps souffert des politiques, Nit Doff doit penser à sa famille »
« Le pays est plongé dans une tension latente et l’emprisonnement de Nit Doff, Hanibal Djim, Ousmane Diagne, Ami Dia, Fadillou Keita et tant d’autres ne fait qu’exacerber cette tension. Nous n’avons qu’un seul interlocuteur et c’est le Président Macky Sall. Il faut qu’il libère tous ce détenus politiques afin qu’il y ait la stabilité dans ce pays. Il y a 11 ans, on était là pour lutter contre ces mêmes dérives. La démocratie sénégalaise vantée partout est en train de connaitre un recul avec le Président Macky Sall. Il faut qu’il libère Nit Doff et ses avocats vont déposer une demande de mise en liberté provisoire sous peu », révèle Simon. De son côté, le rappeur Fata qui a eu des différends avec le rappeur emprisonné n’a pas bénéficié du même accueil, hué par les manifestants. « Nous ne sommes pas des ennemis, mais des rappeurs. Ce qui se passe entre rappeurs, c’est entre des hommes, mais lorsque l’un des nôtres est en prison, c’est notre devoir en tant qu’humain de le soutenir. Tout ce qu’on lui souhaite, c’est qu’il retrouve sa famille. J’ai été en prison pour lui rendre visite. Je lui ai dit que le rap a longtemps souffert des politiques depuis des générations. Il doit faire la part des choses, travailler et penser à sa famille. On fera tout pour qu’il sorte, mais il doit penser à sa famille et à ses fans », plaide El presidente, réprimandé par le public. Contrairement à Fata, Abdou Karim Guèye a été fortement ovationné par le public. A l’en croire, l’emprisonnement de Nit Doff ne fait que les renforcer dans leur combat. « C’est peine perdue si le Président Macky Sall croit qu’avec l’emprisonnement de Nit Doff, il ne sera plus critiqué. C’est comme si Nit Doff était toujours en liberté parce que nous avons les mêmes principes, le même leader et le même discours », tranche Karim Xrum Xax.
M. CISS
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