
Macky Sall et les siens peuvent se boucher les oreilles. Me El Hadji Diouf sort de son silence et se constitue pour la défense de Khalifa Sall. Invité hier du Grand Jury de la Rfm, le bouillonnant avocat, qui entend la faire claquer grave au procès qui démarre jeudi prochain, a ouvert les hostilités, en dénonçant un «mensonge d’Etat». Traité comme un pestiféré au sein de la coalition Benno Bokk Yakaar, Me Diouf assimile le régime Sall a un «pouvoir de trahison» et craint que le chef de l’Etat ne finisse comme Blaise Compaoré au Burkina Faso, chassé par la furie populaire.
Me El Hadji Diouf s’ajoute à la longue liste des avocats de Khalifa Sall. Et c’est un renfort de taille, car on peut l’aimer ou pas, mais c’est mieux de l’avoir avec soi que contre soi, vu sa capacité de nuisance aussi bien à la barre que dans les médias et l’opinion publique. D’ailleurs, à peine a-t-il rejoint le pool d’avocats du maire de Dakar qu’il a dégainé en direction du chef de l’Etat et du pouvoir, en dénonçant une cabale orchestrée au plus haut niveau contre Khalifa Sall. «Khalifa Sall n’a pas détourné un sou. Il gère des centaines de milliards. De plus, l’Ige n’a jamais dit qu’il faut le poursuivre. C’est un mensonge d’État. L’Inspection générale d’État (Ige) a tout simplement dit qu’il faut changer le système. Le Gie annoncé dans l’affaire n’est pas une invention de Khalifa Sall, c’est un système qu’il a trouvé et qui est laissé par ses prédécesseurs», explique-t-il. Poursuivant, il note qu’à son arrivée à la tête de la mairie, Khalifa Sall «était étonné du système et a voulu comprendre». Mais, s’empresse-t-il de préciser, on lui a dit que «c’est comme ça (que ça se passe)» et que tous ses prédécesseurs ont procédé ainsi. Dès lors, il en tire une conclusion juridiquement fondée, à son avis. «La coutume est source de droit, comme la jurisprudence, la doctrine, le règlement. C’est ce que j’ai appris en droit», dit-il.Me Diouf trouve que le procès annoncé pour jeudi prochain est vicié et ne pourra pas se tenir ce jour, si le droit est respecté. «Son jugement de jeudi prochain sera renvoyé, vu les appels et les autres possibilités. D’ailleurs, le juge sait que sa position ne tient pas. Cette ordonnance de renvoi est nulle», affirme-t-il.
Me Diouf note que ce qui lui fait le plus mal, c’est que Macky Sall, qui a été sauvé d’une liquidation politique, essaie, à son tour, de liquider un adversaire politique.
«Ce pouvoir est un pouvoir de trahison. J’ai peur que Macky Sall ne subisse le même sort que Blaise Compaoré»
A fond dans la défense du Khalifa Sall, Me El Hadji Diouf ne comprend pas que Macky Sall et son régime veuillent faire subir à un adversaire politique le même sort qu’on voulait lui réserver, il y a quelques années, mais qui a échoué grâce à la mobilisation, autour de lui, de tous les démocrates et patriotes. Un combat dont Me Diouf dit avoir été sur la ligne de front. «Tout le monde sait que j’ai sauvé Macky Sall lorsqu’on a voulu le liquider. Aujourd’hui, il assiste à la liquidation d’un homme politique».S’en prenant vertement à Ousmane Tanor Dieng, l’homme du 23 juin ne semble pas pour autants ‘en émouvoir. Car, au sein de la mouvance présidentielle, c’est l’entente cordiale contre tous ceux qui ne chantent pas aveuglément les louanges de Macy Sall, dont lui-même. «Je suis écarté. Je ne suis pas frustré de ne pas être reconduit à l’Assemblée nationale. Je devais être au pouvoir parce que j’ai combattu depuis le 23 juin. Mais, ce pouvoir est un pouvoir de trahison. J’ai peur que Macky Sall ne subisse le même sort que Blaise Compaoré. Il a créé les conditions de ne pas être réélu dès le premier tour en 2019, en se débarrassant de ses vrais alliés», assène le patron du Parti du travail et du peuple.
Mbaye THIANDOUM