Même si une partie de l’opposition était réticente, l’acceptation par le régime de la plupart de leurs conditions de participation aux pourparlers leur a fait changer d’avis. Le Parti démocratique sénégalais (Pds), par contre, reste statique dans sa position. Des responsables dudit parti déplorent ce boycott et parle de décision unilatérale.
Les remous au Parti démocratique sénégalais (Pds) ne sont pas sur le point de s’arrêter. Même si les responsables et militants dudit parti admirent et respectent leur secrétaire général, ces derniers temps, ses décisions sont souvent sujettes à contestation. Après le boycott de la présidentielle, le Pds a encore boudé le dialogue national, même s’il a pris le soin de poser quelques conditions. La plupart de ces conditions ayant été acceptées par le régime, certains responsables du Parti démocratique sénégalais ne comprennent plus l’entêtement de leur direction de parti.
Réévaluant la part du Pds dans le combat que mène l’opposition depuis des années contre le régime de Macky Sall, Sara Boubou Sall, responsable du Parti démocratique sénégalais, pense que la non-participation du Pds à la dernière présidentielle a lourdement pesé sur l’issue de cette élection. Pour lui, Macky Sall sait à quel point il lui sera difficile de gouverner et de quitter le pouvoir, à l’horizon 2024, en affrontant à nouveau les électeurs en décembre 2019, lors des élections locales et en 2022, lors des élections législatives, deux ans avant l’élection présidentielle à laquelle il n’est pas autorisé à participer. C’est la raison pour laquelle il s’est empressé d’appeler au dialogue, en acceptant la presque totalité des conditions de l’opposition.
«Aucune manifestation de l’opposition n’aurait connu de succès si le Pds s’était borné à faire service minimum»
Pour le secrétaire général de la fédération Pds de Koumpentoum, tout le monde s’accorde sur le rôle éminent joué par leur parti, qui a mobilisé tous ses moyens, humains comme matériels. «Aucune manifestation de l’opposition n’aurait connu de succès si le Pds s’était borné à faire service minimum. Il en a aussi payé le prix fort. Près de 80 membres de ses différentes instances se sont retrouvés arrêtés, jugés, condamnés et emprisonnés. Parmi eux, le candidat à la présidentielle, le secrétaire général adjoint, le responsable de la communication, le secrétaire général des cadres, le secrétaire général des jeunes, le secrétaire général des élèves et étudiants, le secrétaire chargé des finances, une des principales responsables des femmes ainsi qu’un nombre particulièrement élevé d’autres responsables ; faisant dire à certains observateurs que le Pds aurait pu tenir un Comité directeur en prison», soutient-il, avant d’assurer qu’aucun autre parti n’a payé un prix aussi élevé.
«Comme lors du boycott à la présidentielle, le débat doit être mené au sein du parti pour le boycott du dialogue»
A en croire Sara Boubou Sall, alors que tout le monde, notamment des cadres et membres éminents de la direction du parti, s’attendait à ce que le Pds joue un rôle important lors du dialogue national convoqué par le Président Macky Sall, et contre toute attente, leur parti a décidé, à travers un communiqué de son secrétaire général, de ne pas participer au dialogue, évoquant comme conditions préalables la disqualification du ministre Aly Ngouille Ndiaye pour diriger les travaux et l’exigence de la révision du procès de Karim Wade. «Il est vrai que les statuts du parti permettent au secrétaire général d’engager les militants par les décisions qu’il prend. Cela, personne ne saurait le lui contester. Cependant, il est d’usage, concernant le fonctionnement du parti et la prise de certaines grandes décisions, d’organiser un débat interne, soit au Comité directeur, soit au Bureau politique. Il en a toujours été ainsi», a fait savoir M. Sall.
Pour décider de ne pas participer à l’élection présidentielle, affirme-t-il, il a bien fallu mener le débat au Comité directeur, qui n’a pas hésité au demeurant à convoquer le «livre blanc» publié par la coalition Wattu Sénégal au lendemain des élections législatives. Selon le secrétaire général de la fédération Pds de Koumpentoum, la décision de s’opposer à la tenue de l’élection présidentielle n’était pas unilatérale, elle a été prise par le Comité directeur. Et en ce qui concerne le choix du boycott du dialogue national, M. Sall estime que le moment est certainement venu de mener le débat interne, soit au Comité directeur, soit au Bureau politique, pour faire le bilan de la non-participation du Pds à l’élection présidentielle, mais aussi sur l’appel au dialogue de Macky Sall.
En effet, les partis regroupés autour du Front de résistance nationale ont obtenu gain de cause sur des questions essentielles devant figurer dans les termes de référence du dialogue national et qui sont des exigences préalables conditionnant leur participation au dialogue avec le pouvoir. Ce qui est incompréhensible, d’après Sara Boubou Sall, c’est qu’après avoir mené le combat et obtenu gain de cause, le Pds soit toujours absent du débat. Telles sont les questions auxquelles le Pds doit apporter une réponse immédiate, ferme et définitive. «Cela est beaucoup plus important que les réaménagements de personnels au niveau des instances de l’appareil, qui trouveront une réponse pertinente dans la vente des cartes et le nécessaire renouvellement des instances», M. Sall dixit.
Ndeye Khady D. FALL