«En avant pour notre victoire éclatante, dès le premier tour» ! C’est le cri de guerre émis hier par Macky Sall, à la fin du discours de lancement de sa campagne de collecte de parrains. Un discours qu’il a mis à profit pour régler ses comptes avec l’opposition qui, pour lui, ne veut même pas aller à la présidentielle, sachant qu’elle a perdu d’avance. Mais ce sont sans doute les sorties des opposants, contre des magistrats et pour vilipender le régime à l’étranger, qui irritent le plus le chef de l’Etat. Pour lui, il n’est plus question de laisser les magistrats se faire insulter à longueur de journée. De même, il affirme que ce n’est pas en allant pleurnicher dans les chancelleries étrangères et à l’étranger que l’opposition fera bouger les lignes au Sénégal.
Macky encense Niasse, Tanor, Ndéné et Cie
Devant ses alliés de Benno Bokk Yakaar, Macky Sall a bien agité son encensoir. Et ce ne sont pas Niasse et Tanor, comblés, qui ont boudé la flatterie. «Vous avez renoncé à vos ambitions légitimes. Président Niasse, vous étiez 3ème avec 13% ; président Tanor Dieng, vous étiez 4ème avec 11%. Or, parmi tous ceux qui s’agitent autour de nous, il n’y en a pas un qui a eu 8%», a martelé le patron de la mouvance présidentielle. Qui poursuit en saluant l’acte posé par Ndéné et autres qui l’ont rejoint malgré les critiques acerbes. «Ceux qui viennent de nous rejoindre, vous avez pris tous librement et courageusement la décision d’être à mes côtés, dans le seul but et le seul intérêt du Sénégal. Merci à vous qui n’avez pas fléchi face à cette dictature rampante qui voudrait la pensée unique», déclare Macky Sall. Qui fonce directement sur l’opposition. «Au nom de quoi devrait-on dire que ceux qui vont vers la majorité ont trahi la République ?», s’interroge-t-il.
«Nous ne pouvons plus accepter que nos magistrats soient insultés, il faut que la loi s’applique»
Décidé à remettre ses adversaires politiques à leur place, le leader de Bby dénonce leur attitude consistant, selon lui, à dénigrer systématiquement les institutions de la République. «Je voudrais dire aux uns et aux autres de faire preuve de plus de respect envers la République, envers le pays, et envers ses institutions et faire preuve de plus de respect envers la justice de notre pays. Nous ne pouvons plus accepter que nos magistrats soient insultés à longueur de journée par des gens qui pensent que la République a été faite pour qu’ils marchent dessus», clame-t-il. Non sans demander que la loi s’applique contre ceux qui s’en prennent aux magistrats. «Moi, en tant que Président, je pardonne, parce que nous sommes des hommes politiques et nous sommes carapacés pour faire face. Mais ceux qui ont un devoir de réserve et qui sont protégés par la loi, on ne doit pas les trainer dans la boue. On ne laissera personne jeter le discrédit sur eux et les déshonorer. Il faut que la loi s’applique (ça c’est le travail du garde des Sceaux), parce qu’il faut que force reste à la loi», indique le chef de l’Etat.
Pour le chef de l’Etat, chaque Sénégalais peut nourrir des ambitions pour son pays et descendre dans le champ politique, mais que cela ne soit pas un prétexte pour s’en prendre à des institutions, notamment à la justice, vertement attaquée par des politiciens ces derniers temps. «Chacun peut être candidat ; je ne peux pas nier ce droit à qui que ce soit. Chacun a le droit d’avoir des ambitions; chacun a le droit de descendre dans l’arène, les petits lutteurs comme les grands lutteurs, et de s’activer ça et là. Mais personne n’a le droit d’insulter des magistrats, de les nommer... C’est injuste».
«Ce n’est pas en allant parcourir les ambassades européennes ou américaines que les choses changeront au Sénégal»
Le chef de l’Etat n’apprécie pas le fait que ses opposants aillent vilipender son régime dans les chancelleries étrangères ou directement à l’étranger. «Il faut qu’ils comprennent que nous vivons en République et en démocratie. Ce n’est pas en allant parcourir les ambassades européennes américaines et autres que les choses changeront au Sénégal. Le destin du Sénégal sera assuré par les Sénégalais», assène Macky Sall. Selon lui, c’est peine perdue pour l’opposition que d’aller crier au-secours à l’étranger : «notre indépendance a été obtenue en 1960. Ce sont les Sénégalais qui feront et qui déferont dans ce pays. Ce n’est pas une ambassade étrangère ou un pays étranger. Ce n’est pas en piétinant l’honneur du Sénégal que vous arriverez à vos fins».
Poursuivant, il met en garde et assure que la sécurité et la paix seront garanties quoi qu’il en soit. «Chacun agira comme il veut, mais soyez sûrs que la République est entre de bonnes mains, que la paix des citoyens sera garantie, que les citoyens seront libres d’exprimer leurs suffrages. Rien ni personne n’y pourra quoi que ça soit». Un avertissement sans frais aux libéraux qui menacent d’empêcher la présidentielle, si la candidature de Karim Wade est invalidée. Mais, visiblement, ils ne font pas peur à Macky Sall. «Ce ne sont pas les menaces qui font développer le pays. Surtout quand on sait qu’on ne peut rien du tout, contre celui qu’on menace. Tu te mets à injurier, à insulter quelqu’un, tout en sachant que s’il répond ou réplique, c’est toi qui en souffrirais le plus».
«Moi, le palais, j’y vais pour travailler. Je rentre le soir chez moi, parce qu’il ne me fascine pas»
Ceux qui menaçaient de marcher sur le palais pour protester contre la pénurie d’eau ne font pas non plus peur au chef de l’Etat. Rappelant les efforts importants du gouvernement dans le secteur, Macky Sall d’asséner. «Sortir des slogans aussi ridicules que : nous allons marcher sur le palais... Moi, le palais, j’y vais pour travailler. Je rentre le soir chez moi, parce qu’il ne me fascine pas. Je suis là par la volonté des Sénégalais. Je ne vais pas au palais pour le plaisir d’y être», explique-t-il. Avant de verser quasiment dans la raillerie. «S’ils veulent, je peux les inviter à diner, à déjeuner, même à dormir s’ils veulent. Il n’y a pas de problème. C’est le palais du peuple. Mais dire qu’on va marcher devant le palais, alors que vous ne pouvez même pas arriver à la place de l’indépendance, il faut que nos amis soient raisonnables».
«Le combat est terminé avant même d’avoir commencé… Si le crapaud veut prendre la place de l’éléphant, il va se fatiguer pour rien»
Ne lâchant pas ses opposants, Macky Sall s’étonne que ceux qui ont rejeté le parrainage se soient déplacés en masse pour retirer des fiches. «Où sont aujourd’hui ceux qui disaient qu’il n’y aura pas de parrainage ? Combien sont allés retirer, dans la bousculade, les fiches de parrainage ? 100 candidats (potentiels), en attendant. S’il n’y avait pas le parrainage comment allions-nous faire ?», dit-il. Mais le chef de l’Etat candidat à sa propre succession croit savoir ce qui est derrière cette attitude nihiliste des opposants. Aussi, il affirme : «La vérité est que les gens ne veulent pas aller à l’élection, parce qu’ils savent ce qui les attendent : une défaite claire et nette. Il n’y a aucun doute là-dessus. Ce n’est pas parce que je manque de considération aux autres, car ce n’est même pas dans ma nature de manquer de considération à une personne. Mais si le crapaud veut prendre la place du chameau ou de l’éléphant, il va se fatiguer pour rien». Dès lors, sa conclusion est sans appel. «Le combat est terminé avant même d’avoir commencé».
Mbaye THIANDOUM