Après 14 résolutions lues, entre autres, par les jeunes, femmes, étudiants, enseignants de la coalition Osez l’Avenir, Me Aïssata Tall Sall a été investie candidate de ladite coalition pour briguer la magistrature suprême. La dame de fer, surnommée «Maman Osez» par ses militants, n’a pas fait dans la dentelle pour dénoncer l’émergence inexistante chantée par le pouvoir en place.
«Derrière chaque grande dame, il y a toujours un grand homme». C’est en ces mots, pour rendre hommage à son mari, que Aïssata Tall Sall a commencé son speech. Alors qu’elle avait prévu de lire son discours de 37 pages, l’avocat a décidé de le résumer, pour déplorer le gouffre lugubre dans lequel se trouve le Sénégal, mais aussi présenter son programme appelé «Société du progrès».
«Les populations attendent que leurs conditions de vie changent»
«Dans notre programme, l’agriculture occupe une place fondamentale. Pour ce qui est de l’éducation, nous proposons aux enseignants, une fois au pouvoir, un nouveau pacte autour de l’école», a indiqué la parlementaire. «En effet, notre volonté de changer le Sénégal ne peut être comparée qu’à la souffrance de nos populations, celles des villes, comme celles des campagnes, celles qui, depuis fort longtemps, attendent que leurs conditions de vie changent et deviennent meilleures», a soutenu la candidate de Osez l’Avenir.
Construction d’une nouvelle société : celle du bien vivre et celle du mieux vivre
«Critiquant les différentes politiques mises en place depuis les années 1960, Me Aïssata Tall Sall demande : «que nous ont apporté le libéralisme, le socialisme et le libéral socialisme ? Pas grand-chose !», répond ainsi l’avocate, ragaillardie par une salle pleine à craquer. Et de poursuivre : «l’ajustement structurel, le bradage de nos ressources naturelles, une gestion chaotique de l’État, alors que le Sénégalais se cherche, terrassé et vaincu par les difficultés de tous ordres, qui a vu les alternances politiques se succéder pendant que sa situation économique et sociale se dégrade jour après jour. Que peuvent nous apporter ces idéologies importées de l’Occident, si le Sénégal va mal et les Sénégalais guère mieux ?», constate le maire de Podor. C’est pourquoi, dit-elle, elle propose la construction d’une nouvelle société : celle du bien vivre et celle du mieux vivre.
La leçon d’émergence
Sur ce, elle s’attaque sans gants à «l’émergence» chantée par Macky et Cie. «Au Sénégal, on nous chante l’émergence à tort et à travers. Or, c’est quoi l’émergence ? Si Macky Sall ne sait pas ce que c’est que l’émergence, je vais lui donner des cours. Ils ne savent pas que l'émergence est née en 90 et que c'est l'accumulation des richesses, rien à voir avec l'émergence que l’on nous chante ici», dit-elle. Et de continuer : «au Sénégal, si nous examinons notre situation, au regard de ces indicateurs, nous voyons que nous sommes loin du développement, malgré tout ce qui nous est chanté par le pouvoir. Prenons l’exemple de l’éducation, en premier, elle offre un tableau de crises répétitives, découlant de deux faits majeurs : un dysfonctionnement grave du cycle scolaire dû au choc de la massification de l’école (surpeuplement des écoles, des lycées et des universités) ; des engagements pris par l’État du Sénégal et jamais honorés».
Couverture sanitaire universelle en lieu et place de Couverture maladie universelle
Pour ce qui est de la santé, Aïssata Tall Sall démonte la politique de la Couverture maladie universelle une fois de plus. «On nous parle de Cmu, alors qu’on meurt de rien au Sénégal», dit-elle. Pour elle, «à la place de la Couverture maladie universelle, nous préférons et nous mettrons en place une Couverture sanitaire universelle qui prendra en charge, non pas les maladies lorsqu’elles s’installent, mais pour empêcher qu’elles surviennent».
Samba THIAM
SUR LES CHEFS D’ETAT PRESENTS A L’INVESTITURE DE MACKY SALL
«C’est un mélange de genres regrettable»
La présence de quatre chefs d’État africains à l’investiture de Macky Sall est un mélange de genres regrettable. Telle est la conviction de la présidente de la coalition Osez l’Avenir. En marge de la cérémonie de son investiture, Aïssata Tall Sall a démasqué la stratégie du président de la République. «Je pense que c’est un mélange de genres regrettable pour le Sénégal qui a quand même dépassé cela. L’investiture d’un candidat est un acte éminemment juridique et éminemment politique. Eux étaient là dans le cadre certes d’une rencontre politique, mais je crois qu’on n’avait pas à faire ce mélange de genres. C’est regrettable de la part du Président Macky Sall», a fait savoir l’avocate. D’ailleurs, ajoute-t-elle, «je ne suis pas étonnée que nombre de Sénégalais aient condamné cela ; on a fait comme si c’était une investiture d’un candidat qui a déjà gagné et ça, c’est pour façonner psychologiquement les Sénégalais et leur dire que la victoire a déjà été acquise. Nous n’acceptons pas cela et nous montrons aux Sénégalais qu’on est loin de la victoire chantée». Mieux, elle soutient que «le Président Macky n’a jamais été invité à une investiture du Président Ouattara ni de quelqu’un d’autre, à une prestation de serment oui. C’est pour ça que je dis que le jeu était subtil. Le jeu était de mettre déjà dans la tête des Sénégalais que ce candidat, il a gagné et ça, ce n’est pas servir le Sénégal, ce n’est pas servir sa démocratie».
S. THIAM