Alors que le Dialogue national s’annonce comme un moment clé de la vie politique du pays, certains acteurs majeurs refusent d’y prendre part. Non par rejet du dialogue en tant que tel, mais parce qu’ils refusent de cautionner un processus vicié dès l’origine.
Le président du Mouvement Agir est formel. L’ancien parlementaire Thierno Bocoum annonce avoir pris la décision de ne pas participer au dialogue appelé par le président de la République le 28 mai prochain. Dans une vidéo virale dans les réseaux sociaux, Thierno Bocoum déchire le document d’invitation. « Nous ne participerons pas au Dialogue national. Non pas par hostilité au dialogue lui-même, car dialoguer est un fondement de toute démocratie, mais parce que le cadre proposé aujourd’hui est loin d’incarner les principes de transparence, de sincérité et d’inclusivité » renseigne-t-il.
Il salue néanmoins l’initiative du dialogue. Mais il manifeste ses suspicions après avoir lu les termes de référence. « Nous saluons le ministre de l’Intérieur pour la remise des termes de référence (TDR), et reconnaissons l’initiative du président de la République qui a voulu inscrire cette rencontre dans l’agenda républicain. Toutefois, il ne suffit pas d’annoncer un dialogue pour en garantir la légitimité. Encore faut-il que les intentions soient claires, les objectifs partagés et les engagements tenus ». A l'en croire, il relève des incohérences sur la démarche. « Regardons de plus près ce qui s’est passé autour du conseil supérieur de la magistrature (Csm). Le président avait promis de s’en retirer. Et pourtant, à travers ce dialogue, il a subtilement renversé la charge de la décision, prétendant que ce sont les magistrats eux-mêmes qui s’opposent à son retrait. N’est-ce pas là une manière déguisée de légitimer un reniement ? », dit-il.
En effet, il souligne que ce dialogue n’est autre qu’une occasion pour revenir sur leur promesses qu’ils ne peuvent plus honorer. « Cette stratégie, nous la voyons venir : instrumentaliser le dialogue pour faire passer des décisions impopulaires ou non annoncées. Des engagements fermes ont été pris devant le peuple : limitation des pouvoirs du président, renforcement du pouvoir judiciaire et du législatif, suppression du poste de Premier ministre au profit d’un vice-président. Or, aujourd’hui, on nous parle de renforcer le Premier ministre. Où sont passées les promesses ? À quelle légitimité obéit-on ? Le danger est là : créer un exécutif bicéphale, où le partage du pouvoir entre président et Premier ministre pourrait ouvrir la voie à des conflits internes et à une instabilité institutionnelle. Ce n’est pas ce que le peuple a voté », précise Thierno Bocoum qui est radicale.
En somme, invite-t-il le régime : « nous lançons un appel solennel : que ceux qui détiennent aujourd’hui le pouvoir respectent leurs engagements. Qu’ils aient le courage d’assumer leurs choix devant l’Assemblée nationale ou par voie référendaire. Mais qu’ils ne se servent pas du dialogue comme d’un paravent pour se soustraire à leur parole donnée. La République n’est pas un terrain d’expérimentation politique. Elle repose sur la constance des institutions, la clarté des intentions et le respect de la souveraineté populaire. C’est au peuple, et à lui seul, que revient le dernier mot » conclut-il.
BMS