Les violences basées sur le genre sont multiformes dans la société sénégalaise et concernent l’excision qui, en dépit des sanctions pénales encourues, est encore pratiquée sur certaines filles, notamment dans le sud-est du pays ; même si le pourcentage national est en baisse en passant de 25,7% en 2011 à 24% en 2017, selon le rapport de Onu-Femmes, en partenariat avec l’Ansd. Quant aux violences sexuelles, les victimes concernent les femmes en rupture d’union. Les femmes victimes de violences physiques sont plus présentes en milieu rural qu’en milieu urbain.
La loi 99-05 a certes instauré des sanctions pénales chez les auteurs des mutilations génitales féminines (Mgf), mais la pratique de l’excision perdure toujours dans la clandestinité, comme en témoigne cette publication de Onu-Femmes en partenariat avec l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (Ansd) sur les violences basées sur le genre (Vbg). En effet, l’enquête réalisée (par Eds 2017) révèle que sur la prévalence et le type d’excision parmi les femmes âgées de 15-49 ans, 24% ont déclaré avoir été excisées. Un pourcentage en légère baisse par rapport à 2011 (25,7%) et 2005 (28,2%). Cette pratique est très influencée par l’appartenance ethnique, avec un pourcentage de 74,7% chez les Mandingues/Socés, les Soninkés (63,3%), les Diolas (58,6%) et les Pulaars (49,3%). Elle varie également selon la région. C’est le cas dans le sud-est notamment à Kédougou (91%), Sédhiou (75,6%), Matam (73,3%), Tamba (71,8%), Ziguinchor (68,2%) et Kolda (63,6%).
Plus la mère est instruite, moins la fille est exposée à l’excision
L’enquête révèle aussi que l’excision est pratiquée à des âges très jeunes. Ainsi, dans 79,6% des cas, l’excision est faite avant l’âge de 5 ans et 12,1% ont été excisées entre 5 et 9 ans. 14% des filles âgées de 0-14 ans ont été excisées, 7,5% ont subi l’excision avant 1 an et pratiquement 5,6% entre 1-4 ans. Cependant, l’instruction de la mère influence aussi la pratique d’excision de la fille. En effet, plus la mère est instruite, moins la fille est exposée au risque d’être excisée. La prévalence de l’excision passe ainsi de 16,3% chez les filles dont la mère n’a aucun niveau d’instruction à 6,1% chez les filles dont la mère a un niveau moyen/secondaire ou plus. En effet, 44,8% des femmes qui ont été excisées pensent que c’est une nécessité religieuse, contre seulement 2,6% parmi celles qui ne le sont pas. De même, 56,5% des femmes excisées sont favorables au maintien de cette pratique contre 2,4% parmi celles qui n’ont pas subi cette pratique.
Violences physiques plus présentes en milieu rural
En ce qui concerne les violences domestiques notamment physiques, l’enquête a révélé qu’elles sont plus accentuées en milieu rural. Le pourcentage de femmes de 15-49 ans qui ont subi des violences physiques depuis l’âge de 15 ans est de 27,8 % en milieu rural et 25,1% en milieu urbain. Il en est de même pour la violence physique au cours des 12 derniers mois avant l’interview, soit 10% dans le milieu rural et 8,2% en milieu urbain. Les régions où les violences sur les femmes sont plus enregistrées sont Sédhiou (43,5%), Fatick (42,0%), et Kédougou (41,8%). Ce sont les mêmes régions qui caracolent en tête sur la violence physique au cours des 12 derniers mois avec respectivement 18,6%, 16,8% et 16,0%. La tranche d’âge qui a subi le plus ces violences est 25-29 ans avec (30,6%), suivi des femmes âgées de 30-39 ans et les femmes âgées de 15-19 ans avec respectivement 26,8% et 26%. Relativement, la proportion la plus faible de ce type de violence est observée dans la tranche d’âge de 40-49 ans (5,4%). Le pourcentage de femmes de 15-49 ayant subi des violences physiques depuis l’âge de 15 ans et au cours des 12 derniers mois est plus élevé chez les femmes célibataires (37,4%) que chez celles en rupture d’union (23,2%) ou en union (27,1%). Pour les femmes qui ont subi des violences physiques au cours des 12 derniers mois avant l’entretien, celles en rupture d’union occupent la première place avec un pourcentage de 17,1%. S’ensuivent les femmes en union avec un pourcentage de 9,4%.
Violences sexuelles plus importantes chez les femmes en rupture d’union
Quant aux violences sexuelles, le pourcentage de femmes victimes de violences sexuelles au cours des 12 derniers mois avant l’interview est plus élevé chez les femmes âgées de 25-29 (5%). Cette proportion est moins importante dans la tranche d’âge de 15-19 ans (3,4%). Cependant, la proportion des femmes qui ont subi des violences sexuelles à n’importe quel moment de leur vie est plus importante en milieu urbain. Il en est de même pour les femmes qui ont subi des violences sexuelles au cours des 12 derniers mois avant l’interview avec 5,3% pour le milieu urbain contre 3,5% pour le milieu rural. S’agissant des violences sexuelles, les régions de Fatick (13,4%), de Thiès (11,4%), de Dakar (9,8%) et de Kaolack (8,8%) concentrent les pourcentages de femmes de 15-49 ans ayant déclaré avoir subi des violences sexuelles à un moment de leur vie. Les régions de Sédhiou, Kaffrine, Kédougou et Matam enregistrent les pourcentages les plus faibles, légèrement supérieurs à 3%. Le pourcentage de femmes ayant subi des actes de violence sexuelle est nettement plus important chez les femmes de 15-49 ans en rupture d’union (17,5 %) que chez les femmes en union (9,4%) et les célibataires (5,4%). Parmi les femmes qui déclarent avoir subi une violence sexuelle au cours des 12 derniers mois avant l’interview, 12,9% sont en rupture d’union, 5,4% sont en union et 0,7% sont célibataires. Dans la plupart des cas (61,9%), c’est le conjoint/partenaire actuel qui est cité comme responsable de ces actes de violences sexuelles.
Violences physiques pendant la grossesse
La proportion des femmes qui déclarent avoir subi des violences physiques pendant leur grossesse est le plus élevée dans le groupe d’âges 15-19 ans (12,5%). Cette proportion décroit en fonction de l’âge en passant de 4% dans le groupe d’âge 20-24 ans à 2,5% chez les femmes âgées de 25-49 ans. La proportion de femmes ayant subi des violences physiques pendant leur grossesse est plus élevée dans la région de Fatick (9,8%) suivie de Kolda (7%). Les régions de Ziguinchor et Sédhiou avec respectivement 0,6% et 0,8% ont un taux plus faible. Les femmes du groupe d’âges 25-29 ans (34,2%) sont celles qui ont subi plus de violence physique ou sexuelle. Elles sont suivies des femmes âgées de 18 ou 19 ans et celles de 30-39 ans ayant subi une violence physique ou sexuelle de l’ordre de 31,4% et 30,8%. Les femmes de 15-17 ans ou encore les adolescentes constituent la proportion la moins élevée (26,1%).
Violences conjugales
Au cours des 12 derniers mois, 9,4% des femmes ont subi des actes de violences conjugales physiques, 5,9% des actes de violence sexuelle et 9,4% des actes de violence émotionnelle. La proportion de ces femmes en union ou en rupture d’union qui déclarent avoir subi une forme de violence physique ou des actes de violence émotionnelle à tout moment de leur vie est respectivement de 17,4% et 13,3%. Cette proportion est de l’ordre de 7,4% pour n’importe quelle forme de violence sexuelle. L’acte de violence physique le plus fréquemment déclaré par les femmes est d’avoir été giflé (13% à n’importe quel moment et 7% au cours des 12 derniers mois). Les femmes ayant déclaré avoir subi des actes de violence conjugale sexuelle ont déclaré, dans 7% des cas, avoir été forcées physiquement à avoir des rapports sexuels avec leur mari/partenaire quand elles ne le voulaient pas, contre 6% au cours des 12 derniers mois. En ce qui concerne la violence émotionnelle, l’acte le plus fréquemment déclaré est l’insulte (10% à n’importe quel moment et 7% au cours des 12 derniers mois). Le pourcentage de femmes de 15-49 ans ayant subi des actes de violence conjugale (émotionnelle, physique ou sexuelle), à n’importe quel moment, a atteint au moins 30% ; dans les régions de Sédhiou (42%), Kolda (37%), Tambacounda (32%), Fatick (30%) et Kédougou (30%). Cette proportion est beaucoup plus faible dans les régions de Louga (16%) et Diourbel (17%).
Prévalence du VIH en baisse
La séropositivité au VIH est de 0,5% pour les femmes et 0,4% pour les hommes de 15-49 ans. Cette prévalence est presque similaire en milieu urbain (0,4%), et en milieu rural (0,5%) aussi bien chez les femmes que chez les hommes. Elle varie cependant d’une région à une autre passant de 1,9% à Ziguinchor à 0,1% à Thiès. Dans l’ensemble, la tendance de la prévalence au VIH est à la baisse passant de 0,7% en 2010 à 0,5% en 2017.
Moussa CISS