Palais de Justice de Dakar. La salle 3, abritant les audiences correctionnelles, est prise d’assaut, ce mercredi 23 décembre 2020. Toutes les places sont prises. Ceux qui sont venus en retard et qui ont eu le privilège d’accéder dans la salle étaient obligés de rester debout. En cette période marquée par la deuxième vague de la maladie du coronavirus, à part le port des masques, la distanciation sociale n’a pas été respectée dans la salle. Les proches, amis et parents des détenus sont présents dans la salle. Itou pour les membres de la famille de la défunte Hiba Thiam. Il est 10h30 lorsque le juge de la 3e chambre correctionnelle appelle l’affaire numéro 116, inscrite au rôle du jour est appelé. Les détenus Dame Amar, Pape Diadia Tall, Fatoumata Jacqueline Rigal alias Poupette Djibril Ndiogou Bassène alias Nekh, Alia Bakir, et Lamine Diédhiou se présentent un à un devant le prétoire. Ils ont tous le visage masqué, ce qui fait qu’il était très difficile de voir l’expression de leur visage. Mais ils ont tous soigné leur mise. Et les coiffures des dames semblaient être fraichement réalisées. Lamine Niane et Louty Ba, en liberté provisoire, les rejoignent devant le prétoire. Les prévenus sont poursuivis pour association de malfaiteurs, tentative d’extorsion, détention de drogue en vue de la consommation personnelle, violation de la loi sur le couvre et non-assistance à une personne en danger. La famille de Hiba Thiam se constitue partie civile Après que tous les prévenus ont été identifiés, Me Seydou Diagne, l’un des avocats du père de la défunte, a pris la parole pour annoncer la constitution des frères et sœurs de Hiba Thiam qui, insiste l’avocat, ont également souffert de la disparition de cette dernière. Mais les avocats de la défense s’y opposent. Pour Me Ciré Clédor Ly, ces derniers, s’ils veulent se constituer partie dans cette affaire, devraient faire le déplacement d’autant plus qu’ils n’ont jamais été entendus dans le dossier. Me Seydou Diagne est revenu à la charge pour dire que ses confrères de la défense se sont trompés. Etayant son argumentaire, Me Seydou d’expliquer : « La loi dit que les parties civiles ce sont les personnes qui ont personnellement souffert de l’infraction. On ne peut considérer, dans une famille où il y a le père, la mère et trois frères que la partie civile concerne que le père. Ce n’est pas quelque chose d’acceptable pour nous et c’est pour cela qu’ on a, respectueusement attiré l’attention du tribunal qu’en plus du père et de la mère, qu’il y avait trois frère et sœur qui étaient également parties civiles. Le tribunal a cru qu’on l’a fait pour la première fois, j’ai donné une lettre du 16 avril 2020 qui avait été communiquée au juge d’instruction. Depuis le 16 avril, on a mis les 6 membres de la famille. On y a ajouté le jugement d’hérédité du tribunal qui montre que les héritiers de Hiba Thiam sont son père, sa mère et ses autres frères qui avaient le droit d’être représentés au procès et surtout d’être convoqués par le procureur ». Finalement, le juge, après concertation avec ses deux assesseurs, a renvoyé l’affaire au 13 janvier, non pas pour les explications de Me Seydou Diagne mais, pour plaidoiries. Les avocats de la défense qui ne lâche pas du lest, décident de plaider la liberté provisoire. C’est Me Ousmane Diagne quia ouvert le bal et à son avis, ces détenus devraient recouvrer la liberté puisqu’ils ont été arrêtés pour des faits qui relèvent du domaine de compétence du tribunal des flagrants délits. « Ils ne sont pas poursuivis pour crime ni pour assassinat. On leur reproche de n’avoir pas assisté Hiba Thiam. Et depuis 9 mois ils sont en prison », a regretté la robe noire. Son confrère Ciré Clédor Ly embouche la même trompette. Pour lui, ces jeunes ont été déjà « jugés et condamnés par le juge d’instruction qui les a retenus en prison ». Poursuivant, Me Ly a fait savoir que rien ne devrait s’opposer à ce que les détenus ne soient remis en liberté. Car, dit-il, « même s’ils sont jugés, ils ne seront pas condamnés à plus de 3 mois ferme ». le juge "déchire" le ticket de sortie délivré par le procureur Invité à faire son réquisitoire, le maître des poursuites s’est rangé du côté des avocats de la défense. Autrement dit, il ne s’est pas opposé à la demande de mise en liberté provisoire sollicitée par la défense. Il ne voit pas d’inconvénient à ce que l’ensemble des jeunes soient en liberté. De l’avis du parquet, les détenus ont suffisamment de garanties de représentation en justice et on peut leur accorder la liberté provisoire. Mais, le juge qui a le dernier mot n’a pas suivi le parquet dans son réquisitoire. Le juge, statuant publiquement, a rejeté la demande de mise en liberté provisoire puisque, dit-il, « le trouble à l’ordre public ne s’est pas estompé ». Ainsi, Dame Amar et Cie ne passeront pas noël en famille et vont prendre leur mal en patience. Assurant la défense de Fatoumata Jacqueline Rigal, Me Ndèye Fatou Touré n’est pas d’accord du rejet de la demande de mise en liberté provisoire. « C’est choquant parce que le parquet ne s’est pas même pas opposé. Il n’y a aucun trouble à l’ordre public », a déploré l’avocate qui en a profité pour dire que les Dame Amar et Cie ont été victimes d’un lynchage médiatique. « Ce que je dénonce c’est le traitement incriminé de nos demandes de mise en liberté provisoire. Ma cliente n’a absolument rien à faire en prison », plaide-t-elle en dehors de la salle d’audience, devant les micros des journalistes.
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