La commission d’instruction de la Haute Cour de justice a envoyé Mansour Faye en prison. Un mandat de dépôt a été délivré au frère de Marième Faye Sall après qu’il a été inculpé de plusieurs chefs dont détournement de deniers publics, escroquerie portant sur des deniers publics, corruption, concussion, blanchiment de capitaux, prise illégal d’intérêt etc. Pourtant, ses avocats ont bataillé ferme pour lui éviter la prison. Des requêtes ont été faites en ce sens, mais elles ont toutes été rejetées. Mansour Faye, qui était sous perfusion, selon ses conseils, a rappliqué dare-dare, pour éviter l’humiliation d’un mandat d’amener et a ainsi rejoint Moustapha Diop et Cie, en prison.
Mansour Faye : de l’hôpital à la prison
La loi est froide et elle est sans état d’âme. L’ancien ministre du Développement communautaire l’a connu à ses dépens. Même sorti d’un accident, le président de la commission d’instruction de la Haute Cour de Justice a estimé qu’il n’y avait pas lieu à renvoyer l’audience. Mansour Faye devait se présenter à 11h, mais il a eu du retard et ses avocats ont expliqué au juge qu’il avait rendez-vous avec son médecin. Toutefois, à un moment donné, le juge a exigé sa présence, si l’on en croit un de ses conseils ; il a même donné 10 minutes à ses avocats pour le frère comparaître. Au-delà, il prendrait ses responsabilités. Les conseils ont tenté d’expliquer au juge qu’il était sous perfusion, mais ce dernier n’a rien voulu comprendre. Les avocats appellent alors le médecin pour lui dire de lui faire un certificat médical avec une invalidité, mais ce dernier rétorque qu’il ne pouvait le faire tant qu’il n’avait pas fini la perfusion et tant qu’il n’a pas eu les résultats des examens. Pour éviter l’humiliation d’un mandat d’amener, comme mentionné dans le mandat de comparution, les avocats ont convaincu le médecin de le laisser venir. Mansour Faye a donc comparu avec beaucoup de retard.
L’inculpation et le placement sous mandat de dépôt
Dès son arrivée, notification a été faite à l’ancien ministre des chefs d’inculpation visé à son encontre, notamment, le détournement de deniers, l’escroquerie portant sur des deniers publics, la concussion, la corruption, la prise illégale d’intérêt, le blanchiment de capitaux, etc. Les avocats de la défense ont fait des observations orales pour tirer d’affaire leur client. Tour à tour, Me Amadou Sall et ses confrères constitués ont expliqué au juge qu’une requête aux fins d’inconstitutionnalité a été déposée auprès de la commission vendredi et qu’ils ont deux autres points à soulever. L’autre point soulevé sur l’audience, ce sont les contestations sérieuses. Selon la défense, il n’y a pas eu de surfacturation ; ce qu’il y a, c’est que les agents inspecteurs ont pris les prix du kilogramme de riz de l’année 2014 et ils ont fait la différence avec les prix de 2020 et c’est cette différence qui constitue la surfacturation ; « tout le monde sait que le prix du riz en 2014 est beaucoup moins cher que celui de 2020 », a martelé un des conseils. Mieux, selon toujours les robes noires, Mansour Faye a été félicité par la Cour des comptes, dans son rapport, pour avoir fait des appels D’offres ; et il a été le seul à le faire alors qu’il n’y avait aucune obligation ; et beaucoup ne l’ont pas fait, faisant perdre de l’argent au trésor public. Car il nécessite de faire des enregistrements au niveau du trésor et cela implique de payer des impôts. Il a donc respecté la procédure allant même jusqu’à demander l’avis de l’Agence de régulation des marchés publics (Armp) ; « pour dire qu’il n’avait rien à cacher».
Mieux, toujours selon les avocats, il y a eu une commission qui a été mise en place et c’est cette commission, dont il n’est pas membre, qui a fait l’appel d’offre et sur les 30 soumissionnaires, 4 ont été retenus et les marchés ont, au bout du compte, été approuvés par le ministre des Finances d’alors. «Donc normalement, ce ministre des Finances devait être arrêté puisqu’il est autant responsable que Mansour Faye», a pesté encore un conseil.
Le dernier point, c’est l’alternative du bracelet électronique qui est aussi autorisée par la loi.
Selon toujours cet interlocuteur, Mansour Faye a proposé de cautionner des biens en nature «et sur ces biens, il peut bien y avoir qui appartiennent à des proches, mais ce ne doit pas être cela l’essentiel pour la Commission, pourvu que cela puisse être muté au nom de l’Etat», précise ce conseil.
La commission dégage tout en touche ; le mandat de dépôt notifié
Toutes ces requêtes ont été écartées. Selon la commission d’instruction, il n’est pas nécessaire de transférer le dossier au Conseil constitutionnel et sursoir à statuer et renvoyer l’audience à une autre date, en attendant la décision du Conseil constitutionnel, car la commission n’est pas la Cour d’appel. Les contestations sérieuses développées par les robes noires n’ont pas non plus convaincu. S’agissant de l’offre de cautionnement, la commission d’instruction a refusé. Comme toujours, c’est le chèque qui est accepté, les offres en nature sont écartées. Mansour Faye devait donc proposer un chèque de 2,7 milliards ou rejoindre la prison. Finalement, la Commission a notifié le mandat de dépôt au frère de l’ancienne Première dame.
Alassane DRAME