L’inflation a atteint un niveau record au Sénégal en 2022 avec un taux de 9,7% après un taux de 2,2% l’année précédente. En effet, au cours de cette année sous revue, toutes les fonctions de consommation se sont renchéries, hormis celle de la « communication » qui a enregistré une baisse des prix de 1,8%. Les prix des « produits alimentaires et boissons non alcoolisées » ont enregistré la plus importante progression avec une hausse de 15,1%. Les prix des fonctions de consommation, telles que les services de « loisirs et culture », les services de « restaurants et hôtels », de « logement, eau, gaz, électricité et autres combustibles ». Les prix des services de « transports », de « santé » ont progressé, respectivement, de 2,3% et 2,2%.
Selon le Fonds Monétaire international (Fmi), l’inflation mondiale a atteint 8,8% en 2022, dépassant le niveau de 3,5% d’avant la pandémie. L’inflation annuelle moyenne s’est établie à +7,3 % dans les pays avancés et à +9,9 % dans les pays émergents et les pays en développement en 2022. En particulier, dans les pays en développement à faible revenu, l’inflation a dépassé 14%. Par ailleurs, dans la zone Uemoa, le taux d’inflation en moyenne annuelle est ressorti à +7,4%. Il est resté supérieur au seuil communautaire de 3,0% dans la quasi-totalité des Etats membres de l’Union. Les taux d’inflation sont évalués à +14,1% au Burkina Faso, +9,7% au Mali, +7,9% en Guinée-Bissau, +7,6% au Togo, +5,2% en Côte d’Ivoire, +4,2% au Niger et +1,4% au Bénin. Au Sénégal, le taux d’inflation s’est établi à +9,7% en 2022 (le même taux que le Mali), après 2,2% l’année précédente. Avec ce bond des prix à la consommation, l’inflation a atteint un niveau record depuis 1994, année de la dévaluation du franc Cfa. En effet, au cours de cette année sous revue, toutes les fonctions de consommation se sont renchéries, hormis celle de la « communication » qui a enregistré une baisse des prix de 1,8%.
Une hausse de 15,1% des prix des produits alimentaires et boissons non alcoolisées
Les prix à la consommation en 2022 ont enregistré une tendance haussière d’avril à novembre 2022 avec de forts accroissements mensuels en juillet et août. Ils ont ensuite affiché un repli au mois de décembre. Il ressort ainsi de la note de l’évolution annuelle de l’indice harmonisé des prix à la consommation que les prix des « produits alimentaires et boissons non alcoolisées » se sont accrus de 15,1% en 2022 et ont contribué à hauteur de 7,9 points de pourcentage au taux d’inflation annuel. Cette situation résulte principalement du renchérissement des poissons et des légumes. En effet, les prix des poissons frais (+26,3%) et séchés ou fumés (+27,4%) ont fortement augmenté. Concernant les légumes, les accroissements de prix sont plus notés au niveau des légumes frais en feuilles (+31,9%), des tubercules et plantains (+20,0%), des légumes secs et oléagineux (+19,6%) et des légumes frais en fruits ou racines (+19,6%). L’évolution des prix des poissons et des légumes est, en partie, liée à la demande soutenue et aux difficultés dans ces secteurs résultant principalement de la rareté des ressources. Au titre des poissons frais, la diminution de 4,9% des débarquements globaux de la pêche en 2022, comparativement à 2021, aurait contribué à la hausse des prix.
Hausse de 16% du prix de l’huile
Le relèvement des prix des huiles (+16,9%) en 2022, comparé à 2021, a fortement contribué à celui des prix des produits alimentaires. Cette tendance haussière des prix est consécutive à celle des cours mondiaux des matières premières et également du coût du transport. A titre illustratif, le prix moyen de l’huile de palme, intrant principal de l’huile végétale raffinée, a bondi de 9,3% en 2022, comparativement à l’année antérieure. Elle a été exacerbée par l’appréciation, sur la même période, du dollar par rapport à l’euro et indirectement par rapport au franc Cfa (+11,0%). L’augmentation des prix de la viande de volaille (+20,4%), de bœuf (+14,9%) et de mouton (+14,4%), a aussi concouru au renchérissement des prix des produits alimentaires. La cherté des intrants, tels que l’aliment de bétail aurait contribué à la hausse des prix. De même, certains facteurs économiques et socio-politiques, tels que la fermeture des frontières avec le Mali, le premier fournisseur du Sénégal en animaux sur pieds, ont exacerbé cette situation. Au même moment, la hausse des prix des céréales non transformées (+11,9%) ainsi que des farines, semoules et gruaux (+17,6%) atteste d’une tension particulière sur les prix de toutes les variétés, notamment le mil, le maïs et le sorgho qui ont enregistré de fortes hausses de plus 33,0%. Dans le même sillage, les prix des différentes variétés du riz ont également augmenté, dans une moindre mesure, entre 2,0 et 9,0%. La politique d’homologation des prix de l’Etat a néanmoins atténué cette flambée des prix dans un contexte de recul de 2,6% de la production mondiale, de renchérissement du fret maritime et de la montée des taux de change du dollar. Les prix des pains ont également affiché une progression de 9,9% en rythme annuel. Les tensions sur les cours mondiaux du blé (+41,5%) ainsi que sur les facteurs de production ont impacté ces prix. D’autres denrées de grande consommation à l’instar du sucre et du lait n’ont pas échappé à cette inflation généralisée.
Une hausse des prix des biens et services de loisirs et culture
Les prix des services de « loisirs et cultures » se sont accrus de 8,7% au cours de l’année sous revue. La forte majoration des prix des forfaits touristiques (+24,0%), résultant de la flambée des frais de voyage à la Mecque, a favorisé cette évolution. En effet, ces derniers se sont renchéris de plus de 27,3% avec la mise en place d’un système plus restrictif de quota de pèlerins par pays, à la suite de la pandémie de Covid-19. De même, la hausse des prix des services récréatifs et culturels (+4,2%) ainsi que du matériel audiovisuel, photographique, de traitement de l'image et du son (+2,7%) a concouru à cette tendance haussière. De plus, les prix des journaux, livres et articles de papeterie (+2,7%) ont augmenté au cours de la période sous revue. Cette fonction a contribué à hauteur de 0,3 point de pourcentage au taux d’inflation en 2022. Les services de « restaurants et hôtels » se sont renchéris de 6,2% avec une contribution de 0,2 point de pourcentage à l’évolution du niveau général des prix. Cette variation trouve son origine, autant au niveau de la hausse des prix des services de restaurants (+6,2%), que celle des prix des services d’hébergement (+4,5%). La progression des prix des services de restaurants, cafés et établissements similaires (+6,3%) et de cantines (+5,9%) explique celle des prix des services de restaurants. Ces activités sont fortement impactées durant l’année 2022 par la flambée des coûts de production, notamment les intrants et l’augmentation du coût de la vie. Les évolutions des prix des services de restaurant et hôtel en glissement annuel se sont inscrites dans une dynamique haussière de janvier à août 2022, en franchissant notamment la barre des 6,0% dès le mois d’août. Cette tendance s’est poursuivie à partir d’octobre, après un repli en septembre, pour s’établir à plus de 8,0% en novembre et décembre.
Le logement, l’eau, l’électricité, le gaz etc., en hausse
La progression des prix des biens et services de « logement, eau, électricité, gaz et autres combustibles » (+4,1%) est liée en grande partie à la flambée des prix des biens et services pour l'entretien et réparation des logements (+10,1%) ainsi que ceux de l’électricité, gaz et autres combustibles (+3,4%). S’agissant des biens et services pour l'entretien et réparation des logements, leur renchérissement est porté, particulièrement, par celui des matériaux de construction de base (+11,4%), tels que le fer et le ciment, ainsi que de la main d’œuvre (+4,4%). La hausse des prix du fer à béton et du ciment est liée, en grande partie, aux difficultés d’accès aux matières premières, exacerbées par le confit russo-ukrainien. Au titre des biens et services d’électricité, gaz et autres combustibles, leur renchérissement est dû à celui des combustibles solides (+12,2%) et des combustibles liquides (+8,9%), au moment où les coûts de l’électricité sont restés stables grâce à la politique de subvention de l’Etat. De même le relèvement des prix des loyers effectifs (+1,0%) a contribué à l’inflation des prix de la fonction.
La hausse des carburants et lubrifiants ont impacté les services d transports
Les prix des biens et services de « transports » se sont accrus de 2,3% en 2022. Cet accroissement est dû, principalement, au renchérissement des dépenses d’utilisation de véhicules (+2,4%), des services de transport, notamment aérien de passagers (+14,4%) et routier de passagers (+1,1%). S’agissant des dépenses d’utilisation de véhicules, leur évolution est due essentiellement à celle des carburants et lubrifiants (+4,1%). Longtemps maintenus stables par une politique de subvention de l’Etat, les prix homologués ont été revus à la hausse pour faire face à une flambée des cours mondiaux du pétrole brut (en moyenne plus de 64% en juin 2022). Ainsi, le prix du supercarburant est passé de 755 francs le litre à 890 francs. Également, l’augmentation du prix des huiles de moteur (+9,4%), des services d’entretien et réparations de véhicules particuliers (+5,3%) ainsi que des pièces détachées et accessoires (+1,3%) a concouru à cette situation. Quant aux services de transport, malgré une dynamique positive du trafic par rapport à la période du Covid-19, les prix des billets d’avion restent toujours élevés. L'augmentation du prix du carburant et la forte appréciation du dollar face à l'euro qui impacte les coûts de maintenance seraient parmi les causes. Par ailleurs, les prix des achats de véhicules ont légèrement progressé au cours de la période sous revue (+0,1%), sous l’effet de la hausse de ceux des automobiles (+1,1%) et des cycles, motocycles et véhicules à traction animale (+3,6%).
Les services de santé plus couteux
Sur un an, les prix des biens et services sanitaires se sont relevés de 2,2% et ont contribué à hauteur de +0,1 point de pourcentage à la variation de l’indice global. Cette hausse traduit essentiellement l’envolée des prix des services hospitaliers (+3,3%), des produits, appareils et matériels médicaux (+1,9%) et des services ambulatoires (+1,7%). L’évolution de ces derniers est consécutive à la hausse des coûts des services des auxiliaires médicaux (+5,0%) et ceux de laboratoires et de radiologie (+2,6%). Concernant la tendance des prix des produits, appareils et matériels médicaux, elle est liée à la progression de ceux des médicaments modernes (+1,2%), des médicaments traditionnels (+9,1%), ainsi que des produits médicaux divers (+2,3%). Cette hausse est, néanmoins, atténuée par le repli des prix des appareils et matériel thérapeutiques (-0,4%). La fonction a contribué à hauteur de 0,1 point de pourcentage au taux d’inflation 2022.
Une diminution des prix de la communication
Contrairement aux autres fonctions, les prix des biens et services de « communication » se sont repliés de 1,8% sur un an, en rapport avec la baisse de ceux des services de téléphonie (-1,4%). Le recul des prix des services de la communication téléphonique (-4,7%) explique cette baisse avec la multiplication des offres promotionnelles de crédits. Par ailleurs, les prix du matériel de téléphonie et de télécopie (+1,2%) ont progressé durant cette période. L’augmentation des coûts de production, entrainée par l’inflation mondiale ainsi que les problèmes d’approvisionnement, ont impacté ce secteur. La contribution de la fonction à la variation de l’indice global est négative et s’est établie à -0,5 point de pourcentage.
M. CISS