Lors de la prière de l’Aïd-el-Kébir, Bougane Guèye Dany a lancé une charge frontale contre le gouvernement du Premier ministre Ousmane Sonko, pointant du doigt l’inaction du ministre de l’Économie face à une crise sociale et économique qu’il juge insoutenable. Dans un discours empreint de gravité, le leader du mouvement Gueum Sa Bopp appelle à un sursaut national pour éviter que le Sénégal ne sombre dans un chaos irréversible.
À l’occasion de la fête de Tabaski, Bougane Guèye Dany a transformé cette tribune religieuse en une scène de dénonciation politique forte. Selon lui, le Sénégal traverse moins une crise politique qu’un effondrement économique profond, exacerbé par une gouvernance qu’il qualifie d’«inefficace et arrogante».
«Le ministre de l’Economie est devenu un spectateur de la souffrance collective»
La principale cible dans cette prise de parole musclée n’est autre que le ministre de l’Économie, accusé de passivité et de déconnexion avec les réalités du terrain. «Ce ministre est devenu un spectateur de la souffrance collective. Ce pays n’a pas besoin de chiffres froids issus de bureaux climatisés, mais de décisions concrètes et courageuses qui changent la vie des gens», a martelé Bougane. Il reproche à l’exécutif de fuir ses responsabilités en se retranchant derrière des justifications théoriques pendant que la population s’enfonce dans une précarité sans précédent.
«Si le ministre de l’Economie ne peut pas redonner vie à l’économie, qu’il cède sa place»
En évoquant la fête de la Tabaski, symbole de partage et de solidarité, Bougane a souligné l’ampleur de la détresse sociale. «Regardez autour de vous : cette année, des milliers de familles n’ont pas pu sacrifier un mouton. Ce n’est pas une crise passagère, c’est un effondrement silencieux», a-t-il insisté, la voix lourde de colère et d’indignation. Il y voit le signe tangible d’un État qui a perdu tout lien avec son peuple. Le ton s’est durci davantage lorsque le chef de file de Gueum Sa Bopp a lancé un appel direct au départ du ministre de l’Économie. «S’il ne peut pas redonner vie à l’économie, qu’il cède sa place. Le Sénégal ne peut plus se permettre de perdre du temps avec des technocrates indifférents. Ce pays a besoin d’acteurs et non de figurants», a-t-il asséné.
«Notre démocratie est en lambeaux»
Mais la diatribe ne s’est pas arrêtée à l’économie. Dans un discours musclé, Bougane Guèye a relié la crise sociale à une instabilité politique croissante. Il a exprimé sa solidarité avec les détenus politiques, dénonçant «l’influence néfaste et l’arrogance des politiciens » qui, selon lui, accentuent les tensions sociales en refusant toute forme de dialogue ouvert. Il évoque une démocratie en lambeaux, rongée par les calculs partisans et les dérives autoritaires. « Le climat de peur, la répression, les arrestations arbitraires ne sont pas des signes de force, mais les symptômes d’un pouvoir à bout de souffle», a-t-il déclaré. Bougane a averti contre les risques d’une déchirure irréversible du tissu social si des mesures urgentes ne sont pas prises. Pour lui, seul un sursaut moral et institutionnel peut encore éviter une descente aux enfers.
« Il est temps de gouverner avec le peuple, et non contre lui »
Appelant à une révision de la gouvernance nationale, il a lancé un plaidoyer pour un changement profond de paradigme : «Il est temps de gouverner avec le peuple, et non contre lui. L’arrogance, l’opacité et le mépris doivent cesser. Le Sénégal ne peut plus avancer à reculons.» Dans ce contexte alarmant, Bougane Guèye Dany préconise une approche inclusive, rassemblant société civile, forces politiques et économiques autour d’un pacte de redressement national. Il exhorte les autorités à sortir de leur tour d’ivoire et à tendre l’oreille aux cris de détresse qui montent des marchés, des quartiers populaires et des zones rurales oubliées.
Selon lui, l’heure n’est plus aux discours d’autosatisfaction ni aux grandes annonces creuses. Ce qui est attendu, insiste-t-il, ce sont des mesures concrètes, palpables, et une gouvernance centrée sur l'humain : «les commerçants, artisans, femmes transformatrices, jeunes diplômés au chômage… tous attendent autre chose que des statistiques embellies. Ils attendent des réponses.»
«Un peuple affamé et humilié finit toujours par se lever»
Dans un autre registre, il a également averti contre la tentation de la répression face à l’expression des frustrations populaires. «Un peuple affamé et humilié finit toujours par se lever. Ce n’est pas une menace, c’est une leçon de l’histoire», a-t-il averti avant de tendre la main à tous. «Nous devons choisir : continuer à subir ou décider de bâtir un autre avenir. Le Sénégal peut être sauvé, mais il faut du courage, de l’écoute et de l’action», a-t-il conclu.
Baye Modou SARR