Thierno Alassane Sall n’est pas content de la manière dont les experts du Conseil constitutionnel ont procédé lors de la vérification et de l’élimination des listes de parrainage en vue de l’élection présidentielle du 24 février 2019. Il l’a fait savoir, vendredi, lors de son passage au Conseil constitutionnel, d’où il a lancé un appel aux Sénégalais à défendre, eux-mêmes, la démocratie de notre pays.
Parmi les candidats «recalés» par le Conseil constitutionnel dans le cadre des vérifications des parrainages en vue de la présidentielle, Thierno Alassane Sall a vite fait de se plaindre. C’est dans ce cadre qu’il a tenté, vendredi dernier, de déposer un recours. À cet effet, son mandataire s’est présenté au siège de l’Institution judiciaire. Mais, c’était sans compter avec les agents sur place, qui n’ont pas permis à l’envoyé de la République des valeurs de déposer le dossier, sous prétexte qu’il est venu en retard.
Informé de la situation, le leader du parti a vite rallié le lieu. Après avoir tenté, en vain, de régler le problème, Thierno Alassane Sall, qui a fait constater la situation, a crié au scandale. Et c’est pour dénoncer le fait qu’ils ont reçu l’ensemble de la paperasserie sous forme uniquement matériel et l’absence de clef électronique qui aurait permis d’analyser les 18.000 et quelque parrains qui ont fait objet de rejet. «À l’analyse nous avions vu que ces 18.000 cas pouvaient s’analyser de manière très différente. Que la façon dont l’expert chargé du travail a analysé de manière non contradictoire et de manière non transparente, puisqu’on n’a (reçu) aucune explication rationnelle. Et on est venu déposer un recours, qu’on a pris le temps de rédiger avec des notes explicatives. Et quand le mandataire s’est présenté, à 17 heures 30, il était dans l’impossibilité de voir la greffière, qui était occupée, semble-t-il. Admis dans la salle d’attente, il a patienté jusqu’à ce que, voyant la greffière en train de partir. Il a avisé des personnes travaillant au Conseil constitutionnel qui ont eu l’amabilité de saisir les personnes requises pour leur demander de revenir faire leur travail. Parce que cette institution est au service de la République, au service surtout en ce moment des candidats qui doivent faire valoir leur droit», a expliqué l’ancien ministre de l’Énergie qui a fait constater la situation par un huissier.
Même les huissiers…
«On nous a notifié l’impossibilité de déposer et d’attendre lundi. Nous pensons que ce n’est pas normal. Nous avons demandé par ailleurs à des huissiers de venir constater ce fait. Plusieurs ont, de manière insidieuse, refusé de venir en prétextant mille choses. C’est finalement une dame remarquable qui est venue nous faire les constats d’usage. Là également, surprise, le gendarme préposé à l’entrée n’a pas voulu constater qu’on est venu à l’heure», dénonce-t-il encore. Avant de s’attaquer, sans le citer, au Président Macky Sall, qui, selon lui, est très loin d’un démocrate. «C’est dire que cette situation est ubuesque et ressemble à une farce et un théâtre de mauvais goût. Nous sommes dans une République qui se prétend être une des plus grandes démocraties au monde. À l’épreuve des faits, nous voyons que nous sommes dans une République qui ressemble à une République bananière, si les faits continuent», fustige-t-il. Et de donner l’exemple kenyan où «on a annulé le premier tour d’une présidentielle pour des raisons très claires». Ainsi, estime-t-il, «des raisons beaucoup moins solides que l’élimination de certains parrains au prétexte que, par exemple : un u ou un n manque à un nom, alors que tous les autres éléments sont corrects», s’indigne-t-il.
Le recours déposé aujourd’hui
Et d’ajouter : «nous avons fait une note scientifique, écrit par un mathématicien, pour montrer que si on a 46 caractères, par exemple, on choisit parmi les 26 lettres de l’alphabet, par exemple, la probabilité de trouver le nom de la personne, de trouver son numéro d’électeur et le nom de sa commune, ça relève de l’ordre de l’humainement impossible», assure le leader de la République des valeurs, qui annonce : «nous reviendrons lundi avec notre recours et l’exploit de l’huissier».
«Est-ce que les Sénégalais sont prêts à payer le prix qu’il faut pour qu’on reste un pays libre ?»
Mais, déjà, Thierno Alassane Sall dit ne se faire aucune illusion quant à la volonté d’assurer une sorte d’élection mascarade. Ainsi, il interpelle les Sénégalais : «Est-ce qu’ils veulent accepter que la nuit noire de la dictature s’abatte sur notre pays ? Ou est-ce que les Sénégalais sont prêts à payer le prix qu’il faut pour qu’on reste un pays libre, où les institutions et notamment la justice fonctionne de manière libre, équitable et au service du droit et de la liberté ?», demande-t-il, disant que «ce qu’on a vu sur le procès Khalifa Sall n’est pas à l’honneur de notre pays, n’est pas à l’honneur de notre justice. Et nous n’avons aucune raison d’avoir confiance».
Sidy Djimby NDAO