La position du ministre de l’Intérieur fait grincer des dents, relativement à l’enquête ouverte par le procureur sur l’affaire Petro-Tim/Aliou Sall. Pour Thierno Alassane Sall, il ne peut pas être patron de la Dic, alors que c’est cette dernière qui mène l’enquête. De même, le président de la «République des Valeurs» trouve que le ministre de la Justice, de qui dépend le procureur, ne peut enclencher aucune action judiciaire crédible, dans une affaire où d’anciens et actuels ministres sont cités et sur laquelle le chef de l’Etat, son patron, a déjà pris position.
Thierno Alassane Sall qui, avec ses alliés du Crd, vient de déposer une plainte contre Aliou Sall, Frank Timis et Wang, ne cache pas son scepticisme quant à l’enquête ouverte par la Dic, sur demande du procureur. Son premier problème avec cette enquête est la position du ministre de l’Intérieur, Aly Ngouille Ndiaye. Il ne peut pas comprendre que ce dernier, qui est cité dans cette affaire de contrat Petro-Tim, soit en même temps le patron des enquêteurs. «Certains vous diront que la Dic rend compte au procureur, mais le boss de la Dic, c’est le ministre de l’Intérieur. Tous les agents de la police sont sous l’autorité directe du ministre de l’Intérieur, de qui ils prennent des instructions et qui peut les affecter et déterminer leur carrière», explique-t-il. Poursuivant, Thierno Alassane Sall souligne que la position de l’actuel ministre de l’Intérieur, ministre de l’Energie au moment des faits, «c’est ce qu’on appelle communément, être juge et partie». Et de rappeler aussi que dans les pays à démocratie avancée où la justice fait correctement son travail, il y a des mécanismes pour éviter de telles situations. «Aux États-Unis, par exemple, pour résoudre cette question et éviter ces problèmes de partialité et de conflits d’intérêt, on nomme des procureurs indépendants, encore que, là-bas, les procureurs sont déjà plus indépendants que chez nous», note-t-il.
Le ministre de la Justice et son procureur disqualifiés, Thierno Alassane Sall favorable à une commission d’enquête parlementaire
Le cas Aly Ngouille Ndiaye n’est pas le seul élément qui empêche le leader de la République des Valeurs de faire confiance à l’enquête. La dépendance du procureur au ministre de la Justice, qui lui-même dépend du chef de l’Etat qui a déjà donné son avis sur la question, trouvant qu’il n’y a rien à y fouetter un chat, pose de sérieux problèmes de crédibilité de l’enquête. «La question de fond dans cette affaire est : est-ce que le ministre de la Justice peut lancer, à travers le procureur qui dépend de lui, une enquête impartiale et indépendante, sur des faits où sont impliqués ou cités un ancien président de la République, l’actuel président de la République, d’anciens ministres et des ministres en exercice, qui siègent à ses côtés au Conseil des ministres ?», fait-il remarquer. Non sans souligner que la messe est déjà dite, quand on sait que «le Président a déjà donné des indications quant aux résultats de l’enquête : confondre les ‘’naafeq’’ et ‘’rambaaj’’ et prouver qu’il n’a jamais reçu le rapport de l’Ige».
Et l’ancien ministre de Macky Sall, devenu un de ses pires opposants, d’ajouter avec désolation que, «dans une démocratie authentique, cet aveu (du chef de l’Etat), à lui seul, vaudrait scandale». Pour toutes les raison évoquées, Thierno Alassane Sall pense que le dossier ne devrait pas revenir à la justice, contrôlée par l’exécutif dont des membres sont cités, mais au parlement. «Cette enquête ne devrait-elle pas relever du parlement ?», questionne-t-il. C’est en tout cas sa conviction et ce qu’il a réclamé depuis toujours. En effet, l’ancien ministre a toujours dit tout haut qu’il était prêt à aller témoigner devant une commission d’enquête parlementaire sur le dossier.
Mbaye THIANDOUM