La justice est-elle pressée d’envoyer Adama Gaye à la guillotine ? L’empressement dont elle a fait montre hier porte à le croire. En effet, après qu’il est retourné au commissariat central, en fin d’après-midi, pour avoir fait l’objet d’un retour de Parquet, les limiers sont allés l’extraire à nouveau pour le reconduire devant le Doyen des juges qui devait l’inculper et certainement le placer sous mandat de dépôt. Heureusement, ses avocats informés, ont vite fait de retourner au tribunal pour plaider un report. Au final, le Doyen des juges a accédé à leur demande en reportant l’inculpation à aujourd’hui.
A croire que la justice en veut à mort à Adama Gaye. L’empressement dont a fait montre hier le Parquet pour passer à l’inculpation du journaliste par le Doyen des juges d’instruction est assez étonnant, mais aussi expressif. Et comment ! Déféré hier au Parquet après avoir été gardé à vue par les éléments de la Section de Recherches pour les chefs d’inculpation de diffusion d’écrits contraires aux bonnes mœurs et offense au chef de l’Etat, Adama Gaye est resté à la cave du palais de justice Lat-Dior jusqu’en fin d’après-midi avant d’être ramené au commissariat central. N’ayant pu voir le Doyen des juges d’instruction à qui le dossier a été confié par le chef du Parquet à travers son réquisitoire introductif, le journaliste venait de faire l’objet d’un retour de Parquet. Comme de coutume, lorsque la personne ne voit pas le magistrat instructeur et fait l’objet d’un retour de Parquet, elle retourne au commissariat central en attendant de revenir le lendemain. Tout le monde, au premier chef les avocats du journaliste, retourne à ses occupations pour revenir aujourd’hui. Mais, on ne sait pourquoi, et du fait de quelle l’urgence, les limiers ont extrait Adama Gaye du violon du commissariat central en début de soirée, pour le reconduire au palais de justice Lat-Dior afin qu’il rencontre le Doyen des juges d’instruction, qui devait lui notifier son inculpation et certainement son placement sous mandat de dépôt. Mais, c’était sans compter avec la détermination des avocats de la défense, qui ont immédiatement rappliqué. Ils ont convaincu le magistrat instructeur du renvoi de l’affaire à 24 heures. C’est donc aujourd’hui que le journaliste va faire face au juge Samba Sall, qui va lui notifier son inculpation et très probablement son placement sous mandat de dépôt. Mais quelle est l’urgence ? Pourquoi ne pouvait-on pas attendre aujourd’hui, du moment qu’il était déjà retourné au commissariat central ?
Faut-il le souligner, les actes posés par le Procureur à travers les enquêteurs ainsi que les propos tenus hier par le ministre de la Justice, garde des Sceaux, ne prédisent rien de bon pour Adama Gaye. En effet, le journaliste a été dans un premier temps poursuivi pour le délit de diffusion d’écrits contraires aux bonnes mœurs. Seulement, avant la fin de son interrogatoire, les enquêteurs ont greffé un autre chef d’inculpation, qui est l’article 80, en l’occurrence l’offense au chef de l’Etat. Un geste annonciateur de mauvaise nouvelle pour le journaliste. Et comme si cela ne suffisait pas, le ministre Me Malick Sall qui a fait une sortie hier, par rapport à cette affaire, s’est montré ferme, sans état d’âme, en faisant savoir que c’est lui qui a initié les poursuites. L’attitude du ministre de la Justice a laissé deviner que la justice sera sans état d’âme dans cette affaire.
Me Malick Sall a été le… témoin de mariage de Adama Gaye
Birima Makhourédia Demba Kholé Fall), plus connu sous le nom de Kocc Barma Fall l’avait dit il y a longtemps. Grand penseur de son époque, il avait dit : «Buur du mbokk» (les autorités n’ont pas d’amis). Cette assertion de Kocc Barma Fall se confirme avec le cas Adama Gaye. En effet, des proches du journaliste sont étonnés du comportement du ministre de la Justice. Ce dernier est présenté en effet comme l’ami intime de Adama Gaye. Selon toujours les proches du journaliste, Me Malick Sall a même été le témoin de mariage du journaliste à Paris. C’est dire les relations très étroites qui les liaient. Comme quoi quand vient l’heure de prendre une décision qui concerne le pays, la main ne tremble pas et les relations n’existent pas.
Alassane DRAME