C’est la fatigue ou sont-ils simplement dépassés par la tournure de l’affaire Amy Ndiaye ? On ne saurait dire, mais la séanceplénière de ce samedi a été moins bruyante que les précédentes. Les députés de la XIVème législature, qui n’arrêtent pas de se donner en spectacle depuis leur installation, ont examiné le projet de budget du ministère de la Pêche presque sans accrochage. Pape Sagna Mbaye a eu droit naturellement à une longue liste de doléances qui ont trait aux accords et licences de pêche, aux pirogues en fibre de verre, au repos biologique, mais aussi à la règlementation des usines de farine de poisson.
Une salle presque vide avec des députés moins virulents que d’habitude, c’est l’accueil que le parlement sénégalais a réservé hier à Pape Sagna Mbaye, ancien député devenu ministre de la Pêche. Avec une quarantaine d’inscrits, les questions ont tourné majoritairement entre la pêche artisanale et la pêcheindustrielle. Abdoulaye Diouf Sarr s’est érigé en porte-parole de ses parents lébous. Il a invité le ministre à accorder plus d’importance à la pêche artisanale. Pour lui, l‘Etat doit veiller à protéger les pécheurs artisanaux qui n’arrivent plus à joindre les deux bouts, s’ils ne perdent pas la vie en mer. C’est la raison pour laquelle il suggère la mise en place de géolocalisation pour éviter les disparitions en mer et la multiplication des pirogues en fibre de verre plus économes et plus sûres pour les pêcheurs.
Sira Ndiaye abonde dans le même sens. Selon elle, malgré les nombreuses réalisations du Président Macky Sall, le secteur est traversé par de nombreuses difficultés. Elle a demandé l’audit des fonds mis par le président de la République depuis 2019 et qui sont sans grand apport. Même si elle magnifie la mise en place des pirogues en fibre de verre, cette dernière estime qu’elles sont très chères pour les pêcheurs qui peinent à avoir quelque chose à se mettre sous la dent.
Les accords et licence de pêchefustigés
Les accords de pêche aussi ont occupé une importante partie des discussions entre le ministreen charge de la Pêche et les députés. Pour Guy Marius Sagna, qui accuse le Président Macky Sall d’avoir vendu la mer sénégalaise aux Européens, les gens sont aptes à s’offusquer de la rareté des produits sans toucher du doigt la véritable cause. «Il a déshabillé les pêcheurs sénégalais pour habiller l’Union européenne. Il encourage la concurrence entre les pêcheurs européens et nos pêcheurs. C’est de la haute trahison, de la préférence pour les étrangers au détriment de son peuple», fait savoir le député activiste. Pour lui, c’est l’Etat lui-même qui organise la rareté du poissions, poussant les jeunes pêcheurs à s’adonner à l’émigration clandestine et mourir en mer ou aller pêcher dans les eaux guinéennes et se faire tuer. Un avis que partage Ndèye Satala Diop qui pense elle aussi que ce sont les pêcheurs qui se sont reconvertis en passeurs pour l’émigration clandestine.
Ndiaga Niang aussi fait partie de ceux qui pensent que les accords de pêche nuisent à nos pêcheurs. «Il faut lister les bateaux européens. On nous parle de 37 bateaux pour 13 milliards, cela n’en vaut pas la peine. Ils ne pêchent pas le thon seulement», renseigne-t-il. Pour lui, tant qu’un ministre de la Pêche n’ira pas en mer voir de ses propres yeux ce que vivent les pêcheurs,il n’y aura pas de changement. A l’en croire, plus de 4 millions de personnes vivent des activités de la pêche. Alors,même s’il faut qu’ils se cotisent 2000 par mois pour combler le gap de l’argent tiré de ces accords, les pêcheurs seraient prêts à le faire
Ibrahima Diop lui est convaincu que dans le secteur de la pêche, «les ministres passent et les scandales demeurent.» Pour lui, la seule solution, c’est d’avoir plus de transparence dans l’attribution des licences de pêche.
Le repos biologique
Il y en a qui, en plus de de dénoncer les accords de pêche, ont formulé des suggestions ; c’est le cas de Oumar Cissé, député-maire de la ville de Rufisque. M. Cissé souhaiterait que l’on arrête les accords de pêche pour favoriser le repos biologique. Oumar Cissé estime que l’aquaculture ne peut pas être une alternative.
Les usines de farine depoisson sont aussi un véritableproblème. Ce que Daba Wagnane ne comprend pas, c’est comment on peut permettre a des étrangers de faire de la farine de poisson destinée à des croquettes de chats, alors que les populations ne voient plus le poisson.
Seydou Diouf : «les accords de pêche ont été signés alors que MackySall était au lycée»
Réduire le phénomène de l’immigration clandestine aux problèmes du secteur de la pêche,c’est faire preuve de mauvaise foi, selon Seydou Diouf. A l’en croire, beaucoup de régions sont victimes de la migration et pourtant elles ne sont pas des villes de pêche, le phénomènemigratoire est beaucoup plus profond qu’on ne le croit. «Les accords de pêche tant décriés ont été signés alors que le Président Macky Sall était encore au lycée ; alors il ne faut pas le tenir seul et unique responsable. Et puis, les accords de pêche ne sont pas si mauvais que ça, dans la mesure où ils font gagner de l’argent à l’Etat», déclare Seydou Diouf.
Ndèye Khady DIOUF
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