Des relations souvent heurtées entre acteurs politiques du pouvoir et de l’opposition, à la troisième vague de la pandémie du Covid-19, en passant par les mauvaises pratiques véhiculées dans les réseaux sociaux, le Khalife général des Tidianes, Serigne Babacar Sy Mansour, khalife général des Tidianes, s’est livré à un diagnostic sans complaisance des tares qui gangrènent la société sénégalaise. Une déclaration faite à l’occasion de la fête du nouvel an musulman.
La célébration du nouvel an musulman a été choisie par le Khalife général des Tidianes, Serigne Babacar Sy Mansour, pour s’adresser à la population. D’emblée, il regrette la violence physique et celle verbale qui, indique-t-il, ont atteint des proportions inédites. «Cette situation est exacerbée par notre profonde inclination à instaurer une compétition malsaine entre nous dans la quête des biens de ce monde et des positions, qu’elles soient religieuses, politiques ou sociales», fait remarquer le Khalife général des Tidianes. Dans cette dynamique, Serigne Babacar Sy Mansour est revenu sur les relations heurtées entre pouvoir et opposition. Si la polémique enfle, dit-il, c’est parce que ceux qui sont au pouvoir veulent s’y maintenir, tandis que l’opposition est à la quête de ce pouvoir.
Assemblée nationale : selon qu’on soit pour ou contre le gouvernement, on est prêt à défendre le mensonge ou à discréditer la vérité
Un différend plus perceptible à l’Assemblée nationale où invectives, injures et accrochages rythment les plénières. Tout simplement, selon qu’on soit pour ou contre le gouvernement, on est prêt, dit-il, à défendre le mensonge ou à discréditer la vérité. A la suite de ce constat, il n’a pas manqué de mettre en garde sur les conséquences de «ce jeu sordide qui consiste à se faire peur les uns, les autres» et qui risque de placer notre pays au bord du précipice. «Prenons garde d’ériger des frontières artificielles qui pourront faire le lit de démons œuvrant pour désunir ce que Dieu a ordonné de maintenir uni. J’exhorte chacun d’entre vous à reconsidérer son rapport avec son prochain en respectant sa différence : c’est cela le legs que nous ont laissé nos anciens. Efforçons-nous de le préserver et de le transmettre intact aux générations à venir», recommande le Khalife général des Tidianes.
Homosexualité, réseaux sociaux, exhibition des femmes…
Poursuivant, Serigne Babacar Sy Mansour se désole de constater que l’insulte et le dénigrement gratuits sont érigés en moyens d’ascension et de promotion sociale. «Ce phénomène est exacerbé par l’avènement des réseaux sociaux dont certains usent et abusent pour atteindre d’honnêtes citoyens, confortés en cela par l’anonymat et la facilité d’accès offerts par ces derniers, mais également par la multiplication des médias dont les programmes sont librement diffusés sans aucune censure, même pour ce qui heurte notre conscience ou notre moralité. L’exhibition est devenue une mode, surtout chez les femmes grâce à ces mêmes réseaux», indique-t-il, avant de déplorer, dans la foulée, certaines femmes qui recourent à des pratiques interdites par la religion pour allonger leurs cheveux à travers les greffages. Outre le fait que c’est une pratique bannie, il n’a pas manqué d’attirer l’attention sur les maladies que ces pratiques peuvent engendrer. Il a également dénoncé l’alcoolisme qui gangrène notre société avec de plus en plus de jeunes qui s’y adonnent, notamment avec les sachets vendus 100 francs l’unité. Il a également fait allusion à l’homosexualité qui doit être combattu par tous à défaut d’être un complice de ce phénomène. Aussi a-t-il appelé l’Etat à prendre ses responsabilités car personne ne peut légitimer ce qui est déjà interdit par Dieu. Autant de mauvaises pratiques contre lesquelles il a invité l’Etat à sévir et à les juguler.
Fermeture des mosquées : «la situation sanitaire de même que ma responsabilité de chef de communauté religieuse l’exigeaient et l’exigent toujours»
En outre, le Khalife général des Tidianes est revenu sur la pandémie de Covid-19 pour appeler les concitoyens à un retour vers Dieu par la prière et non par le reproche ; par la charité, le partage et la solidarité et non par le repli sur soi et l’individualisme. Car, il s’agit, dit-il, d’une malédiction et non d’une maladie. Poursuivant, il est revenu sur les raisons qui l’ont poussé à prendre la mesure de fermeture de mosquées dans la ville sainte de Tivaouane. «A l’apparition de cette pandémie dans notre pays, j’avais invité à fermer les mosquées et à confiner les daaras de notre obédience pour casser la chaîne de transmission du virus en nous inspirant de leurs conseils avisés. Cette même démarche a été reconduite à l’approche de la célébration de la naissance du Prophète, communément appelée Gamou. Ce qui m’avait amené à inviter les fidèles à célébrer le Gamou, chacun dans son intimité. Rien n’était plus douloureux à mes yeux que cette décision, au regard de la place que notre voie mohammadienne accorde à la fréquentation assidue des lieux de culte pour s’acquitter de nos obligations rituelles et confrériques. Mais la situation sanitaire de même que ma responsabilité de chef de communauté religieuse l’exigeaient et l’exigent toujours. J’ai même par moments, lorsque la situation sanitaire s’était améliorée, un peu avant la Tabaski, consulté ce même cercle de médecins sur l’opportunité de la réouverture des mosquées. Ils m’ont recommandé la prudence face au risque de flambée lié au relâchement des populations quant au respect des gestes barrières pendant cette période de fête et à la présence sur notre sol du nouveau variant Delta. L’avenir leur a malheureusement donné raison», souligne Serigne Babacar Sy Mansour.
Le Khalife s’est vacciné et recommande la vaccination
Ainsi, face à cette troisième vague, le Khalife appelle au respect des conseils des médecins, notamment par le respect des mesures barrières individuelles et collectives et par la vaccination. D’autant plus qu’à l’heure actuelle, c’est la solution la plus probante qui ait été trouvée depuis l’apparition de cette pandémie. Mieux, il révèle s’être déjà acquitté de la vaccination en plus d’y inciter sa famille et ses proches. «Facilitons la tâche aux autorités étatiques. Soulageons le personnel de santé qui n’a pas connu de répit depuis plus d’un an et demi, en s’en tenant à leurs recommandations», sermonne le guide religieux.
Moussa CISS