Il y a eu de la forte émotion, avant-hier, au quartier Demba Seck de Yeumbeul Sud, au cours de l’exhumation du corps de l’érudit et Imam ratib Thierno Amadou Maal, vers 02h. La cérémonie de déterrement intervient dans le cadre des travaux du Train express régional (Ter). La tombe, érigée en mausolée, se trouvait dans la maison du guide religieux qui abritait une mosquée et était sur le tracé du Ter.
La tombe de l’érudit et imam Thierno Amadou Maal a été «visitée», tard la nuit d’avant-hier, par les services compétents de l’Etat, notamment les sapeurs-pompiers et les éléments du service d’hygiène. L’instruction a été donnée par le préfet de Pikine, qui a motivé sa démarche par le souci de libérer l’espace au profit des travaux du Train express région (Ter).
A notre arrivée dans le quartier, à 23h05, un calme de cimetière régnait sur les lieux. Et il faisait nuit noire, ce qui empêchait les rares passants de se faire identifier. La quiétude des lieux et l’obscurité étaient perturbées, de temps à autre, par le passage bruyant des camions gros porteurs, transportant un chargement ou roulant à vide et qui éclairaient avec leurs feux, un tant soit peu, les lieux. Un léger dispositif, hyper discret de la police de Yeumbeul, était implanté devant le domicile du défunt homme de Dieu. Les feux de la fourgonnette de police et des véhicules banalisés étaient éteints. C’était vraiment la méthode du camouflage dans le but de frapper par surprise.
Une exhumation en toute discrétion et sous surveillance policière ; une tombe érigée en mausolée dans la mosquée
Des policiers en uniforme faisaient le pied de grue et conversaient entre les dents. D’autres en civil sacrifiaient au rituel des cent pas et surveillaient du regard les rares passants dans le secteur. Des soldats du feu et des éléments du service d’hygiène, sous la supervision des autorités administratives et préfectorales locales, étaient à pied d’œuvre à l’intérieur et s’affairaient autour de la tombe du guide religieux, érigée en mausolée devant lequel ses talibés et sa famille se recueillaient, le vénéraient et formulaient des prières. Les préposés au travail d’exhumation ont alors ouvert la caisse contenant le corps et ramassé les restes humains du guide religieux, avant de les mettre sous scellés. Ils les ont ensuite remis à la famille, qui s’est chargée de les transporter, vers 04h du matin, au village natal du marabout «Bokidiawé», situé dans la région de Matam. L’opération de déterrement a été menée de main de maitre et avec délicatesse par les sapeurs-pompiers. Elle a débuté à 23h passées et a pris fin aux environs de 02h du matin.
Le religieux avait prédit son exhumation et mis en garde sa famille contre son enterrement à côté des rails
Le défunt érudit, d’ethnie haalpulaar, a été enterré en 2013, dans un coin de la mosquée, où il dirigeait les prières de Tabaski et de Korité. Le lieu de culte était construit dans sa maison, qui abritait un jardin et un daara. Il a vécu jusqu’à l’âge de 71 ans. Il fut membre de la famille maraboutique des Barro de Thiès-Mbour. Mais, de son vivant, rapportent des proches de la famille, le vénéré marabout avait prédit son exhumation et mis en garde sa progéniture contre son enterrement à proximité des rails. «Il disait sans cesse ne pas avoir confiance aux rails. Qui pourraient être à l’origine de son exhumation», ont soutenu nos interlocuteurs.
Vieux Père NDIAYE
Les talibés s’indignent, tombent en syncope et crient à la profanation
L’exhumation, avant-hier, du corps du religieux Imam Thierno Amadou Maal a failli déclencher une vague de rébellion des talibés. Ces derniers ressentaient une profonde douleur et avaient toutes les peines du monde pour contenir leur rage face à l’opération de déterrement. Certains poussaient des cris d’indignation étouffés et éclataient en sanglots. D’autres entraient en transe et qualifiaient la séance d’exhumation du corps de leur marabout de profanation de sa tombe. «C’est une agression, voire une profanation de la tombe de notre guide religieux», hurlaient-ils.
V. P. NDIAYE