Cette semaine pourrait être décisive dans les relations entre le secrétaire général national du Parti démocratique sénégalais, Me Abdoulaye Wade et le président du groupe parlementaire Liberté et Démocratie, Me Madické Niang. Dans le bras de fer qui les oppose, à propos de la candidature du Pds à l’élection présidentielle du 24 février 2019, ils ont convenu de crever l’abcès à Doha, où s’est rendu Me Niang et où se trouvent Me Wade…et son fils Karim. Arriveront-ils à réduire la fracture qui les sépare ? Rien n’est moins sûr.
En effet, tout le monde sait que le pape du Sopi ne veut pas d’autre candidat que son fils Karim Wade, investi par le Pds bien avant sa condamnation par la Crei et son exil au Qatar. Hypothéquée par cette condamnation et le rejet de son inscription sur les listes électorales par le ministère de l’Intérieur, la candidature de Karim Wade n’en est pas moins portée par le parti libéral, qui a d’ores et déjà lancé la campagne de parrainage de son candidat. Il n’y a ni de plan B, ni de plan C, c’est Karim candidat ou pas d’élection présidentielle au Sénégal. Telle est la position officielle du Parti démocratique sénégalais, défendue par son secrétaire général national, mais aussi par la majorité des membres de son Comité directeur. Pour le moment, en dehors de Me Madické Niang et d’un groupe d’élus libéraux, qui ont écrit séparément à Me Wade pour demander d’envisager un candidat de substitution à Karim Wade, tous ceux qui ne seraient pas pour le maintien de la candidature de ce dernier ne se sont pas encore manifestés.
En tout cas, Me Wade, après avoir vertement tancé Me Madické Niang, l’accusant même de l’avoir poignardé dans le dos, avait fait volte-face pour accuser «des sources» qui l’avaient induit en erreur, tout en confirmant l’option du Pds de forcer le régime de Macky Sall à accepter la candidature de Karim Wade. C’était donc une paix des braves, doublée d’un dialogue de sourds, car, pour sa part, le président du groupe parlementaire libéral ne démordait pas dans son envie de de faire passer sa candidature, avec le Pds de préférence, mais sans le couvert de ce parti si cela devenait nécessaire.
Le temps de manœuvres
Le statu quo ne pouvant durer ad vitam aeternam, des initiatives ont été prises dans le sens de faire bouger les positions ou, à défaut, de consommer le divorce entre les compagnons de longue date. Le rendez-vous est calé à Doha et ce sera le temps des grandes manœuvres. Me Wade, fin politique, fera tout pour éviter la rupture avec son plus proche collaborateur depuis des années, ce en faisant patienter son interlocuteur, dans l’intérêt supérieur du Pds et pour ne pas fissurer le front qui fait face à Macky Sall. Madické Niang pliera-t-il pour se conformer aux desiderata du pape du Sopi ? Rien n’est moins sûr, puisque sa décision, dans son entendement, va dans le sens de l’intérêt du Pds qui ne peut pas rester sans candidat à la présidentielle. D’autant que des personnalités, telles que le marabout Serigne Modou Bousso Dieng, l’appellent à prendre ses responsabilités et à franchir le Rubicon. Même si, d’autres, comme son promotionnaire au barreau et frère de parti, Me Amadou Sall, le conjure de «ne pas faire d’échappée solitaire».
En tout cas, il faut s’attendre à un report des décisions de rupture et au maintien du statu quo, surtout que le retour de Karim Wade à Dakar, comme celui de son père, pourrait s’effectuer très rapidement.
Mansour KANE