Le litige du marché Sandaga entre la ville de Dakar et la commune d’arrondissement de Dakar-Plateau continue toujours. La mairesse de la ville de Dakar a convoqué un conseil extraordinaire pour statuer sur la démolition dudit marché par la commune de Plateau. Soham El Wardini est revenue sur la genèse du marché et des coups bas des autorisés qui utilisent la mairie de Plateau comme bras armé.
Convoqué à 16 heures à la ville de Dakar, le conseil extraordinaire convoqué par la mairesse de la ville, faute de quorum, a démarré ses activités à 17h22. Juste deux minutes après l’arrivée du maire, Soham El Wardini. Ils étaient 51 conseillers présents à l’entame des travaux. Il y a des conseillers qui sont venus au moment des travaux.
Après avoir fait la genèse du marché Sandaga, Soham Wardini a dit son étonnement de voir le dimanche 08 août dernier, des éléments supposés appartenant à la commune de Dakar-Plateau sur la terrasse du marché Sandaga en train de démolir le bâtiment en commençant par la devanture qui, dit-elle, est l’élément le plus important. Le lundi matin, poursuit-elle, la ville a dépêché un huissier pour constater les dégâts causés sur le bâtiment. Malheureusement, informe la mairesse de Dakar, il s’est heurté au refus des éléments de la mairie de Dakar-Plateau de le laisser pénétrer à l’intérieur de l’édifice pour faire son travail. «Finalement, nous avons saisi les autorités administratives. Et la Dscos a lancé l’arrêt des travaux et convoqué une réunion. J’ai déféré à la convocation et déposé en appui tous les documents nécessaires mais le même jour, la Dscos a informé la ville de la levée de la suspension des travaux de démolition du bâtiment contre les éléments fournis par la mairie de Dakar-Plateau», se désole Madame Wardini qui s’étonne que ces ‘’éléments’’ n’aient même pas été mis à ma disposition. «Je n’ai jamais été notifiée de cet arrêté de dévolution donnant Sandaga à la mairie de Plateau», jure la dame.
Pour ceux qui croient que c’est une affaire d’argent, Soham Wardini rassure : «nous, la ville de Dakar, ce ne sont pas les recettes qui nous intéressent. C’est notre patrimoine que nous devons préserver et protéger. Lors d’une réunion avec le ministre de l’Urbanisme, l’autorité nous a demandé si nous sommes d’avis de réfectionner ce bâtiment avec la commune de Plateau et l’Etat, j’ai directement dit oui. Je ne refuse pas cela. Je l’ai dit dans toutes les réunions auxquelles j’ai assisté. Nous n'avons jamais refusé de faire un projet avec le Plateau qui refuse de son côté. Comment peut-on construire sur le bien d’autrui ? Comment peut-on détruire le bien d’autrui ? Nous avons tout tenté».
«C’est un génocide, cette démolition»
Soham Wardini de se désoler que le maire de Plateau, pourtant président de la commission des Finances, ne vienne jamais en réunion. «Les taxes encore une fois ne nous intéressent pas. C’est un manque de considération et de respect vis-à-vis de la ville de Dakar. On doit se respecter entre collègues quand on discute. J’interpelle les Dakarois. Ce bien est le leur. C’est l’histoire de Dakar, c’est la mémoire de Dakar. C’est un génocide, cette démolition. Je pouvais bander les muscles en envoyant des gros bras pour en découdre, mais je ne le fais pas parce que je suis diplomate. Je dois demander l’autorisation du conseil avant de réagir. J’ai adopté cette posture parce que je suis une femme de paix, de dialogue. Mais là, trop c’est trop. La ville de Dakar a commis ses avocats qui ont entamé la procédure judiciaire. Je vais poursuivre ce combat jusqu’au bout, c’est mon devoir de défendre les intérêts de la ville de Dakar. C’est un combat civilisé que nous allons mener, pas de nervis.»
Baye Modou SARR
Après l’exposé des motifs sur la genèse du marché de Sandaga, c’est Cheikh Guèye qui a ouvert le bal des interventions des conseillers. Dans tous ses états, le maire de Dieuppeul-Derklé de dire : «on nous a fait comprendre que dans l’acte 3 de la décentralisation, on a fait des omissions et pour revenir 6 ans après que le maire de Plateau soit devenu ministre, sur les actes de dévolution des patrimoines. Comment se fait-il en une semaine de juillet 2020, en un seul jour, qu’on puisse faire tous les dossiers et prendre toutes les décisions au même jour ? Un esprit saint ne peut pas comprendre. Ce qui importe pour nous, c’est la sauvegarde du patrimoine de Dakar. Force doit rester à la loi. Je me joins à tous les conseillers municipaux épris de justice pour donner force à madame le maire à entreprendre toutes les dispositions nécessaires pour que le marché de Sandaga revienne à la ville de Dakar. Sandaga est un patrimoine de Dakar. Personne ne nous arrachera Sandaga».
Une position adoptée par Mansour Tambédou de Taxawu Dakar qui a soutenu qu’«il faut relever une amalgame. C’est la commune de Dakar qui est devenue ville de Dakar, parce que Dakar a été subdivisée en communes d’arrondissement. Il nous faut une motion de soutien au maire pour lutter contre ces agresseurs».
Pour sa part, Mbacké Seck de Rewmi demande à la mairesse de tenir une rencontre avec le maire Alioune Ndoye pour discuter et échanger sur la question, au lieu d’entamer une procédure judiciaire. «Je ne serai pas de ceux qui vous poussent à engager le combat avec le maire Alioune Ndoye. Il faut qu’on s’asseye à la même table avec le maire Alioune Ndoye pour discuter de la situation et trouver une solution, avant d’enclencher la machine judiciaire. Aller en justice est le dernier recours». Une position partagée par Ibrahima Fall : «je vous suggère de continuer votre ouverture et poursuivre le dialogue que vous avez commencé». Une suggestion balayée d’un revers de main par la mairesse Soham El Wardini. «J’ai fait tout mon possible pour échanger avec le maire de Plateau. Mais tel n’est pas le cas. Du coup, maintenant œil pour œil, dent pour dent. J’avais décidé de ne rien faire sans en parler au conseil. J’en ai marre, j’ai beaucoup écrit, mais rien. Ce n’est pas une affaire politique. Les avocats de la ville de Dakar ont entamé le travail judiciaire. J’irai jusqu’au bout. Je vais poursuivre le combat» argue-t-elle.
Un autre conseiller de la mairie de Plateau qui a quitté le camp du maire Alioune Ndoye de renchérir : «cette affaire est la énième affaire politique pour affaiblir la ville de Dakar. Il n’aurait pas tous ces privilèges s’il était resté à Taxawu Dakar. Il lui a fallu devenir ministre de la République pour avoir le soutien de l’Etat».
En réponse à Ibrahima Fall et à Mbacké Seck, le conseiller Badara Gadiaga, ancien Rewmi qui a rejoint Déthié Fall dans sa nouvelle formation politique, démonte : «je me porte en faux contre deux conseillers qui vous proposent le dialogue. Nous vous demandons d’ester en justice car il est allé nuitamment pour démolir le bâtiment. C’est la énième agression contre la ville de Dakar. Refusez pour la postérité», conclut le conseiller.
Ainsi, après les discussions, les conseillers ont voté à l’unanimité la délibération permettant à la mairesse d’engager la procédure judiciaire et de poursuivre le combat pour la restauration du marché Sandaga à la ville de Dakar.
Baye Modou SARR