Le projet de loi d’habilitation du chef de l’Etat inspire plus d’interrogations à Thierno Bocoum qu’il ne lui apporte de réponses. Ne comprenant pas, entre autres, la réunion de la loi d’habilitation et celle prorogeant l’Etat d’urgence, ainsi que le vide sur les domaines d’application de ladite loi, il attend des explications du gouvernement.
Thierno Bocoum ne veut pas non plus danser avec tout le monde. Car l’ancien député a décelé beaucoup d’incongruités dans le projet de loi. Et il veut des réponses par rapport à ses préoccupations. «Pourquoi mettre dans un même projet de loi, une loi d’habilitation et une loi de prorogation de l’Etat d’urgence ?», interroge-t-il. Car ce sont
«deux lois différentes qui sont séparément traitées» par la Constitution sénégalaise, à travers les articles 77 (loi d’habilitation) et 69 (Etat d’urgence) de la Constitution. «Aucune disposition constitutionnelle ne lie les deux domaines», clame-t-il. Poursuivant, le leader d’Agir ne comprend pas «ce décalage entre le discours du président de la République et le projet de loi d’habilitation».
Le président de la République, dans son adresse à la nation, fait-il remarquer, avait déclaré que conformément à l’article 77, il saisirait l’Assemblée nationale d’un projet de loi habilitant le président de la République à prendre, pour une durée de trois mois, des mesures relevant du domaine de la loi, afin de faire face aux impératifs d’ordre budgétaire, économique, social, sanitaire et sécuritaire de la lutte contre le Covid-19. Or, dit-il, les mesures sociales n’ont pas été adjointes au projet de loi alors qu’elles avaient été énumérées parmi les mesures entrant dans le cadre de la loi d’habilitation. Il se demande également : «pourquoi l’article 1er du projet de loi d’habilitation n’a pas précisé que les impératifs étaient liés au Covid-19» comme l’avait si bien précisé le président de la République, se limitant juste à parler d’impératifs d’ordre budgétaire, économique, sanitaire et sécuritaire, sans aucune autre forme de précision.
Et cela est d’autant plus suspect pour Thierno Bocoum que c’est là «une ouverture à tous les domaines. Et donc une violation des dispositions de l’article 77 de la Constitution», qui fixe les limites de temps et de compétences de la loi d'habilitation. En outre, l’ancien député de Rewmi souhaite être édifié sur le besoin de mesures budgétaires dans le cadre d’une habilitation, alors que le chef de l’Etat dispose, entre autres, de deux leviers importants que sont le projet de loi de finances rectificative et les décrets d’avance.
Mbaye THIANDOUM