Les députés, après l’avoir écouté disserter pendant près de deux tours d’horloge, ont salué dans la majorité la clarté et l’exhaustivité du discours. Ça a été chaud.
Anta Ngom : «les paroles sont certes belles, mais c’est le résultat qui compte»
Anta Babacar Ngom de taquiner d’emblée Ousmane Sonko. «L’attente fut longue, mais vous voilà». Commentant le discours du Premier ministre, Mme Diack estime que les paroles sont certes belles, mais c’est le résultat qui compte. «Nous combattrons toute injustice ou mal gouvernance, mais aussi nous vous accompagnerons dans les bonnes initiatives au service de la population», déclare Anta Babacar Ngom, qui demande par la même occasion à Ousmane Sonko son problème avec les femmes.
Ancien directeur de l’Artp, Abdou Karim Sall indique au Premier ministre que la surtaxe sur les appels entrants n’est pas une bonne décision. «Les opérateurs vont le répercuter au niveau de leur vis-à-vis qui le répercuteront sur les Sénégalais de la diaspora qui auront des difficultés à joindre leurs familles», dit-il.
Tahirou Sarr déplore l’accaparement de l’économie sénégalaise par les étrangers. «Confirmez-vous que les étrangers sont au nombre de 207.791 ?», déclare M. Sarr qui ne cache pas son inquiétude par rapport à l’exactitude de cette information. Pour lui, la meilleure option pour faire face à cette situation, c’est la mise en place de cartes de séjour de court terme de trois mois, moyen terme six mois ou long terme c’est-à-dire un an. «Cela permettra aux jeunes de retrouver du travail et le salaire sera valorisé. Les étrangers ont causé la baisse des salaires, ce qui explique le taux de chômage croissant des jeunes. Il y a la spoliation de l’état civil. L’étranger qui a duré au Sénégal sans papier légal achète des papiers auprès des services pour se régulariser», affirme M Sarr qui propose qu’on mette en place un fichier d’état civil exclusivement réservé aux étrangers.
Mbaye Dionne demande des informations sur le propriétaire du compte à 1000 milliards et la banque
Mbaye Dionne lui s’est émerveillé de la clarté de l’exposé et invite le Premier ministre à lever le voile sur l’identité du propriétaire du compte des 1000 milliards. “Je vous félicite sur votre volonté de transparence et de reddition des comptes. Vous aviez dit avoir découvert dans un compte d’un grand dignitaire la somme de 1000 milliards, nous voulons avoir plus d’informations sur la banque et l’identité de cette personne», demande-t-il. Le député maire de Ngoundiane se demande aussi si l’Etat compte organiser des élections anticipées des locales en 2025. Saluant la volonté de souveraineté dans tous les domaines, Mbaye Dionne soutient que sa préoccupation, c’est la souveraineté économique. «Au moment de choisir d’être transparent, vous avez pris de gros risques en poussant les partenaires techniques et financiers à suspendre le financement de l’économie sénégalaise. (…) Je propose qu’on revoie la souveraineté économique. La situation des ménages ne permet pas de mobiliser les ressources domestiques en monnaie locale pour financer le gap. Que ce soit les Sénégalais de l’intérieur que de l’extérieur. Il faut trouver les moyens de restaurer la confiance avec les partenaires, sinon l’année 2025 sera extrêmement difficile, au moment où le coût du dollar augmente», dit-il.
Abdou Mbow : «vous avez un rapport psychologique compliqué avec la vérité»
Abdou Mbow n’a pas raté le Premier ministre qu’il a tourné en dérision tout au long de son intervention. «Tout finit par arriver, il en a fallu du temps pour qu’enfin il daigne à l’attention de tous les Sénégalais nous donner sa feuille de route. Il n’avait pas le courage de faire sa Dpg face à la précédente Assemblée, préférant s’entourer de son clan, pensant qu’à présent il peut être à l’abri des questions», martèle l’opposant qui poursuit : «vous venez de nous infliger le résumé que vous aura concocté le cabinet Performance. Mais Monsieur le Premier ministre, la question est celle-ci : doit-on, peut-on vous croire ? Je pense que non», demande M. Mbow, qui accuse Ousmane Sonko d’avoir «un rapport psychologique compliqué avec la vérité». Abdou Mbow de tirer encore sur Sonko. «On sent une absence d’humilité dans vos propos, comme si le Sénégal vous attendait pour exister. C’est parce que vos prédécesseurs ont réalisé des choses que vous avez pu aller à l’école et devenir aujourd’hui Premier ministre. Vous avez pris le pari de conflictualiser les rapports politiques pour accéder au pouvoir. Aujourd’hui que les Sénégalais vous ont confié les clés de la maison, alors changez de fusil d’épaule. Montrez-vous digne de la confiance que les Sénégalais vous ont accordée», fulmine-t-il avant d’enchaîner : «arrêtez les discours populistes qui risquent de vous rattraper comme c’est le cas tous les jours». Abdou Mbow se demande enfin pourquoi le régime s’attaque-t-il injustement à Barthélemy Dias ? «Vous avez peur de quoi ?».
Pape Djibril Fall d’emboucher la même trompette. «Je vous informe que ce que vous aviez combattu en 2022 concernant la radiation de votre frère Barthélemy Dias est en train de se faire. Il y a aussi l’article 80 de la Constitution qui bat le record d’emprisonnement. Et à quand son extension aux chefs religieux ?», interroge-t-il.
Aïcha Touré, quant à elle, se félicite de la maturité de cette législature. «Il y a des propos tenus ici, s’ils étaient tenus deux ans en arrière, la réplique aurait été des injures et insultes. Bravo la majorité, c’est ça l’élégance parlementaire. Le jubbanti Assemblée nationale est en marche», assure-t-elle tout en plaidant pour une meilleure prise en charge des préoccupations de la diaspora.
Tafsir Thioye : «après 8 mois, nous avons entendu un discours moins chiffré que les précédents»
Tafsir Thioye fait noter que malgré les théories sur les changements systémiques, l’Etat demeurera l’Etat et il sera toujours l’Etat. Sur un autre registre, le député dit marquer son étonnement sur le fait que le Premier ministre n’a pas évoqué les aspects des réformes institutionnelles. Notamment sur la refondation de l’Etat, sur la création d’un poste de vice-président, sur le renforcement des pouvoirs du Pm, sur la révocation du président de la République en engageant sa responsabilité politique. Tous ces éléments qui nous ont tenus en haleine pendant des moments durant la campagne électorale et bien avant». Poursuivant, M. Thioye souligne : «après huit mois, nous avons entendu un discours moins chiffré que les précédents», renseigne-t-il avant de demander au Premier ministre s’il s’engage lui et ses ministres à venir à l’Assemblée comme le recommande le Règlement intérieur.
Aïssata Tall Sall : «abrogez la loi d’amnistie, mais après, faites face aux conséquences»
Me Aïssata Tall Sall a consacré sa première prise de parole à narguer Ousmane Sonko. «Enfin, vous voilà. Quand la 14e législature a voulu avoir le Premier ministre, malgré les dispositions de l'article 55 de la Constitution, malgré un engagement écrit et solennel de Son Excellence Monsieur le Président de la République, il n’a pas voulu comparaître», ironise-t-elle avant d’attirer l’attention du Premier ministre sur deux choses qui guettent le projet : «c'est la simplification que vous proposez aux Sénégalais. Il n'y a pas le méchant d'un côté et le bon de l'autre. Ensuite, l'autre danger, c'est le populisme». A sa deuxième prise de parole, l’ancien ministre de la Justice a donné son avis sur l’abrogation de la loi d’amnistie. «Je ne dis pas que vous ne pouvez pas l’abroger. Abrogez-la, mais quand vous l’aurez abrogée, faites face aux conséquences», dit-elle.
Amadou Ba N°2 : «la loi d’amnistie ne donne pas un droit absolu de non-poursuite»
Répondant à Abdou Mbow, Amadou Ba de Pastef assure que ce dernier a fait une erreur fatale de convertir 15 milliards en trois mois alors que c’est sur 9 mois. Le Fonsis est un fonds qui ne peut héberger un autre fonds, le Fonds intergénérationnel doit être rattaché à une institution constitutionnelle ou un ministère.
Par rapport à la loi d’amnistie, M. Ba assure à Aïssata Tall Sall qu’elle ne donne pas un droit absolu de non-poursuite. Pour lui, on peut prendre une loi interprétative sans annuler tous les effets de la loi
Me Tall : «vous n’avez jamais été d’accord avec la loi d’amnistie, j’en suis témoin»
Les coups contre Abdou Mbow continuent de plus belle. Me Abdoulaye Tall s’y met lui aussi en lui demandant si on ne lui a pas encore infligé assez de défaites ? Pour lui, les injustices au sein de la justice doivent être urgemment corrigées. «Il faut construire des prisons dignes de ce nom, accorder la grâce à un taux substantiel (...) Il faut moderniser et humaniser les lieux de détention», dit-il avant d’indiquer : «j’ajoute que Fulbert Sambou et Didier Badji n’ont pas été tués dans une manifestation, leur meurtre mérite d’être élucidé».
Ndèye Khady D. FALL & Baye Modou SARR