En République de Gambie, les anciens Junglers Malick Jatta, Omar Jallow et Amadou Badjie vont incessamment humer l’air de la liberté. Le ministère gambien de la Justice a, en effet, ordonné à l'armée de libérer «immédiatement» les trois Junglers, une unité paramilitaire sous ordres de l’ex dictateur Yahya Jammeh. Une décision incomprise : ces trois militaires de l’armée gambienne sont accusés d’avoir exécuté des dizaines d’Africains dont des Sénégalais.
Le ministère gambien de la Justice a demandé à l'armée de relâcher trois anciens membres de la milice secrète de l'ancien Président Yahya Jammeh. Malick Jatta, Omar Jallow et Amadou Badjie ont comparu devant la Commission vérité, réconciliation et réparations, le mois dernier, affirmant qu'ils avaient participé à l'assassinat de dizaines de personnes dont des Sénégalais, alors qu'ils faisaient partie de la troupe à succès de l'ancien Président Yahya Jammeh.
Les trois soldats sont en détention depuis leur arrestation par la police militaire en 2017. Mais, leur incarcération devrait bientôt prendre fin, après une lettre émanant du ministère de la Justice et signée par l’Avocat général, Cherno Marenah.
«Après la comparution et le témoignage devant la Commission vérité, réconciliation et réparations de Malick Jatta, Omar Jallow et Amadou Badjie, tous membres actifs de l'armée nationale gambienne, au cours de la semaine du 22 au 25 juillet 2019, l’Avocat général recommande que ces derniers soient immédiatement libérés de leur détention… en raison de leur coopération avec la commission concernant plusieurs incidents de violation des droits de l'homme et de violations commis sous le gouvernement précédent», peut-on lire sur la lettre.
Selon la lettre, cette décision vise à soumettre immédiatement les trois soldats à l'unité psycho-sociale de la Commission vérité, réconciliation et réparations. Ce afin qu'«ils s'engagent à servir de témoins à charge, au cas où ils seraient appelés à participer à tout procès à venir auquel la Gambie pourrait avoir un intérêt», ajoute la note, qui fait ainsi penser à un potentiel procès de l’ex Président Yahya Jammeh.
Aussi, la lettre recommande qu’une fois libérés, les soldats soient mis en congé administratif en attendant l'issue du processus de la Commission vérité, réconciliation et réparations. Interpellé par la presse, l’Avocat général Cherno Marenah n'a pas souhaité répondre aux questions des journalistes. Le porte-parole de l'armée gambienne, le major Lamin K Sanyang, a également fait de même, à propos de la lettre.
Le 23 Juillet dernier, les trois soldats ont révélé devant la Commission qu’une trentaine de migrants originaires du Ghana ont été exécutés sommairement par les Junglers, sur ordre de Yahya Jammeh.
Les meurtres, qui remontent à juillet 2005, concernent un groupe de 44 personnes composée de Ghanéens et de plusieurs Nigérians, des Sénégalais et des Togolais. Ces migrants ont été arrêtés sur une plage de Gambie alors qu’ils tentaient de se rendre en Europe. «Yahya Jammeh a ordonné l’exécution de ces ressortissants étrangers», présentés comme des «mercenaires», a déclaré devant la Commission vérité, réconciliation et réparations Omar Jallow.
Alors le Sénégal et les autres pays africains, dont les fils ont été sauvagement tués, ont-ils été mis au courant cette libération ? La décision de Banjul a-t-elle été prise de concert avec les autres pays ? tant de question sur lesquelles les autorités sénégalaises devront apporter des réponses. Après tout, ce sont des fils du Sénégal qui ont été abattus comme des bêtes sauvages.
Sidy Djimby NDAO