Cheikh Abdou Bara Dolli Mbacké a déclaré, hier à l’Assemblée, qu’il y a des députés qui fument du chanvre indien. Mieux, il a estimé que tout ministre de la Justice, procureur, juge et commissaire, doit d’abord faire la prison pour savoir les rigueurs carcérales, avant de condamner d’honnêtes citoyens.
Ismaïla Madior Fall a un nouveau nom. Il a été rebaptisé hier par Cheikh Abdou Mbacké Bara Dolli «Ismaïla Madior Tailleur Fall» (Imtf). Le député de Touba, Cheikh Abdou Mbacké Bara Dolli, qui ne cesse de surprendre depuis le début de la session ordinaire unique de l’Assemblée, s’est à nouveau illustré dans ses coups d’éclat. Fustigeant la loi Latif Guèye criminalisant la drogue au Sénégal, il a déclaré que ce sont les petits délinquants qui croupissent en prison pour 10 ans pour ce crime. Alors qu’au sommet de l’État, même au sein de l’Assemblée nationale, il y en a ceux qui usent du chanvre indien. «Cette loi doit être abrogée. Parce que des députés fumeurs de yamba sont ici, à l’Assemblée nationale», a-t-il fulminé, serein, tandis que des voix s’élèvent dans la salle. Des députés de la majorité présidentielle, qui ont pris la parole après, ont tenté d’étouffer ces déclarations. Mais lui n’en a cure. Manipulant à-tout-va, il ne répond pas aux contre-attaques.
«Avant d’être ministre de la Justice, il faut d’abord purger une peine de 6 mois de prison. Les procureurs, 4 mois. Les juges, 3 mois et les commissaires, 2 mois»
Et comme si cela ne suffisait pas, il embouche une autre trompette. Cette fois, ce sont les acteurs de la justice qui sont visés. En effet, estimant que d’honnêtes citoyens sont envoyés en prison pour un rien, il a proposé une recette toute simple pour mettre fin à cette capacité de condamner si vite. Le remède, il n’est pas allé loin pour le trouver. Dans sa ligne de mire, il appuie sur la gâchette. Excepté les greffiers, ils arrosent de flèches assassines tous les autres acteurs de la justice, à commencer par le garde des Sceaux. «Dans ce pays, avant d’être ministre de la Justice, il faut d’abord purger une peine de 6 mois de prison. Les procureurs, 4 mois. Les juges, 3 mois et les commissaires, 2 mois», a-t-il balancé. Pour lui, c’est de cette manière seulement que ces derniers, qui condamnent à longueur de journée, vont connaître les rigueurs carcérales auxquelles font face tous les jours les détenus. La salle se refroidit. Le regard des députés est évasif. Ismaïla Madior Fall prend note. Un mot lui est soufflé à l’oreille par un conseiller. Mais Bara Dolli continue de plus belle.
Albino MANTANE