A la veille de l’ouverture des classes, les syndicats du secteur éducatif prennent à témoin l’opinion publique, car un risque réel de perturbation plane sur l’année scolaire, selon eux. En effet, après les grèves répétées durant l’année scolaire 2017/2018, le gouvernement du Sénégal avait pris certains engagements visant à régler les revendications des enseignants. Hélas, après trois mois d’attente, même s’ils reconnaissent qu’il y a eu certaines avancées au niveau du ministère des Finances, les acteurs du secteur éducatif continuent de fustiger l’attitude du Premier ministre qui les fait tourner en bourrique depuis des mois avec des rencontres à n’en plus finir.
Les questions telles que les lenteurs administratives, le paiement des rappels ainsi que l’accord des crédits Dmc constituent toujours la pomme de discorde entre gouvernement et syndicalistes du secteur éducatif. Après leur énième rencontre avec le chef du gouvernement, il y a quelques jours, les enseignants disent être restés sur leur faim quant aux nombreuses promesses faites par le Premier ministre au cours de l’année scolaire passée. Ainsi, à la place de «ubi tay, jang tay», on pourrait avoir une rentrée bien mouvementée.
Abdou Faty Sg Sels/A : «nous appelons tout le corps enseignant à rejoindre les classes, mais nous restons vigilants»
Selon le secrétaire général du Sels/Authentique, il faut rester vigilant. «Nous avons rencontré le Premier ministre il y a quelques jours pour le monitoring, l’état des lieux de la situation, mais nous ne sommes pas tout à fait satisfaits. Même s’il faut reconnaître qu’il y a certaines avancées, comme au niveau du ministère des Finances, avec l’amélioration de la qualité des informations, il n’en demeure pas moins que la plupart de nos revendications sont restées sans réponse», affirme-t-il avant de lancer : «les lenteurs administratives, les crédits au logement appelés Dmc sont des questions qui nous tiennent à cœur, mais le gouvernement n’y a toujours pas apporté des solutions. Il nous a donné à nouveau rendez-vous au mois de novembre et nous espérons qu’avant cette rencontre, l’ensemble de nos revendications seront prises en charge par le gouvernement», déclare M. Faty. A l’en croire, la balle est dans le camp du gouvernement. «Nous leur accordons un mois après l’ouverture des classes pour avoir une ouverture paisible. Nous appelons ainsi tout le corps enseignant à rejoindre les classes sereinement. Nous restons quand même vigilants et prenons l’opinion publique à témoin, nous avons été assez patients avec le gouvernement, donc il est temps qu’il nous prenne au sérieux», clame-t-il.
Cheikh Alassane Sène (Snels) : «On risque d’avoir une rentrée mouvementée»
D’après le secrétaire général du Snels, c’est une situation bien trop regrettable. «Des accords ont été signés, alors le gouvernement ferait mieux de respecter ses engagements. Nous avons rencontré le Premier ministre, il y a quelques jours, mais nous sommes restés sur notre faim. Les lenteurs et lourdeurs administratives, les questions liées aux habitats sociaux et tant d’autres sont toujours d’actualité, même si nous reconnaissons qu’il y a eu des avancées au niveau du ministère des Finances. On risque une rentrée mouvementée si jamais le gouvernement ne respecte pas ses engagements», prévient M. Sène. Pour lui, même avec la rencontre prévue au mois de novembre, la menace d’une perturbation de l’année scolaire plane toujours. «Il y va de la crédibilité du Premier ministre, donc il ferait mieux de procéder au paiement des indemnités, régler la question des rappels pour les enseignants, idem pour les lenteurs administratives», soutient Cheikh Alassane Sène.
Oumar Waly Zoumarou (Grand Cadre) : «Il est clair que nous allons encore vers une confrontation avec le gouvernement»
Le secrétaire général du Grand Cadre n’a pas mâché ses mots, il pense que c’est toute la fonction publique qui est malade à cause de nos gouvernants qui ne tiennent pas parole. «Nous sommes au regret de constater que le gouvernement ne tient pas parole. Le Premier ministre nous a clairement montré que nos revendications ne sont pas une priorité pour le gouvernement. Il ne cesse de nous faire tourner en bourrique. Les lenteurs administratives demeurent plus que jamais le problème majeur des enseignants. Le paiement des rappels pour les enseignants, le crédit pour les logements, toutes ces demandes n’ont toujours pas été résolues et il continue de nous leurrer. Ils ont leur calendrier politique sur lequel aucune demande sociale ne prime», accuse-t-il. Avant de poursuivre: «il nous a certes donné à nouveau un rendez-vous pour le mois de novembre, mais nous sommes sûrs qu’il n’y aura aucune avancée. Maintenant, il est clair que nous allons vers une confrontation avec le gouvernement, ce qui aura comme conséquence une perturbation de l’année scolaire. C’est la fonction publique qui est malade, parce que nous avons affaire à des amateurs», dénonce Zoumarou.
Cheikh Mbow (coordonnateur de la Cosydep) : «les enseignants sont en train de lancer des alertes qu’il ne faudrait pas prendre à la légère»
Le coordonnateur de la Coalition pour une éducation de qualité pour tous (Cosydep) a abondé dans le même sens que les syndicalistes. «C’est plus une alerte qu’une menace. Après 4 mois de grève l’année dernière, des enseignements mériteraient d’être tirés afin que pareille situation ne se reproduise. Nous ne sommes plus à l’ère des revendications, des engagements ont été signés, il est temps qu’ils soient respectés», a laissé entendre Cheikh Mbow.
Pour ce dernier, c’est le Premier ministre qui doit veiller à ce que les réunions de monitoring se déroulent à date échue. «Nous lançons un appel au Premier ministre pour que la mise en œuvre des engagements qu’il a pris soit effective afin d’éviter des perturbations de l’année scolaire», soutient M. Mbow.
Ndèye Khady D. FALL