M. H. Guèye est dans de sales draps. Plusieurs jeunes, qui l’accusent d’avoir abusé d’eux pendant qu’il leur enseignait le Coran, dans les années 90, ont porté plainte contre lui lundi dernier. Le présumé pédophile a été arrêté, déféré et placé sous mandat de dépôt depuis le jeudi dernier. Mais ses parents, membres d’une grande famille religieuse, sont en train de remuer ciel et terre pour le tirer d’affaire. Même si une des victimes, qui a témoigné à travers un enregistrement WhatsApp qui nous est parvenu, martèle qu’ils vont aller jusqu’au bout de leur plainte, parce qu’ils ne veulent pas que d’autres subissent ce qu’ils ont subi.
C’est à croire que le pays marche sur la tête maintenant. Après le maniaque sexuel Maodo Wellé qui a avoué avoir eu des rapports avec 11 gamins de moins de 15 ans, et qui a été condamné hier à 10 ans de prison, une autre affaire d’actes contre-nature, plus scandaleuse encore, impliquant un maître coranique, a éclaté à Ouakam. Cela à la suite d’une plainte déposée par plusieurs victimes lundi dernier au commissariat central de Dakar. Le mis en cause, du nom de M. H. Guèye, a été arrêté, déféré au parquet et envoyé à Rebeuss. Une cinquantaine d’enfants seraient victimes du bourreau. Sa famille est en train de faire tout pour le tirer d’affaire, en essayant de convaincre les victimes de retirer leurs plaintes.
«Non seulement il abusait des enfants, mais il leur imposait aussi de coucher entre eux en sa présence»
Dans un enregistrement WhatsApp, l’une des victimes fait un témoignage glaçant sur ce que leur bourreau leur faisait subir. «Tous les jeunes qui ont appris le Coran ici, c’est grâce à lui. (…). Il offrait des portables à certains, des vélos à d’autres.... Pour certains, ils payaient même leur scolarité. Il fait beaucoup de bonnes actions envers les gosses. Mais, en réalité, il se cachait quelque chose derrière toutes ces bonnes actions. Il s’adonnait en réalité à l’homosexualité, à des actes contre-nature sur les enfants. Il couchait avec des gosses de 11 ans, qui faisaient le Cm1 en 2004. Ensuite, il leur intimait l’ordre de ne rien dire. Il vous faisait prendre des bains mystiques, disant que c’était pour aider à réussir dans les études, mais en réalité, c’était pour vous empêcher de raconter les choses qu’il vous faisait. Il a fait ça pendant des années», narre la victime. Qui ajoute : «non seulement il abusait des enfants, mais il les forçait à coucher entre eux et en sa présence. Il demandait à quelqu’un de se coucher, il le lubrifiait lui-même, et demandait à un autre de coucher avec lui. Et au moment de l’éjaculation, il recueillait vite sperme. Il expliquait qu’il en avait besoin pour préparer des bains mystiques pour la chance et autre».
«Son grand-frère, qui est un imam, est venu nous voir, pour nous prier de retirer notre plainte»
Après toutes ces années passées et les affres vécues entre les bras de leur bourreau, la victime note qu’aujourd’hui, ils sont «de plus en plus conscients des faits». C’est ainsi qu’ils ont décidé de porter plainte. «On a discuté avec le commissaire et on lui a tout raconté. Plusieurs victimes sont venues témoigner. Et on n’a appelé que ceux que nous connaissons. Il y a ceux que nous ne connaissons pas encore et ceux que nous connaissons et qui sont en voyage», souligne ce membre du collectif de victimes qui a porté plainte. Mais la pression est forte sur eux et leurs familles. Et pour cause. «Hier, son grand-frère, qui est un imam, est venu nous voir, pour nous prier de retirer notre plainte. Il nous a dit qu’il sait que les faits sont avérés. Et qu’il a appris que depuis 1999, des collègues maîtres coraniques étaient au courant des faits reprochés à son frère, mais lui n’a jamais été au courant. Et que c’est hier (jeudi) qu’il l’a su pour la première fois…», raconte-t-il. Cette victime s’inquiète tout de même du fait de l’influence de la famille du bourreau. «Il (le grand-frère) nous a dit qu’il connait le procureur et que son jeune frère a été arrêté une première fois. Des gosses avaient volé 10 millions et il leur a demandé de lui donner 4 millions, à charge pour lui de faire en sorte que leur père ne parle pas de l’argent. Mais l’affaire a éclaté et il a été arrêté. Seulement, sa famille étant puissante, il a été relâché».
«Nous ne sommes pas près d’abandonner. Parce que nous ne voulons pas qu’il réédite ça ailleurs»
Soulignant que la famille du mis en cause est en train de faire tout pour le tirer d’affaire, la victime note que lui et ses camarades ne comptent pas lâcher l’affaire. «Ils veulent que nous retirions notre plainte, pour qu’ils puissent aller demander clémence auprès du procureur. Mais nous ne sommes pas près d’abandonner. Parce que nous ne voulons pas qu’il réédite ça ailleurs. Nous on l’a déjà vécu, nous ne voulons pas que d’autres vivent cela», clame-t-il.
Mbaye THIANDOUM