L'affaire des faux billets de banque incriminant le lead-vocal du Raam Daan, Thione Seck et son acolyte Alaye Djiteye, a été appelée pour la seconde fois devant le juge de la Cour d'appel de Dakar. Si la première fois elle a été renvoyée pour être évoquée dans le fond, l'un des avocats de Thione a formulé un pourvoi en cassation, devant la Cour suprême. Ce faisant, les conseils de la défense avaient joint au dossier un document attestant qu’ils ont fait un pourvoi en cassation. Ainsi, hier, devant le juge d'appel, les avocats de la défense ont demandé un sursis à statuer en attendant que la Cour suprême rende sa décision. «Il faudrait attendre jusqu'à ce que la Cour suprême statue», a dit Me Aliou Cissé, avant que Me Bamba Cissé ne révèle qu'il n'a pas été cité dans cette affaire.
L'Avocat général laisse éclater sa colère et refuse le sursis à statuer
Niet catégorique de l'Avocat général, qui tenait coûte que coûte que l'affaire soit jugée. «Me Bamba Cissé a demandé le renvoi pour mieux préparer sa défense et il vient de dire qu'il est constitué dans cette affaire depuis le début. Alors qu'il n y a rien de nouveau. Il connaît parfaitement le dossier. Je demande de rejeter cette exception. Vous avez le droit d'assurer votre défense et moi le rôle de la société. Vous êtes là ce matin et vous dites ‘’citez-moi’’ ! Vous êtes un acteur judiciaire. Pourquoi renvoyer alors que toutes les parties sont là et bien représentées ? La demande n'est pas sérieuse. Ils savent de bout en bout ce qui est dit dans cette affaire. Et avec les yeux fermés, ils peuvent tous vous réciter ce qu'il y a dans le dossier», a tonné le Procureur général.
Me Ousmane Sèye au Procureur général : «nous n’avons pas besoin de vos précisions»
N’ayant pas sa langue dans sa poche, Me Ousmane Sèye de rétorquer : «on doit citer les conseillers textuellement. Nous ne sommes pas d'accord. Nous n'avons pas l'arrêt qui a été rendu. Nous sommes la défense. L'arrêt a été rendu le 13 janvier. J’ai fait des démarches et je n'ai pas encore l'arrêt. Je suis allé auprès du greffe. Nous n'avons pas besoin de vos précisions», précise-t-il.
Le juge Chimère Diouf : «Je renvoie l'affaire au 23 mars pour plaidoiries. Je ne vous citerai pas. Si vous ne vous présentez pas, l'affaire sera retenue et jugée»
Mais, ils n’ont pas été suivis par le juge Chimère Diouf qui, lors de ses observations, a fermement dit aux avocats de la défense qu'il compte juger l'affaire le 30 mars prochain, même si aucun d'eux n'a été cité. «La décision a été rendue le 13 janvier. Une semaine après, l'arrêt était disponible. Il faut que les gens se comprennent. Nous n'avons aucun souci de renvoi. Pour une demande de renvoi, cela ne mérite pas 30 minutes de débat. Parfois, avec la manière dont les choses se présentent, nous sommes obligés de répondre. Nous allons répliquer. Nous avons reçu beaucoup de coups. Nous sommes des compléments pour faire avancer le droit. Le débat judiciaire, c'est ici. Nous ne fonctionnons pas sur des urgences. Je renvoie l'affaire. Je ne vous citerai pas. Si vous ne vous présentez pas, l'affaire sera retenue et jugée. On renvoie pour le 23 mars pour plaidoirie», a déclaré le juge.
Thione et la Bceao présents, Alaye Djité toujours absent
Ainsi, la Cour a rejeté le sursis à statuer qu'avaient évoqué les conseils de la défense avant de renvoyer l'affaire pour plaidoirie au 23 mars prochain. Il est à noter que le prévenu Thione Seck, les avocats de la Bceao qui sont constitués dans cette affaire étaient présents à l'audience, excepté Alaye Djiteye qui a fait faux bond.
ME OUSMANE SEYE
«Aujourd'hui, Thione Seck sera privé d'une voie de recours par la Cour d'appel directement»
«Nous avions d'abord demandé le sursis parce que nous avions estimé que la Cour d'appel va statuer sur la forme. C'est-à-dire sur les nullités et n'a pas le droit d'évoquer le fond, parce que le premier juge n'a pas statué sur le fond. Malheureusement, la Cour d'appel a décidé d'amener une partie du procès-verbal pour renvoyer cette affaire au 23 mars pour plaidoiries. Aujourd'hui, Thione Seck sera privé d'une voie de recours par la Cour d'appel directement. Il y a une violation flagrante des droits de la défense, parce que la Cour d'appel est une juridiction de second degré. Il faut que vous soyez jugé au fond pour qu'en appel, l'on puisse faire un recours. Et si vous n'êtes pas jugé en appel sur les faits, la Cour d'appel n'a pas le droit directement d'évoquer l'affaire. Si elle le fait, elle vous prive d'un droit de recours et c'est une violation des droits de la défense. Le deuxième est que nous avons fait un pourvoi en cassation contre l'arrêt de la Cour d'appel et nous avions demandé, pour une bonne administration de la justice, d'attendre la décision de la Cour suprême sur le pourvoi en cassation. Malheureusement, la Cour ne nous a pas rendu une décision sur notre demande de sursis. Elle nous a rendu une décision orale, donc nous ne pouvons pas faire un pourvoi en cassation puisque, pour ce faire, il faut une décision écrite. J'ai demandé au président de la Cour de nous rendre une décision pour que nous puissions saisir la Cour suprême de droit en cassation mais cela n'a pas été fait. Après, notre deuxième demande était de renvoyer cette affaire, parce que je n'ai pas encore l'arrêt. L'affaire vient pour la première fois devant la Cour et nous avons droit à trois renvois ; donc, il était normal de renvoyer cette affaire. Et la Cour a été sensible à notre demande».
Fatou D. DIONE