Les Thiantacounes, du moins beaucoup d’entre eux, ne veulent pas de Serigne Saliou Thione comme remplaçant de son père à la tête du mouvement religieux. Et ils le lui ont fait savoir vertement, hier, lors de la cérémonie de deuil, à Médinatoul Salam. Les contestataires se rangent derrière Sokhna Aïda Diallo, qui, pour eux, a été choisie par le Cheikh lui-même, pour lui succéder.
C’est parti pour la querelle des chefs au sein des Thiantacounes, suite au rappel à Dieu de leur leader historique, Cheikh Béthio Thioune. Et certains n’ont même pas attendu qu’il soit porté en terre, pour afficher leur choix en ce qui concerne le remplaçant du défunt à la tête du mouvement religieux. Et c’est le fils ainé du Cheikh, Serigne Saliou Thioune, qui a fait hier l’amère expérience des luttes de positionnement qui se profilent.
«Le Cheikh a été très clair. Il nous avait demandé de suivre Sokhna Aïda Diallo»
Alors qu’en tant qu’aîné, il dirigeait la cérémonie de deuil, un talibé ne s’est pas privé de l’apostropher, pour lui nier toute légitimité pour diriger les talibés de son père. Le protestataire affirme tout de go qu’ils ne reconnaîtront que Sokhna Aïdara Diallo, une des épouses du Cheikh, comme guide, conformément à la volonté de leur défunt leader. «Nous ne sommes pas d'accord sur votre manière d’organiser la cérémonie (de deuil). Vous ne devez pas nous diriger», lâche-t-il. Et d’ajouter : «le Cheikh a été très clair. Il nous avait demandé de suivre Sokhna Aïda Diallo». Et le contestataire était loin d’être isolé dans sa position. Beaucoup de ses condisciples se sont rangés de son côté. Ce qui a créé une certaine confusion sur les lieux.
Serigne Saliou Thioune : «C’est mon père qui est décidé…Je ne prétends pas à vous diriger»
Mais Serigne Saliou Thioune a tenu à cracher ses vérités aux contestataires, en leur rappelant qu’il agit en qualité de fils aîné de Béthio, comme cela se fait en de pareilles circonstances. Et qu’il n’est nullement venu mettre la main sur les talibés de son père. «Je ne suis pas venu, ici, pour vous diriger. Si je suis présent à cette cérémonie, c'est parce que c'est mon père qui est décédé. Donc, c'est normal que je sois là, mais je ne prétends pas à vous diriger», assène-t-il. Pour lui, cette réaction de certains talibés est d’autant plus intolérable, qu’ils doivent tous «respecter la mémoire du défunt en ayant un bon comportement». Dès lors, il met en garde les récalcitrants. «Je ne vais plus accepter que de telles choses se reproduisent», martèle-t-il.
Sokhna Aïda Diallo, au cœur du «système» thiantacoune
Hier, 24h après le décès de leur leader, les Thiantacounes se sont rendus en masse à Médinatoul Salam (Mbour), son fief, où leur avait donné rendez-vous la famille, notamment Serigne Saliou Thioune. Sur place étaient aussi présentes, deux de ses épouses, Déthié Pène et Sokhna Aïda Diallo. Cette dernière, la plus célèbre, a les faveurs de beaucoup de talibés. Décrite comme extrêmement ambitieuse, elle s’est fait presque incontournable auprès du Cheikh, ces dernières années. Connaissant très bien le «système» thiantacoune, elle a su tisser un véritable courant de sympathie et de solidarité autour d’elle. Et ce n’est pas pour rien que son défunt mari l’avait élevée au grade de «Cheikh», soulevant une grosse polémique à l’époque. Récemment, on l’a vue comme témoin au procès de son mari, qu’elle a défendu bec et ongles.
Mbaye THIANDOUM