Après le show servi par les différents protagonistes dans l’affaire du fameux audio qui faisait les choux gras de la presse entre Mansour Faye et Ousmane Sonko, publié par Yakham Mbaye, place aux analystes politiques. Ibou Sané et Ibrahima Bakhoum décortiquent les postures des uns et des autres.
Ibou Sané, enseignant à l’université, n’est pas allé par quatre chemins. A l’en croire, ce début est inutile, il est de bas niveau. «Ce n’est pas bon pour le citoyen lambda. Ce n’est pas bon en démocratie. La démocratie, c’est des idées. On ne retient que les idées, mais pas les coups de poing que les gens s’envoient. Il faut que les gens arrêtent de parler d’autre chose parce que c’est le pays qui est sali par les hommes politiques». Une analyse partagée par Ibrahima Bakhoum, journaliste formateur. «C’est des coups bas qui ne grandissent pas les acteurs d’où qu’ils viennent. La démocratie n’y gagne absolument rien. Les hommes politiques doivent avoir un autre niveau d’élévation, avoir un autre comportement. Que ce soit le pouvoir ou l’opposition, si l’homme politique ne peut pas avoir un niveau au-dessus de la moyenne nationale, du point de vue du comportement, du point de vue de la confiance, là c’est le peuple sénégalais qui perd et le gagnant, je ne le connais pas», fait-il savoir.
Poursuivant, M. Bakhoum précise que «la publication de cet audio ne grandit personne». D’ailleurs, regrette le comportement de la presse et rappelle aux médias les éléments élémentaires qui régissent le métier. «C’est la presse qui devrait encore revoir ses propres pratiques. En matière de déontologie, on vous dit que vous n’avez pas le droit de porter le combat d’autres personnes. Si un homme politique est attaqué, il devra répondre dans le média qui a diffusé les attaques. Un médium n’a pas à s’ouvrir à un autre qui est attaqué dans un autre média. Si la presse se met à diffuser ce genre de choses, à aplatir le niveau de discussion politique, le niveau de conscientisation politique, elle est en train de rendre un mauvais service à la démocratie. Il faut que les journalistes apprennent à ne pas diffuser ce genre de choses».
Ibou Sané, quant à lui, demande aux protagonistes d’avoir de la hauteur et de s’investir dans le vrai débat de la démocratie. Car, selon lui, en s’attardant sur ce débat, c’est la démocratie qui est bafouée et agressée. Conséquence, c’est l’image de marque du pays qui est ternie. «Ils n’ont qu’à proposer des programmes et des projets de société, construire la démocratie autour de valeurs, ne pas s’attarder sur des invectives. Comment sortir le Sénégal de cette situation ? C’est seulement ce qui est important pour le peuple. Personne n’y gagne. C’est la démocratie qui est salie. Il faut avoir la posture d’homme d’Etat. C’est l’image de marque du pays qui est ternie», fait-il savoir.
Sur la publication de l’audio, Ibrahima Bakhoum est amer. «C’est la pratique qui est haïssable. Je ne vois pas à quoi servirait la confiance si chacun est capable de donner un jour un coup dans le dos en disant seulement qu’il défend une position politique. Le plus grave, c’est l’intention d’enregistrer. Où est l’honnêteté ? Où est l’éthique ? Qui est-ce qui a de la valeur ? L’intention n’est pas bonne. Elle est haïssable».
Ibou Sané : «Ousmane Sonko verse toujours dans des polémiques inutiles, il ternit son image de jour en jour»
Pour Ibou Sané, Ousmane Sonko verse toujours dans des polémiques inutiles et ternit ainsi son image de jour en jour. Il estime que le leader de Pastef doit prendre de la hauteur et ne pas répondre à tout bout de champ aux invectives de ses adversaires. «Le leader de Pastef aime bien ces débats. Pour quelqu’un qui est arrivé 3ème à la présidentielle, il doit prendre de la hauteur et se construire une autre image. Il risque d’être très petit et ce n’est pas bon pour lui et pour son image. Il doit être au-dessus de la mêlée. C’est un piège contre lui parce qu’il risque de tomber. C’est lui qui crée ses propres pièges parce qu’il aime la polémique. Il doit avoir une autre posture, une autre vision de la politique. Il se dit être antisystème. Mais là, il est en train de tomber dans le système. Il ne doit pas accepter de tomber très bas avec ses adversaires».
Baye Modou SARR