Quelque 10 mois après son placement sous mandat de dépôt, Tahirou Sarr a été auditionné sur le fond par le juge d’instruction du Pool judiciaire financier. Zen et concentré comme à son habitude, l’homme d’affaires, qui a débarqué à Sacré-Cœur Pyrotechnie avec une pile de documents en compagnie de ses chevronnés avocats, a répondu point par point à toutes les questions, ‘’preuves à l’appui’’. Revenant sur ses activités, nos sources révèlent que Tahirou Sarr, homme de ‘’daara’’ qu’il a quitté à l’âge de 13 ans, s’en est remis totalement à Dieu. Nos informateurs affirment que le patron de Sofico est revenu sur les emplois qu’il a créés, l’occupation de ses terrains par des dizaines de milliers de familles, les fonds qu’il lève pour le compte de l’Etat ‘’sans prendre le moindre franc en guise d’intérêts’’, mais aussi ses ‘’interventions’’ pour se substituer aux pouvoirs publics pour les salaires, les bourses… Jurant que toute sa fortune a une origine licite, Tahirou Sarr a lâché : «un jour, la vérité éclatera…».
Retour sur l’audition de Tahirou Sarr le 17 décembre dernier. L’homme d’affaires, un sac rempli de documents à la main, a fait face au président du Collège des juges d’instruction près le Pool judiciaire financier, en présence du procureur Ibrahima Faye. Devant ses avocats Seydou Diagne, Boubacar Wade, Boubacar Koïta, Papa Leyti Ndiaye et Malick Fall (seul Me Papa Aly Diagne était absent), Tahirou Sarr a répondu pendant près de 3h aux questions des avocats et magistrats. D’emblée, informent nos sources, l’homme d’affaires, qui a fait des études coraniques jusqu’à l’âge de 13 ans, a rappelé qu’il a créé sa première société, Chicago Sports, spécialisée dans l’import-export, en 1992. Les autres sociétés sont venues bien après et il évolue principalement dans le commerce, l’intermédiation et les finances. Et en l’état actuel de ses structures, il a quelque 800 emplois directs et entre 1800 et 1900 emplois indirects.
Lors de l’audition, beaucoup de questions ont tourné autour des paiements reçus de la part de l’Etat. En réponse pour chaque cas, Tahirou Sarr a donné des preuves tangibles des raisons des paiements en disant clairement que tous les paiements sont justifiés par des décisions de justice.
«Je lève des fonds pour l’Etat mais je ne prends pas d’intérêts»
Parmi ses domaines d’intervention, Tahirou Sarr a appris aux juges qu’il fait des rachats de créances, qu’il lui arrive d’aider l’Etat pour le paiement des bourses, le paiement des salaires, mais aussi des opérations extérieurs (Opex) de l’armée. Dans la même veine, il a fait une révélation de taille lors de l’audition. Selon lui, pour éviter le report de la présidentielle de mars 2024, qui a porté Bassirou Diomaye Faye à la tête de la magistrature suprême, il fallait doter le commandement territorial de véhicules. Et puisque cela n’était pas budgétisé, Tahirou Sarr a révélé l’avoir préfinancé entièrement sur fonds propres. Ce, a-t-il dit, avec les prix les plus bas du marché.
Tahirou Sarr a aussi informé qu’il lève des fonds pour l’Etat. Mais pour cette activité, précise l’homme d’affaires originaire de Oréfondé, il ne perçoit pas d’intérêts. Dans ce cadre, il demande juste des avances. Pour les cessions de créances, Tahirou Sarr d’indiquer que peu de personnes le font dans le monde. Il a même révélé, selon nos sources, qu’il était même impliqué dans la procédure d’expropriation des fermiers blancs au Mozambique. Autre preuve qu’il n’en est pas à son coup d’essai, Tahirou Sarr a révélé qu’en 2003, il a gagné, lors d’une opération au Tchad, 40 milliards de francs Cfa.
«Tout franc trouvé sur mes comptes a une origine licite»
Sur certains marchés classés top secret, révèlent nos sources, Tahirou Sarr a répondu que s’agissant des forces de défense et de sécurité, il livre un lot supérieur à celui commandé. «J’ai offert à la police une citerne gasoil et une remorque», a-t-il dit aux juges.
Tahirou Sarr a aussi dégagé complètement en touche le traitement de faveur dont il bénéficierait. «Je n’ai jamais bénéficié de traitement de faveur. J’ai gagné ma fortune à la sueur de mon front. Tout l’argent trouvé sur mes comptes a une origine licite», a-t-il assuré avançant qu’il n’a jamais investi le plus petit franc dans une activité illicite. Réitérant son refus systématique de percevoir le moindre franc comme commission, l’homme d’affaires de rappeler que toutes les créances, il les achète sur décision de justice. D’ailleurs, il a indiqué que cette procédure lui a porté un très grand préjudice.
«40.000 familles à Dakar ville et ailleurs occupent mes terrains sans droit»
Le patron de Sofico, malgré les milliards dont il est accusé, a dit, lors de l’audition, éprouvé beaucoup de difficultés. Il a, selon nos sources, été le premier homme d’affaires à avoir été auditionné devant une commission d'enquête parlementaire (ndlr : affaire des 94 milliards). Ce, pendant près de 3h.
Mais la révélation la plus spectaculaire faite par le pensionnaire du Cap Manuel concerne l’occupation de ses terrains par nombre de familles. En effet, Tahirou Sarr a révélé qu’entre Dakar ville, Dakar banlieue, le département de Keur Massar et d’autres endroits, beaucoup de familles occupent ses titres fonciers sans droits ni titres. Il a cité environ 40.000 familles qui vivent dans ses terrains sur lesquels l’Etat perçoit des impôts. Seulement, ne voulant créer aucun trouble, il n’a entamé aucune procédure pour les en expulser.
«Je suis un travailleur acharné et l'Etat reste mon partenaire »
Toujours dans les ‘’sacrifices’’ qu’il consent pour la paix, il dit avoir beaucoup investi pour créer des emplois, diminuer le chômage. Tahirou Sarr d’indiquer qu’un jour, la vérité éclatera. Le patron de la société Sofico a dit n’être en rien coupable des faits qui lui sont reprochés. «Je suis un travailleur acharné et l'Etat reste mon partenaire», a-t-il conclu, informent nos interlocuteurs.
Cheikh Oumar NDAW












