
L’un des reproches des nouveaux gouvernants au régime déchu, c’est le niveau d’endettement auquel il a inscrit le pays, mais aussi l’utilisation de ces prêts. Mais, si l’on en croit Thierno Alassane Sall, il n’y a pas une très grande différence dans la façon de faire des deux régimes dans ce domaine. C’est pourquoi il a interpellé le ministre des Finances et du Budget par une question orale sur les «70 émissions de titres de créance sur le marché obligataire de l’Uemoa» en une année seulement.
Exerçant sa mission de parlementaire, Thierno Alassane Sall demande à Cheikh Diba, ministre des Finances et du Budget, de s’expliquer sur quelques questions relatives au niveau d’endettement du Sénégal depuis l’arrivée du nouveau régime. A travers une question orale adressée au dit ministre, le député fait noter que «du 3 mai 2024 au 30 mai 2025, le Gouvernement du Sénégal a procédé à 70 émissions de titres de créance sur le marché obligataire de l’Uemoa, mobilisant un total de 1694 milliards de francs Cfa, d’après les données officielles publiées par l’Agence Umoa-Titres, chargée d’accompagner le Trésor public dans la mobilisation de ressources financières sur les marchés régionaux». Selon le leader de la République des Valeurs, dans ces opérations, deux types d’instruments ont été utilisés : «les Bons assimilables du Trésor (Bat), titres de créance à court terme, émis 31 fois ; et les Obligations assimilables du Trésor (Oat), titres à moyen et long terme, émis 39 fois».
960 milliards levés depuis le début de l’année
D’après Thierno Alassane Sall, cette prédominance des Oat traduit une orientation privilégiée vers le financement du fonctionnement courant de l’État, au détriment des investissements structurants.
«Plus préoccupant encore, l’année 2025 marque une accélération du recours à l’endettement. Entre le 1er janvier et le 30 mai, le Gouvernement a réalisé 35 émissions, soit autant que durant les huit mois précédents (mai à décembre 2024). Les montants levés sur cette période atteignent déjà 960 milliards de francs Cfa, surpassant les 734 milliards mobilisés en 2024. Le seul mois de mai 2025 a enregistré une levée record de 499,9 milliards de francs Cfa», dit-il.
Autre fait notable, souligne le député, «sur ces 35 émissions en 2025, 24 ont pris la forme d’Oat, révélant une tendance persistante à recourir à la dette à moyen ou long terme pour couvrir des dépenses de fonctionnement, plutôt que pour financer des projets d’investissement à fort impact économique».
Ce qui inquiète le plus M. Sall, c’est que malgré l’ampleur des fonds mobilisés, ni les citoyens ni les parlementaires ne disposent à ce jour d’informations précises sur leur affectation effective. «L’absence de publication des rapports d’exécution budgétaire du quatrième trimestre 2024 et du premier trimestre 2025 entretient un climat d’opacité contraire aux principes de transparence et de bonne gouvernance. (…) ces émissions se caractérisent par des taux d’intérêt élevés et des maturités souvent courtes, ce qui accroît le risque de refinancement et aggrave la vulnérabilité budgétaire du pays à moyen terme, dans un contexte déjà marqué par un endettement public préoccupant», renseigne-t-il.
Thierno Alassane Sall veut surtout connaître dabord «la situation de l’endettement public et (les) caractéristiques des émissions», mais aussi «le niveau actuel de l’endettement public, tant intérieur qu’extérieur, depuis le 1er janvier 2024, ventilé par type d’emprunt et par créancier».
Il demande ensuite au ministre des Finances de s’expliquer sur le nombre d’émissions obligataires qui ont été réalisées sur cette période et leurs caractéristiques.
Des emprunts à taux élevés et à maturités courtes
Pour ce qui est de la justification et l’utilisation de ces fonds levés, le parlementaire s’interroge sur les «critères économiques ou stratégiques ayant conduit au recours répété à des emprunts à taux élevés et à maturités courtes, alors que des financements concessionnels semblent disponibles à des conditions plus avantageuses, mais aussi leur utilisations concrètes». Poursuivant, le leader de RV se demande si les fonds levés «ont permis de financer des investissements productifs, de couvrir des déficits budgétaires courants ou de refinancer des dettes arrivées à échéance» ?
Et en dernier lieu, le député invite Cheikh Diba à clarifier les «mesures concrètes que le Gouvernement prévoit pour freiner la dynamique de l’endettement, en garantir la soutenabilité, améliorer la gouvernance de la dette publique et assurer la publication régulière, complète et dans les délais des documents budgétaires, notamment les rapports d’exécution trimestriels».
Nd. Kh. D. F