La décision de la Cour suprême a été fortement saluée par les professionnels du secteur, qui dénoncent depuis plus d’un an une dérive autoritaire et une volonté «d’exterminer la presse privée».
Le camouflet du ministère de la Communication devant la Cour suprême fait sauter de joie les patrons de presse réunis autour du Conseil des éditeurs et diffuseurs de presse au Sénégal (Cdeps). Pour les patrons de presse, les arrêtés pris par le ministre Alioune Sall relevaient d’une «pratique administrative arbitraire» et traduisaient une volonté manifeste du ministre d’imposer des mécanismes de contrôle illégaux sur le secteur médiatique. L’annulation prononcée par la Cour suprême rend sans effet toutes les décisions prises dans ce cadre à savoir «la plateforme elle-même» ; «la Commission de validation»; «et même les procédures d’examen des dossiers au niveau du Fonds d’appui et de développement de la presse (Fadp)»/
Le Cdeps profite de ce revers judiciaire infligé au ministère pour s’interroger publiquement sur la légalité du déblocage de fonds publics au profit de certaines institutions du secteur, notamment le Cored, la Commission nationale de la carte de presse et la Maison de la presse.
L’organisation parle d’un risque de « détournement d’objectifs » et d’une distribution de ressources « sans aucune base légale ».
Un nouveau désaveu après une première suspension
Ce n’est pas la première fois que la justice freine les initiatives du ministre. Il y a quelques mois, la Cour suprême avait déjà suspendu l’arrêté interdisant la parution et la diffusion de 381 médias, une mesure jugée disproportionnée et attentatoire à la liberté de la presse.
Pour le Cdeps, cette succession de décisions judiciaires révèle une ligne de conduite inquiétante. Depuis l’arrivée au pouvoir de la nouvelle majorité, il y a «21 mois, le ministre de la Communication n’a eu pour seule volonté que d’exterminer la presse privée», accuse le communiqué signé par Mamadou Ibra Kane, président de l’organisation.
«Une répression féroce» dénoncée
Dans son communiqué, le Cdeps dresse un tableau sombre de la situation des médias privés : asphyxie fiscale, rupture unilatérale des contrats publicitaires de l’État, confiscation de bouquets télévisuels, coupures de signal, blocage de la subvention aux médias depuis deux ans, exclusion systématique des journalistes privés lors des manifestations publiques ou des délégations officielles ou encore promotion d’une forme d’«État-parti» médiatique.
Une situation qui, selon l’organisation, a déjà provoqué la perte de milliers d’emplois, des familles plongées dans la pauvreté, des ménages fragilisés et des enfants privés de couverture sociale.
Un rappel du rôle du juge dans l’État de droit
Malgré ce contexte, le Cdeps se félicite de la position adoptée par la plus haute juridiction administrative du pays, estimant que la Cour suprême «vient incontestablement de renforcer notre État de droit». Les cours et tribunaux sénégalais, ajoute-t-il, restent «le meilleur rempart contre toutes les dérives autoritaires».
Sidy Djimby NDAO












