Comme à son habitude, le Premier ministre s’est longuement épanché sur les questions d’audit et de rapport, pour montrer encore une fois aux Sénégalais sa bonne foi et son engagement pour la bonne gouvernance. Sans s’attaquer ouvertement au Président Bassirou Diomaye Faye, Ousmane Sonko a subtilement dégagé toutes ses responsabilités dans les lenteurs notées dans la reddition des comptes, l’exécution de certains rapports etc. Mais la déclaration de trop devant l’hémicycle reste sa position face au coup d’Etat en Guinée-Bissau, malgré la position prise par le Président Bassirou Diomaye Faye.
La députée Ndèye Marie Sané s’est intéressée aux réformes constitutionnelles arrêtées lors du dernier dialogue politique : « dans un contexte où les citoyens exigent plus de reddition des comptes et de justice, où les partenaires techniques et financiers appellent à une transparence accrue, les Sénégalais veulent savoir ce qui justifie les lenteurs dans la reddition des comptes. Les rapports des corps de contrôle sont-ils correctement traités et exécutés par l’exécutif ? Confirmez-vous une réelle tentative de l’exécutif de mettre sous le coude un rapport de l’Ige portant vérification du Cese, qui aurait épinglé l’ancienne présidente ?, interroge-t-elle.
Me Abdoulaye Tall interpelle lui le Premier ministre sur la situation en Guinée-Bissau. « Après des élections présidentielles et législatives couplées, on a annoncé un coup d’Etat et le président sortant a été accueilli au Sénégal. Dites-nous donc quel est le plan de l’Etat du Sénégal pour que l’ordre constitutionnel revienne à Bissau », demande le président de la commission des lois.
Et Tafsir Thioye a montré son intérêt pour la question de la dette : « cette dette dont on parle n’est pas celui de l’ancien régime seulement. Le nouveau régime y a sa part, parce qu’en décembre 2024, le Président Bassirou Diomaye Faye était déjà président de la République », déclare le député non inscrit qui revient à la charge : « je demeure convaincu que le Sénégal s’est trompé sur sa dette extérieure qu’on assimile à une dette cachée ». Tafsir Thioye d’inviter ensuite le Premier ministre à désigner une bonne fois pour toutes l’identité du propriétaire du compte des 1000 milliards dont il parle à chacune de ses sorties : « où se trouve le compte, qui en est le propriétaire et quelle est la source qui vous a permis de découvrir ce fameux compte ? »
En réponse, Cheikh Diba, après avoir reconnu à Tafsir Thioye sa pondération, a tenté de lui détailler pourquoi le régime actuel n’est pas comptable des 119% de dettes : « ce n’est pas notre dette, parce que c’est un déficit budgétaire dont on a hérité qui était de 13,4%. Mais ce n’est pas un débat très important, ce qui compte, ce sont les mesures de réformes que nous entendons dérouler », assure M. Diba.
Ousmane Sonko : « la justice doit pouvoir allier rigueur et célérité dans le traitement des dossiers »
Concernant la question sur les réformes institutionnelles, le Premier ministre dira que tout le travail qui devait être fait en amont a été bouclé et le rapport mis à la disposition du président de la République : « je suis convaincu que le président de la République prendra dans les jours à venir les décisions appropriées pour faire avancer le dossier. C’est lui-même qui avait convoqué le dialogue politique et le comité en charge de mettre en œuvre les conclusions du dialogue lui a déjà remis son rapport », dit-il, avant de s’expliquer ensuite sur les lenteurs dans la reddition des comptes. « Les experts en justice nous diront que le temps de la justice n’est pas celui des hommes, mais c’est aussi la loi qui veut que l’on traite les dossiers dans un délai raisonnable, mais les dossiers doivent être traités avec rigueur et sérieux. Une position que nous partageons, puisque nous ne croyons pas au règlement de comptes à travers la justice. Nous souhaitons que tous les dossiers soient traités avec le respect de toutes les procédures. Mais cette rigueur qu’on demande dans le traitement des dossiers ne doit pas empêcher la célérité. La justice doit pouvoir allier rigueur et célérité dans le traitement des dossiers. Cela fait plus d’un an que certains dossiers sont en cours et toujours pas de jugement. Nous ne connaissons pas les véritables raisons d’une telle situation et nous n’allons pas nous immiscer dans le fonctionnement de la justice, mais il y va de sa crédibilité », fait savoir le Premier ministre.
« Si mon petit-frère était épinglé par un rapport, je n’hésiterais pas à le transmettre à qui de droit »
Ousmane Sonko d’expliquer ensuite la procédure de mise en œuvre des rapports de l’Ige. « Il est vrai que l’Ige est logée à la présidence et c’est le président de la République qui lui confie ses ordres de mission. Penser qu’il est le seul concerné par les rapports de l’Ige, c’est méconnaître les textes. Après son rapport définitif, la note complémentaire et la fiche de synthèse, l’Ige les présente au chef de l’Etat qui a la possibilité d’approuver ou de désapprouver les propositions. A noter que toute proposition désapprouvée par le Président, c’est irréversible. Mais quand il met la mention lu et approuvé sur le rapport, il est dessaisi du rapport. Le premier exemplaire est remis au président de la République et le deuxième exemplaire va au Premier ministre, puisque c’est lui qui en assure l’exécution. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il y a un bureau de suivi à la primature. Ce sont les compétences du Premier ministre, même le Président ne peut pas les lui enlever », explique Ousmane Sonko, qui assure que depuis qu’ils sont arrivés au pouvoir, aucun rapport ne traîne à la primature, il envoie tous, systématiquement, aux ministres concernés : « si mon petit-frère était épinglé par un rapport, je n’hésiterais pas à le transférer. Je n’aurais aucun état d’âme pour le faire », prévient-il.
Sonko : « pour le rapport du Cese, j’ai fait ce que j’avais à faire dans le cadre de la continuité de l’Etat »
Le Premier ministre de clarifier ensuite que le rapport sur le Cese n’est pas celui de ce régime. « C’est l’ancien président qui a approuvé toutes les propositions, sauf l’annulation du statut du président d’honneur avec les privilèges. L’ancien Premier ministre Amadou Ba avait d’ailleurs commencé à exécuter le rapport. Il avait écrit à Moustapha Ba, ancien ministre des Finances et Abdoulaye Daouda Diallo qui était le président du Cese. Amadou Ba avait même transmis à la présidente sortante le rapport et avait demandé qu’on saisisse la justice le 3 juillet 2023. Et puisque l’Etat c’est une continuité, j’ai fait ce que je devais faire », renseigne le Premier ministre.
Sonko : « nous savons tous que ce qui s’est passé en Guinée Bissau est une combine »
Pour ce qui est des renégociations, le chef du gouvernement assure que depuis qu’ils ont commencé, le niveau de surfacturation, rien que pour les infrastructures, c’est 17% . « Si les Sénégalais savaient ce qui se passe dans ce pays, ils en seraient complètement retournés. Je reste convaincu que 40% de notre budget était détourné de son objectif. Donc le premier combat qu’il faut gagner, c’est le combat de la gouvernance. Nous l’avons engagé et nous y travaillons avec sérénité », promet-il. Sur la question du coup d’Etat en Guinée, le Premier ministre souligne que la question releve des prérogatives du président de la République, mais cela ne l’a pas empêché de donner son avis : « nous savons tous que ce qui s’est passé en Guinée Bissau est une combine. Il faut qu’on termine le processus pour que la commission déclare le vainqueur et qu’on libère Domingos Pereira », demande-t-il.
Nd. Kh. D. F












