Répondant aux députés, Ousmane Sonko se réjouit qu’aucun député, qu’il soit de la majorité ou de l’opposition, n’a remis en question les orientations et la déclinaison des politiques publiques des cinq prochaines années. «Il y a quelque chose d’assez cocasse à relever, parce qu’on a parlé de rapport à la vérité. Je passerai, si la longue campagne de diabolisation perpétrée par des gens du régime sortant, qui ont utilisé toutes les forces dont ils disposaient pour combattre un parti politique, avait cessé», déclare Ousmane Sonko. A l’en croire, la désinformation avait pris toute une forme. «Le message, c’était de nous laisser apparaitre pour des gens qui détestaient les foyers religieux. Beaucoup d’entre eux ont sillonné le pays pour rencontrer les chefs religieux et leur raconter des histoires du genre : nous allions interdire les évènements religieux ; nous allions combattre les tarikhas. Aujourd’hui, ces mêmes personnes sont dans leurs petits souliers, parce que le monde entier s’est rendu compte que c’était un tissu de contrevérités», dit-il. Avant d’enchaîner : «la désinformation a ensuite pris toutes sortes de tournures. Ils nous ont accusé d’être apparentés à des mouvements irrédentistes, que nous serions financés par des multinationales, nous serions dans un programme de déstabilisation du Sénégal, nous aurions des relations avec des organisations terroristes, islamistes et j’en passe. S’il faut parler de rapport avec la vérité, on sait où chercher», balance le Premier ministre à l’endroit de Abdou Mbow qui l’a accusé d’avoir un rapport douteux avec la vérité.
Ousmane Sonko soutient que lorsqu’ils sont arrivés au pouvoir, le débat, c’était de dire qu’ils n’ont pas de programme, qu’ils n’ont pas de vision. «Où sont ceux qui le disaient ? Sont-ils capables de démontrer ici et sur les plateaux de télé qu’il n’y a pas de programme ni de vision ? Et le pire, c’est que ceux qui s’agitent le plus n’ont pas le niveau minimum pour parler de ces questions», martèle Sonko.
«Il y a des gens qui devraient avoir honte de parler»
Le Premier ministre soutient qu’ils pouvaient faire comme le régime sortant, au lieu de se livrer à l’exercice de vérité. «Qu’est-ce qu’il y a de plus malsain que de mentir à tout son peuple, de mentir aux partenaires internationaux en leur cachant les véritables chiffres pour pouvoir continuer à endetter le Sénégal. C’est ce qui nous met dans cette situation fâcheuse dans laquelle one se trouve. Il y a des gens qui devraient avoir honte de parler et surtout de le faire de cette manière, fulmine Sonko. «Chacun d’entre nous doit éviter de se faire prendre la main dans le sac en plein jour», ironise-t-il avant d’annoncer la publication du rapport de la Cour des comptes dans quelques jours. «Je ne sais pas ce qui s’y trouve, mais je peux vous garantir d’une chose, si ça ne révèle pas plus que ce que nous avons révélé, ça ne sortira pas moins. Et à partir de ce moment, tous ceux qui ont une responsabilité par rapport à cette situation fâcheuse et qui ont trahi ce pays, devront en rendre compte devant vous certainement les députés».
«Tous ceux qui ont une responsabilité devront en rendre compte»
Le Premier ministre se veut clair, il faut que certains comprennent qu’une certaine forme de politique est révolue. «La politique, désormais, c’est de parler en connaissance de cause, de parler de ce qu’on connait, de donner des faits et des chiffres précis», renseigne Ousmane Sonko, qui croit fermement que ce qui s’est passé le 24 mars n’était pas la fin d’une histoire, c’en est que le début. «Et tout homme politique qui ne pourra pas suivre ce rythme doit mettre un trait sur sa carrière politique. Le pays va changer et il va changer au forceps. Le débat s’est posé en termes très simples. (…) Nous avons présenté la situation catastrophique du pays. On nous a vanté les mérites d’un bilan, le vrai bilan, il est là. Il n’y a rien de plus facile que de maquiller des chiffres, d’aller emprunter de manière désordonnée comme on l’a dit en calculant tout de suite le prochain mandat et de s’empresser de faire sortir des immeubles et de dire que j’ai un bilan», affirme Sonko qui insiste : «les responsables de cette situation sont là dans cette salle. Vous les sentez perdus».
«Le pays va changer et il va changer au forceps»
Narguant Aïssata Tall Sall, le Premier ministre dira : «quand on n’a pas grand-chose à dire, il faut dire ‘’gongo’’, c’est bon. Ça fait partie de la grandeur. Et madame le député Aïssata Tall Sall l’a fait à sa manière. (…) Elle l’a dit en langage très effilé, comme savent le faire mes amis les avocats, (…) J’espère que vous ne rêvez pas encore de me juger ?», ironise-t-il.
Sur son retard accusé quant à a présentation de sa Dpg, le Premier ministre dira : «je n’ai jamais eu de problème à répondre à l’Assemblée nationale. Je n’ai peur d’aucun député. J’ai été député, où vous étiez 127 et j’étais seul. Et le peuple sénégalais peut témoigner que ces cinq années de députation n’ont pas été en faveur de vos 127. Comment pourrais-je avoir peur de me présenter devant vous ?», dit-il avant d’expliquer : «ce qui s’est passé, c’est qu’on a eu une majorité qui a une attitude particulièrement irresponsable. Un gouvernement qui vient de s’installer et l’Assemblée s’agite parlant de motion de censure. (…) Et je vous avais assuré que vous ne censurerez jamais et que vous serez censurés. La politique, ce n’est pas la force, mais c’est l’intelligence», assure-t-il.
Aux députés de l’ancien régime, Sonko demande d’apprendre de leurs erreurs et de revenir à la raison et de s’instruire. «Certes l’Assemblée, c’est la confrontation politique, c’est la guérilla parlementaire dans tous les pays du monde, mais nous n’avons jamais dépassé les limites en termes langagiers. Nos interventions qui tournent encore sur les réseaux sociaux».
Pour répondre à Mbaye Dionne, Ousmane Sonko dira : «aucun Sénégalais ne devrait critiquer l’exercice de vérité que nous avons fait, à plus forte raison un homme politique. En le faisant, on savait les conséquences et l’exercice de vérité sera total et complet. Contrairement à ce que disent les gens, les bailleurs n’ont pas quitté. C’est nous qui avons dit au fond que nous n’allons pas être présent lors de la revue du mois de juillet. Ce sont eux qui ont plongé le pays dans cette situation. Nous avons tenu des réunions au palais pour voir comment gérer cette situation. C’est ainsi que nous avons pris la responsabilité de dire la vérité aux Sénégalais.»
Selon Sonko, il nous faut des réformes courageuses avec une politique fiscale arrimée à la capacité du citoyen à faire face. «Les Sénégalais ne vont pas rester éternellement pauvres. Nous avons besoin d’investisseurs qui investissent gagnant-gagnant. Le Sénégal est attractif, on a toutes les ressources possibles, refusons la pauvreté qu’on veut nous faire croire. Il nous faut sortir de ce complexe des autres».
«Arrêtons de politiser les appartenances régionales et ethnique»
A Barane Fofana qui s’est exprimé en pulaar en accusant l’actuel régime de sacrifier le Fouta, Ousmane Sonko prévient : «arrêtons de politiser les appartenances régionales et ethniques. Nous sommes tous des foutankés. Si Matam est dans cette situation, c’est à cause des dignitaires de l’ancien régime. Nous on ne fait pas de distinction de régions. (…). Donc ceux qui disent que le Fouta est oublié, n’ont rien compris. Il faut arrêter ce genre de politique. Vous ne rendez pas service au Fouta qui est une partie intégrante du Sénégal. »
«Rapporter n’efface pas totalement la loi mais peut en changer un certain nombre d’aspects (…)»
Concernant la différence qui existe entre rapporter et abroger une loi, le Premier ministre soutient : « rapporter n’efface pas totalement la loi, mais peut en changer un certain nombre d’aspects, soit en rajoutant ou en diminuant. Ce qui est différent d’abroger. Les deux options sont sur la table », précise-t-il avant de souligner que personne n’a négocié cette loi. « Nous sommes seulement d’accord sur la loi d’amnistie, si c’est uniquement les faits politiques. Mais ils ont tout fourré dedans. Nous avons voté contre et ils se sont mis à nous désigner comme les bénéficiaires, ce qui n’est pas vrai. Et si c’était vrai, Pastef n’en veut plus. « Nous sommes pour son abrogation et que tout le monde aille répondre, moi y compris. Pastef n’en a pas besoin», dit-il.
Ndeye Khady D. FALL & Baye Modou SARR