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BRAS DE FER DIPLOMATIQUE : Le Sénégal défie Washington au nom de la justice internationale



BRAS DE FER DIPLOMATIQUE : Le Sénégal défie Washington au nom de la justice internationale

 
 
 
Après l'annonce par les États-Unis de nouvelles sanctions contre la Cour pénale internationale (Cpi), accusée de «politisation», Dakar a réagi avec une fermeté rare. Ces sanctions, qui visent quatre magistrats, dont le magistrat sénégalais Mame Mandiaye Niang, consistent en une interdiction d'entrée sur le sol américain, le gel des avoirs éventuels détenus aux États-Unis et toute transaction financière avec eux. Dans le communiqué publié hier par le ministère de l’Intégration africaine et des Affaires étrangères, le Sénégal a demandé aux autorités américaines de «retirer» ses sanctions. Dans un monde où Donald Trump impose son autorité brutale, jusqu’à humilier ses alliés européens, la sortie du Sénégal interroge : que peut peser la voix d’un «petit pays» face à la première puissance mondiale ?
 
 
 
La diplomatie sénégalaise vient de livrer l’une de ses déclarations les plus tranchantes de ces dernières années. Le ministère de l’Intégration africaine et des Affaires étrangères a dénoncé avec vigueur les sanctions imposées par les États-Unis à quatre magistrats de la Cour pénale internationale (Cpi), parmi lesquels figure le magistrat sénégalais Mame Mandiaye Niang. Dans son communiqué publié hier, le ministère dirigé par Yassine Fall appelle non seulement Washington à retirer ces mesures jugées «injustes et infondées», mais en appelle aussi aux États parties au Statut de Rome pour réaffirmer leur solidarité à l’égard de la Cour. «Le Sénégal invite les autorités américaines à retirer ces sanctions qui constituent une grave atteinte au principe de l’indépendance de la justice […] Le Sénégal appelle instamment les États Parties à réaffirmer leur solidarité à la Cour, et à redoubler d’efforts pour s’assurer que les magistrats et tout le personnel de la Cour puissent remplir leur mission en toute indépendance, sans menaces ni restrictions», rapporte le document.
La posture sénégalaise paraît à la fois courageuse et symbolique. Premier État à avoir ratifié le Statut de Rome, le Sénégal revendique un héritage moral dans la défense de la justice internationale. Le Président Bassirou Diomaye Faye et son Premier ministre Ousmane Sonko ont tour à tour affiché un soutien total au juge Niang et réaffirmé leur attachement à l’indépendance de la Cpi. Une prise de position qui, dans un continent souvent accusé de passivité diplomatique, tranche par sa clarté.
Mais, au-delà du geste, une question s’impose : que pèse la voix du Sénégal face aux États-Unis de Trump ? La réponse, réaliste, tient en peu de mots : pas grand-chose, si l’on se place du point de vue de la realpolitik. Washington ne pliera pas devant Dakar. Les sanctions contre les juges de la Cpi ne seront sans doute pas retirées du seul fait de la protestation sénégalaise. L’Amérique de Trump se soucie peu des sensibilités africaines, comme elle se soucie peu de celles des Européens.
Le geste sénégalais trouve d’ailleurs un écho particulier à l’heure où l’Afrique tente de redéfinir sa place dans le monde. À l’image de l’Afrique du Sud, qui a déjà affronté les foudres de Washington pour avoir accueilli des dirigeants sous sanctions, Dakar entend rappeler que la souveraineté africaine ne se limite pas aux discours. En défendant l’un de ses magistrats, il défend aussi la crédibilité d’un continent longtemps réduit au silence sur les grandes questions internationales.
Reste que le rapport de forces demeure écrasant. L’humiliation infligée aux présidents européens par Trump illustre à quel point même les grandes puissances régionales peinent à exister face à la brutalité américaine. Dans ce théâtre, la voix du Sénégal est un murmure. Mais un murmure qui, répété, amplifié et relayé par d’autres, peut devenir une onde. Car l’histoire de la diplomatie enseigne que les principes défendus par les « petits pays » finissent parfois par orienter les grandes batailles du droit international.
En somme, la déclaration de Dakar n’est pas un acte de puissance, mais un acte de dignité. Elle rappelle qu’au-delà du cynisme des rapports de force, il existe des nations qui choisissent de parler au nom de la justice, même quand elles savent qu’elles n’ont pas les moyens de se faire entendre. Et c’est peut-être là, paradoxalement, que réside la véritable force du Sénégal.
Pourtant, l’histoire récente montre que de telles tensions peuvent être gérées avec une certaine efficacité lorsqu’elles sont traitées discrètement. Selon le journaliste Madiambal Diagne, Fatou Bensouda et plusieurs de ses collègues, dont le magistrat sénégalais Amady Ba, avaient été confrontés aux mêmes sanctions américaines par le passé. Dans ce cas précis, l’ancien président Macky Sall avait mené des démarches discrètes auprès du Département d’État américain, ce qui avait permis de retirer Amady Ba de la liste des personnes sanctionnées. Cette approche pragmatique avait montré qu’une diplomatie subtile pouvait produire des résultats tangibles, tout en évitant l’explosion publique d’un conflit avec Washington.
En tout état de cause, entrer dans un bras de fer avec Washington n’est pas sans conséquences potentielles pour Dakar. Les États-Unis restent un partenaire majeur du Sénégal, aussi bien sur le plan économique que sécuritaire, à travers leur coopération militaire dans la lutte contre le terrorisme au Sahel, leur appui financier au développement et leurs investissements stratégiques. Une tension ouverte pourrait fragiliser certains programmes bilatéraux, réduire l’accès à des financements internationaux fortement influencés par Washington, voire entraîner des représailles diplomatiques plus discrètes mais réelles, comme le ralentissement de certaines coopérations. Le choix de Dakar d’afficher une fermeté publique est donc un pari risqué : il lui permet de défendre la souveraineté du droit et la dignité nationale, mais il l’expose aussi à la brutalité d’une puissance américaine qui n’hésite pas à sanctionner même ses alliés les plus proches.
 
 
 
Sidy Djimby NDAO
 
 
 
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