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Abdoulaye Bathily: "avec les événements de mars dernier, on peut dire qu'on est revenu à la case départ, ou même avant la case départ"



Abdoulaye Bathily: "avec les événements de mars dernier, on peut dire qu'on est revenu à la case départ, ou même avant la case départ"

 
 
Les assisards et autres membres de la Commission nationale de réforme des institutions (Cnri) et des personnalités du monde universitaire étaient en conclave samedi dernier à l’effet de disserter sur l’engagement politique de Amadou Makhtar Mbow.
 
 
 
Les rideaux sont tombés sur le panel consacré à l’engagement politique de Amadou Makhtar Mbow. Parmi les intervenants, il y avait de nombreux assisards et personnalités qui ont travaillé, dans le cadre de la Commission nationale de réforme des institutions (Cnri), avec l’ancien Directeur général de l’Unesco. Le Pr Abdoulaye Bathily a salué dans son intervention le travail d’Amadou Makhtar Mbow et tous les assisards qui, en 2007, avaient décidé de sortir des ghettos des partis politiques et d’aller vers un rassemblement plus large pour s’opposer à la confiscation du pouvoir par Abdoulaye Wade et d’ouvrir des perspectives nouvelles pour le pays. «Amadou Makhtar Mbow, par sa droiture morale, son expérience, sa connaissance de la société sénégalaise, s’était approprié le travail. Il avait des réticences tout à fait légitimes, mais finalement, grâce à son engagement politique, patriotique, il a fini par accepter», a laissé entendre le Pr Abdoulaye Bathily, qui souffle au passage que c’est avec beaucoup d’émotion qu’il se rappelle de cette méthode participative, consultative, délibérative d’Amadou Makhtar Mbow.
 
 
Pr Abdoulaye Bathily : «avec les évènements de mars dernier, on peut dire qu’on est revenu à la case départ, ou même avant la case départ»
 
 
«J’ai fait près de 60 ans de vie politique dans ce pays, mais je n’ai jamais vu un processus comme ça», confesse Abdoulaye Bathily. Avant d’ajouter : «aucun parti, aucune organisation n’en a produit de semblable. Je relis toujours le document des Assises dans ma bibliothèque. Fondamentalement, il y a un déni. On a même dit que les Assises, ce n’est ni la Bible ni le Coran... Mais avec les évènements de mars dernier, on peut dire qu’on est revenu à la case départ, ou même avant la case départ», raille Abdoulaye Bathily, qui ajoute que si on ne fait pas attention, le Sénégal risque de connaitre des élections avec contestations.
Selon l’ancien secrétaire général de la Ld/Mpt en effet, on va vers «l’inconnu, vers le chaos», si on n’engage pas le processus qui a conduit aux Assises nationales. «Toutes les décisions sont prises par l’Exécutif. Par exemple, nous allons à des élections qui vont encore être des élections de contentieux alors que toutes ces questions ont été déjà réglées par les Assises», dit-il.
Le Pr Abdoulaye Dièye, qui intervenait ès qualité d’enseignant-chercheur à la Faculté des sciences juridiques et politiques de l’Ucad, mais aussi comme panéliste et ancien de la Cnri, déplore lui aussi qu’on n’ait pas donné une suite favorable aux travaux de la Cnri. Selon lui, il est temps de faire un plaidoyer pour la vulgarisation des travaux des Assises.
 
 
Pr Penda Mbow confiante qu’un jour ou l’autre, les conclusions des Assises seront appliquées
 
 
Le Pr Penda Mbow, présente à cette rencontre, quant à elle, garde espoir quant à l’application un jour des conclusions des Assisses nationales. Elles seront appliquées un jour ou l’autre, a-t-elle laissé entendre. «Nous allons vers un monde où le renouveau démocratique sera un impératif. Au Sénégal, on ne pourra pas aller vers ce renouveau sans passer par les conclusions des Assises nationales et la Charte démocratique. Ensuite, nous avons plus que jamais besoin de bâtir un consensus très fort si nous voulons négocier cette reconstruction post-Covid. Et là, je pèse bien mes mots, il nous faut retourner vers un consensus. Les conclusions de ces Assises ont embrassé tous les aspects de la vie politique, économique, sociale, culturelle, juridique, il faut simplement réactualiser ces conclusions en fonction de ce que nous sommes en train de vivre. On se rend compte que la société est en train d’échapper petit à petit aux acteurs politiques, et c’est ça qu’il faudra éviter, sinon demain, d’autres acteurs vont naitre. Et ces acteurs peut-être ne seront pas les mieux armés», avertit à son tour l’historienne.
 
 
Pr Penda Mbow : «il ne faut pas désespérer…»
 
 
 
Pr Penda Mbow de poursuivre que ces dernières décennies, si on enlève les dates, c’est comme si tout ce qui a été dit, c’est ce qu’on disait pendant la gouvernance Wade aussi, mais l’espoir est permis. «Même si on régresse, il ne faut pas désespérer. Je viens de rentrer du Tchad d’une recherche sur la couverture sanitaire universelle, dix jours avant (la mort) du président Déby. On était en pleine campagne électorale. Je fais partie des 102 universitaires qui ont signé le texte sur la crise de l’Etat de droit. J’ai vu ce que cela voulait dire un régime autoritaire. Il n’y avait que des photos grandeur nature du président (Déby) et son épouse. J’ai vu ce que cela peut être un modèle non démocratique. Je me suis rendu compte que ce qu’on avait est précieux, et il faut le préserver, le maintenir. Il faut le défendre littéralement. Une autre chose qui m’a semblé importante, c’est que le Sénégal, alors que je n’y croyais plus moi-même, est un pays qui sert encore de modèle aux autres pays africains. Quand on dit : je suis Sénégalaise, les gens connaissent l’actualité sénégalaise quasiment sur le bout des doigts. Commentant ce qui était en train de se passer ici, ils disaient que nous ne pouvions pas céder, que le Sénégal a des acquis démocratiques, qu’il faut que la société s’accroche. (…) Etre un modèle ne veut pas forcément dire qu’on est en avance. Cela veut aussi dire que nous avons cette responsabilité pour ce continent», plaide Mme Mbow.
 
 
Mamadou Lamine Loum : «nous allons créer un Institut des Assises nationales»
 
 
Pour sa part, l’ancien Premier ministre (1998-2000) Mamadou Lamine Loum révèle que le projet de création d’un Institut des Assises nationales suit son cours et qu’il aura pour tâche de faire d’abord la propagation de la Charte de gouvernance démocratique, en faisant appel aux jeunes, de manière à ce que nous puissions passer la relève aux générations à venir. Ensuite, de caractériser le comportement de tous les adhérents à la charte, étatiques et non étatiques, pour voir en quoi on dévie du chemin. Enfin, voir comment nous nous situons par rapport aux principes des valeurs des Assises nationales. L’objectif, selon lui, est d’en faire un outil d’évaluation des politiques publiques, élargi à la sous-région.
 
Khadidjatou DIAKHATE
 
 
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