Repartir sur de bonnes bases pour la prochaine sortie, élever le niveau pour retrouver la suprématie d'avant, prendre les responsabilités, c'est là les conseils de Alassane Ndour a son ancien coéquipier Aliou Cissé et aux Lions pour se réconcilier avec le public sénégalais. Pour l'ancien Lion, les formules magiques sont nombreuses pour retrouver le football sénégalais au niveau qu'il avait il y a maintenant quelque temps. Dans cette entretien téléphonique, Alassane Ndour s'est aussi penché sur l'alternance générationnelle dans la tanière et le comportement en demi-teinte des Lions en clubs et en sélection.
Les Echos : Comment avez-vous apprécié la dernière prestation du Sénégal à Diamniadio face au Burkina Faso (1-1) ?
Alassane Ndour : un peu timoré. On attendait un peu plus des Lions, mais sur le plan mathématique, ce n'est pas du 100%. On a eu 4 points sur les 6 possibles. Ce n'est pas mal, on est toujours dans la course. On n'est pas largué. Maintenant, après, sur le plan productivité de jeu, je pense que c'est là où on reste encore sur notre faim. Mais comme on dit, c'est une course de fond et non une course de vitesse. On espère qu'au fur et à mesure qu'on avance dans la compétition, les Lions se reprendront avec la manière pour dominer et gagner leurs adversaires.
Restons dans le contenu du jeu, selon vous, qu'est-ce qui explique le nombre d'occasions manquées ?
Effectivement, il y a eu des occasions manquées, mais bon ça arrive dans le football. Parfois on a la baraka on marque et d'autres fois on n'arrive pas à marquer. Je parlerais plus du jeu qu'on produit et dire qu'on peut beaucoup mieux faire, malgré que certains disent que c'est la fin d'une génération, mais ce sont des joueurs qui sont encore compétitifs et qui jouent dans de très grands clubs. Ils jouent encore de leurs carrières. Je pense qu'il y a encore à faire. Il faudra que cette mayonnaise puisse prendre. On ne peut pas perdre notre football comme ça au bout d'un an seulement, ce n'est pas possible. C'est à l'entraîneur de trouver la bonne formule et mettre les joueurs dans de bonnes conditions et que les joueurs aussi puissent prendre leurs responsabilités, parce que c'est eux les acteurs principaux sur le terrain. Ce sont des professionnels et je pense que s'ils n'avaient pas la capacité et les moyens d'être compétitifs, ils ne seraient pas là. S'ils sont sélectionnés c'est à eux de relever le défi, de jouer leur propre jeu, de montrer leur vrai visage, ce qu'ils font au niveau de leurs clubs.
Est-ce que vous êtes de ceux qui pensent que l'alternance générationnelle tarde à prendre forme dans la tanière ?
Je dis toujours que c'est bien de faire intégrer à chaque fois des jeunes. C'est important de les mettre dans le bain dès maintenant, parce que pour moi les générations sont comme des portes battantes, si certains s'ouvrent d'autres se ferment. Il faut trouver la bonne formule et le bon timing pour intégrer les jeunes et aussi ne pas mettre que des jeunes. Aujourd’hui, il leur faut être accompagnés de joueurs d'expérience pour accompagner cette fougue et cette jeunesse. C'est petit à petit que ça va se faire. Ces jeunes-là aussi doivent lever le niveau parce que c'est ce qu'on attend d'eux. C'est ce que les Sadio, Gana, Kouyaté, Koulibaly et autres ont eu à faire quand c'était à leur tour de faire la transition. Il faut que les jeunes s'inspirent de ces ténors qui ont fait les beaux jours de l'équipe nationale et qu'ils puissent rentrer dans le système assez rapidement.
Les Lions brillent en clubs mais pas en sélection pour certains, comment s'explique ce phénomène ?
La sélection n'est pas pareille que le club. Le sélectionneur n'a pas beaucoup de temps pour travailler des systèmes, il faut le dire. Alors qu'en club, l'entraîneur a toute une semaine pratiquement pour mettre en place ses systèmes, préparer le match, faire des séances vidéos, à des périodes hivernales... pour le sélectionneur, c'est la course contre la montre, dès que les joueurs arrivent, il essaie de mettre en place quelque chose, ce n'est pas pareil. Mais les joueurs sont assez expérimentés aujourd'hui, je ne veux pas dire pour coacher mais prendre leurs responsabilités.
Par moment, Il faut que les Lions prennent leurs responsabilités, jouer de leur expérience et de leur ingéniosité. Dans chaque secteur sur le terrain, nous avons des joueurs cadres. On a dans les buts Edouard Mendy, en défense Kalidou Koulibaly, au milieu Gana Guèye et dans l'attaque on a Sadio Mané on les a dans chaque compartiment. C'est là où on les attend de prendre leurs responsabilités et d'intégrer aussi les jeunes pour que cette mayonnaise puisse prendre forme. Mais en tout cas, on a encore confiance en cette équipe-là. Il va falloir juste trouver les astuces et les automatismes qu'ils ont en club pour le bien-être de l'équipe.
D'aucuns parlent de système de jeu, est-ce là le véritable problème à votre avis ?
Bon… Je dis toujours que ce soit un système en 4-4-2 ou un en 4-3-3 en 3-5-2 le contenu dépend toujours de l'animation du jeu. C'est la chose la plus importante. Aujourd'hui, un système comme le 3-5-2 est purement offensif et non défensif, l'équipe est très haute et on va chercher haut et passer par les pistons en attendant d'avoir une couverture centrale à 3 joueurs. Il faudra avoir des pistons, à mon avis, assez fermés, assez outillés pour que ces systèmes puissent fonctionner. Donc si on joue en 3-5-2 et que pendant tout Le match, on a que 1 ou 2 centres venant des pistons ça veut dire que le système n'a pas marché parce que c'est souvent sur les côtés que le système domine les adversaires. On doit avoir des joueurs qui ramènent la supériorité sur les côtés et y créent la différence en étant percutants. Il faut qu'ils aient aussi le coffre pour revenir défendre dans les phases défensives. Après est-ce qu'on a des joueurs formés pour ça ou adéquats pour ces systèmes-là ? Je me pose des questions parce que je n'ai pas encore vu vraiment un match phare où ce système a vraiment marché pour le Sénégal. Sur le dernier match, on a vu un changement de système. Il ne faut pas avoir peur de changer de système, parce qu'on a des joueurs professionnels qui doivent être capables de s'adapter comme ils le font dans leurs clubs. Le plus important, c'est l'animation du jeu et non le système.
Aliou Cissé, votre ancien coéquipier, a été copieusement hué lors de sa dernière sortie à Diamniadio, est-ce que le match contre le Malawi sera une occasion pour lui de se réconcilier avec le public sénégalais ?
Absolument ! Ce sera pour lui l'occasion de se réconcilier avec Le public sénégalais. Ça se fera avec un bon résultat, avec la manière avec beaucoup de buts... ce qu'on avait l'habitude de voir du Sénégal. Ce n'est pas juste avec des paroles qu'on le fera, il faut passer à l'acte, montrer notre suprématie dans le football. Nous avons beaucoup donné de l'espoir à nos adversaires ces derniers mois, depuis après la Can. C'est une chose qu'il faudra effacer. Il faut que quand on joue avec le Sénégal l'on se dise qu'on joue avec les ex champions d’Afrique, des ténors, une belle équipe sénégalaise. Toutes les équipes se valent mais quand même voir le Burundi tenir tête au Sénégal pendant presque 90 minutes, c'est inexplicable. Il va falloir qu'on remonte encore d'un cran notre niveau de jeu pour imposer notre suprématie comme on le faisait avant.
"Par moments, Il faut que les Lions prennent leurs responsabilités, jouer de leur expérience et de leurs ingéniosité"
"Que ce soit un système en 4-4-2 ou un en 4-3-3 en 3-5-2 le contenu dépend toujours de l'animation du jeu. C'est la chose la plus importante"
"Il va falloir qu'on remonte encore d'un cran notre niveau de jeu pour imposer notre suprématie comme on le faisait avant"