Placé sous mandat de dépôt pour des chefs d'inculpation jugés «fictifs», le chroniqueur de TFM Badara Gadiaga devient le symbole d’une justice décriée par sa défense. Menée par Me Oumar Youm, l’équipe d’avocats accuse le parquet de dérives graves, allant jusqu'à parler de «police politique» et de «honte nationale». Ils promettent de porter l’affaire devant les instances internationales.
Après son placement sous mandat de dépôt hier, les avocats de Badara Gadiaga ont dénoncé l’attitude du parquet devant la presse. C’est Me Oumar Youm qui a ouvert le bal.
Me Oumar Youm : «le Parquet manque à la fois de vigueur morale et de rigueur professionnelle»
Devant les médias, il manifeste sa déception sur le sort réservé à son client. Ainsi, il charge le parquet. «Nous dénonçons avec la plus forte vigueur, avec la plus grande fermeté cette démarche du parquet qui manque à la fois de vigueur morale et de rigueur professionnelle», regrette l’avocat tout en colère qui invite le parquet à éviter «des artifices innommables tentant à mettre en péril la liberté des citoyens. De plus en plus, nous le constatons et nous le dénonçons, le parquet sort de son périmètre régulier légal pour entrer dans un périmètre illégal, inique, injuste dont le dessein est de museler des acteurs politiques, des chroniqueurs, la presse… C’est une honte pour la société, c’est une honte pour le Sénégal, c’est une honte pour tous les esprits militants de liberté et de la démocratie», fait-il savoir avant d’appeler à la mobilisation contre ces forfaitures.
«Il n’appartient pas au parquet de se transformer en police politique de Pastef»
Cette arrestation, poursuit Me Youm, est «un cas de la catégorie 2. Nous allons le dénoncer au groupe de travail des nations unies et à la Cedeao d’où le Sénégal a été condamné. Nous allons poursuivre le combat au-delà de nos frontières. Il n’appartient pas à la justice particulièrement au parquet de se transformer en police politique de Pastef pour régler des comptes. Nous n’accepterons pas. Ce qui se passe au Sénégal c’est inacceptable, gravissime, on ne l’a jamais vu», assure l’ancien ministre des Forces Armées du régime de Macky Sall.
«C’est une prise d’otage judiciairement organisée»
A l’en croire, depuis son interpellation, son audition et son placement sous mandat de dépôt, «aucune procédure n’a été respectée. L’enquête de police, Badara Gadiaga a été poursuivi pour trois chefs d’inculpation ; diffusion de fausses nouvelles, discours contraire aux bon es mœurs, outrage et offense à une personne exerçant en partie ou totalement les prérogatives du président de la République», dit-il avant de déballer : «la police elle-même après ses investigations a considéré que dans ce dossier, il n’y avait rien à poursuivre à l’exception de l’infraction relative au discours contraire aux bonnes mœurs», révèle la robe noire qui précise que la garde à vue qui a été ordonnée n’a porté que sur cette infraction. «Donc on fait un chapelet, une énumération fictive d'infractions indignes à un citoyen digne dont le seul tort c’est de contribuer à un conseil du peuple chaque vendredi pour dire ce qu’il pense de notre démocratie et de l’état de notre République. C’est une prise d’otage judiciairement organisée, que nous n’accepterons pas» dit Me Youm.
«C’est un faux qui existe dans un procès-verbal (…) le parquet doit respecter nos libertés»
Toujours dans ses dénonciations, Me Oumar Youm a évoqué les autres charges augmentées par le Parquet qu’il juge comme une violation flagrante du droit des propriétés. «Nous assistons à une atteinte au secret des affaires. Nous assistons à une atteinte du droit d’avoir de l’argent. GSIE est une plateforme qui appartient à un Sénégalais bien identifié. Ce n’est pas une société de Badara Gadiaga. C’est un faux qui existe dans un procès-verbal. C’est le moment, dans la révision du Code de procédure pénal, de mettre la police et le parquet devant leurs responsabilités qui doivent être engagées. On ne peut pas se mettre dans un bureau climatisé, se permettre d’invoquer des faits qui n’existent que dans leur conscience pour mettre quelqu’un en prison», laisse-t-il entendre avant de fusiller à nouveau le parquet en ses termes. «De là à dire que l’argent était de nature à financer des troubles ou donner des moyens de perturber la sécurité de l’Etat, il y a un pas à ne pas franchir. Le parquet doit respecter la société, le parquet doit respecter les citoyens, le parquet doit respecter nos libertés», flanque l’avocat au bout des nerfs.
Me Aboubacry Barro : «A ce rythme, on risque d’avoir un parquet de la répression»
Pour sa part, Me Aboubacry Barro n’a pas non plus été tendre avec le parquet. «Il a un compte ACEP mais cet argent doit d’abord passer par une plateforme dénommée GSIE qui transfert l’argent via Orange Money à Badara Gadiaga». Il a plaidé la diminution de la force du Parquet. «Nous plaidons la mise en place du juge des libertés et de la détention comme convenu lors des assises de la justice. A ce rythme, on risque d’avoir un parquet de la répression. Ce qui serait dommage» dit-il.











