Lors de l’audience d’hier, l’agent judiciaire de l’Etat s’était renforcé de ses avocats. L’enjeu étant énorme, il fallait mettre tous les atouts de son côté et ne rien négliger. Etant la partie requérante, il lui revenait au démarrage de l’audience de faire ses plaidoiries. Avocat de l’Etat, Me Ousmane Thiam a pris la parole en premier. Dans son argumentaire, la robe noire a soutenu l’incompétence du juge du Tribunal d’instance de Ziguinchor pour connaître de l’affaire. Il s’agit d’une radiation d’office, selon l’avocat et donc le juge de Ziguinchor n’est pas compétent du point de vue de la loi pour trancher l’affaire. Sur la notification à l’intéressé, Me Thiam se veut clair : «on nous dit que la notification de la radiation doit être soumise à la dernière résidence du concerné. Ce qui a été fait», explique-t-il, en réponse aux avocats d’Ousmane Sonko qui soutiennent que la désignation de la radiation n’a pas été notifiée à leur client. Selon lui, le juge Sabassy Faye est passé à côté et a violé la loi en visant l’article L41 du Code électoral. «Quand l’huissier s’est présenté au domicile de Ousmane Sonko, il a rempli son office», a soutenu d’entrée, pour sa part, Me Adama Fall. La robe noire d’ajouter, parlant d’Ousmane Sonko : «il avait une connaissance parfaite de la mesure de radiation. Il est frappé de la forclusion prévue par la loi pour n’avoir pas introduit son recours dans les 5 jours qui ont suivi».
Me Abdou Dialy Kane d’abonder dans le même sens : «il est déchu de son recours par suite d’une forclusion indiscutable». Il ajoute : « à la lecture de la décision, on ne peut pas savoir si le juge d’instance de Ziguinchor a retenu une irrégularité de fond ou de forme».
La défense s’appesantit sur «l’absence de notification» ; Me Bamba Cissé demande au juge de laisser au peuple choisir son Président
Pour la défense des intérêts d’Ousmane Sonko, Me Ndoumbé Wane a ouvert le bal. Devant le prétoire du Premier président de la Cour suprême, la robe noire a argué que son client est inscrit à Ziguinchor, on ne peut pas, selon elle, lui demander d’aller à Saint-Louis pour y déposer un recours. Elle réagissait ainsi à l’exception soulevée par l’agent judiciaire de l’Etat qui soutient que le juge de Ziguinchor était incompétent. Elle a invoqué la jurisprudence Karim Wade. Sur la notification de la décision de radiation, elle s’interroge : «comment Ousmane Sonko, qui est détenu à Sébikotane, peut recevoir une notification, déposée à son domicile ? L’Etat du Sénégal que je respecte beaucoup, parce que dans la magistrature j’ai des frères, un mari, etc., doit arrêter». En réponse à Me El Hadji Diouf qui se réjouissait de la décision de la Cour de justice de la Cedeao et qui demandait à la partie adverse de s’y conformer, elle lâche : «j’ai entendu l’autre camp se réjouir de la décision de la Cedeao en demandant son exécution. Et pourtant, au lendemain de la décision de Sabassy Faye, ils ont tous refusé son exécution». Sa plaidoirie a été accueillie par une salve d’acclamations. «Bravo Maître», lui lançaient tout fièrement les partisans du Pastef venus assister à l’audience.
A son tour, Me Bamba Cissé est également revenu sur la notification. «La décision doit être notifiée. Alors, pourquoi ils ne l’ont pas trouvé à Sébikotane ? Ils sont allés à la Cité Keur Gorgui. En matière électorale, c’est l’électeur qui est protégé. Ousmane Sonko a été informé le 29 août de sa radiation. Le lendemain, il ne pouvait pas déposer de recours parce que l’acte ne lui a pas été remis», explique Me Cissé. La robe noire a demandé au juge de déclarer irrecevable la requête de l’agent judiciaire de l’Etat. «Je finirais par vous dire Monsieur le Juge que le peuple est à votre écoute. La paix de ce pays est entre vos mains. Laissez le peuple choisir librement au scrutin», renchérit-il.
Pour sa part, Me Macodou Ndour est revenu sur l’évocation du dossier tel que soutenu par Me Abdou Dialy Kane. Selon lui, aucun texte ne permet à la Cour suprême d’évoquer le dossier. «L’évocation pousse le juge à rejuger l’affaire dans son ensemble», précise Me Ndour.
L’Avocat général Ousmane Diagne dit niet à l’agent judiciaire de l’Etat
Encore une fois, l’Avocat général n’est pas du côté du juge de la Cour suprême. Pour être plus précis, le ministère public s’est rangé du côté des avocats d’Ousmane Sonko. Si la première fois, c’était Mariétou Diop Guèye, hier, ce fut le tour de Ousmane Diagne de s’opposer à l’agent judiciaire de l’Etat et de demander la réintégration du leader de l’ex Pastef sur les listes électorales, ainsi que sur le fichier. En effet, dans ses réquisitions, l’Avocat général a demandé au juge de rejeter les moyens de défense soulevés par Yoro Moussa Diallo et son équipe, au motif qu’ils sont mal fondés. Que ce soit sur l’incompétence du juge de Ziguinchor, la recevabilité ainsi que sur la forclusion, Ousmane Diagne a sollicité le rejet. Pour Ousmane Diagne, sur la question de la notification, l’huissier a fait son travail, seulement, retient-il, «c’est à cause du défaut d’autorisation qu’il n’a pas pu accéder à Ousmane Sonko».
A.D









