Face à une situation politique jugée explosive et une gestion économique jugée catastrophique, la Convergence des cadres républicains (Ccr) hausse le ton. Réunie ce 18 juillet à Dakar, les cadres de l’Apr tirent la sonnette d’alarme, dénoncent les atteintes aux libertés, l’abandon des populations victimes des inondations, la dégradation continue des indicateurs économiques et appelle à la mobilisation nationale.
Réunie ce vendredi 18 juillet 2025, la Convergence des cadres républicains (Ccr) de l’Alliance pour la République (Apr) s’est livrée à un réquisitoire sans concession contre l’état actuel du Sénégal, fustigeant «le désordre au sommet de l’État» et «le mépris affiché des autorités face à la souffrance des populations». Le ton est grave, l’analyse implacable, pour la Ccr, «le pays est entré dans une zone de turbulences institutionnelles, économiques et sociales sans précédent».
Un bras de fer inédit au sommet de l’État
La Ccr ouvre le feu en dénonçant la crise ouverte qui secoue l’Exécutif, mettant en cause frontalement le Premier ministre Ousmane Sonko. Pour la Ccr, «l’ultimatum lancé au président de la République constitue un acte de défiance inédit dans l’histoire du Sénégal et expose le pays à une grave crise institutionnelle». À ses yeux, «cette confrontation n’est que l’illustration d’ambitions personnelles érigées au-dessus des intérêts des Sénégalais», une attitude qu’elle juge irresponsable et dangereuse pour la stabilité du pays. «Ousmane Sonko prouve une fois de plus que les préoccupations des Sénégalais passent après son obsession maladive pour le pouvoir», martèle le communiqué.
Inondations : l’indifférence meurtrière des autorités
Autre sujet d’indignation majeur pour la Ccr, la gestion des inondations qui frappent durement les régions de Tambacounda et de Kolda, où des morts sont déjà à déplorer. «Aucune action notable n’a été constatée de la part des autorités», déplore le mouvement, qui dénonce « une indifférence insupportable des pouvoirs publics face au désarroi des sinistrés».
La Ccr rappelle que cette attitude n’est pas nouvelle, citant «le souvenir amer des inondations de 2024 qui avaient laissé les départements de Matam et de Bakel dans l’abandon total. Une constance dans la négligence qui nourrit l’amertume des populations oubliées» regrettent les cadres du parti de l’ancien président de la République.
Une économie en déroute, des bourses sociales suspendues
Sur le plan économique, la Ccr s’inquiète d’un nouvel abaissement de la note souveraine du Sénégal par l’agence Standard and Poor’s, passée de B à B- avec perspective négative. Pour la Ccr, « ce déclassement confirme l’état alarmant des finances publiques, plombées par un recours excessif à l’endettement intérieur, au détriment des secteurs essentiels comme l’éducation, la santé et la politique sociale. Le blocage du paiement des bourses de sécurité familiale (Bsf) en est l’illustration la plus criante. Créées en 2013 pour lutter contre la pauvreté structurelle, ces aides concernaient en 2024 plus de 355.000 ménages vulnérables, pour un coût de 51,4 milliards F Cfa annuels. Leur suspension plonge aujourd’hui des milliers de familles dans une précarité extrême », décrit le communiqué. La Ccr exige la reprise immédiate et l’apurement total des arriérés, rejetant l’argument d’une actualisation du Registre national unique (Rnu) qui n’aurait jamais dû justifier un tel blocage.
Résultats catastrophiques au Bac : la faillite du système éducatif
La Ccr dresse aussi un constat accablant de l’état de l’école sénégalaise, pointant les résultats « dramatiques du dernier baccalauréat : seuls 21% de réussite au premier tour, 42% au final sur 156.000 candidats. Pour le mouvement, il est temps que le gouvernement quitte le registre du bavardage et des slogans pour enfin s’attaquer à la réforme en profondeur d’un système éducatif à bout de souffle », pestent les cadres de l’Apr.
Toutefois, la Ccr refuse que la jeunesse sénégalaise continue de servir de « combustible pour des batailles politiques insurrectionnelles » et appelle à faire de l’éducation une priorité absolue pour l’avenir du pays.
Libertés bafouées, détentions arbitraires, l’inquiétante dérive autoritaire
Le communiqué prend aussi la défense des cadres et figures du parti toujours détenus ou sous contrôle judiciaire, dénonçant des mesures qu’elle qualifie de « persécutions politiques » et d’« effacement programmé ». La Ccr réclame « la libération immédiate et sans condition de figures telles que Farba Ngom, Mansour Faye, Lat Diop, Moustapha Diop, Abdoulaye Ndiaye, ainsi que la levée des mesures coercitives contre Ismaïla Madior Fall, Aïssatou Sophie Gladima et Salimata Diop ». Elle étend son exigence aux autres détenus politiques, parmi lesquels « Moustapha Diakhaté, Abdou Nguer, Bachir Fofana, Assane Diouf, Jérôme Bandiaky, Badara Gadiaga, Djiby Ndiaye et l’homme d’affaires Tahirou Sarr, tous victimes d’un régime qui tend vers le despotisme » fait savoir la Ccr.
Un appel à la mobilisation nationale
Après avoir qualifié de « supercherie » le Dialogue national, la Ccr invite l’opposition et les forces vives du pays à constituer un large front pour préserver les libertés fondamentales et défendre des institutions républicaines menacées par « le populisme et la culture du désordre du Pastef ».
Situation des Sénégalais en Mauritanie : le silence complice de l’État
Enfin, la Ccr s’inquiète du sort des ressortissants sénégalais en Mauritanie, victimes, selon elle, de « rafles et traitements discriminatoires ». Elle interpelle directement le ministère de l’Intégration africaine et des Affaires étrangères pour une réaction urgente afin de protéger nos compatriotes.
Baye Modou SARR