Avec 1,4 milliard d'habitants, 60% des terres arables non exploitées et d’abondantes ressources hydriques, le Président MackySall est persuadé que l’Afrique doit mettre fin à sa dépendance alimentaire vis-à-vis de l’extérieur et apprendre à se nourrir par elle-même. Une déclaration faite à l’ouverture du sommet international de Dakar sur l’agriculture.
La deuxième conférence internationale de Dakar sur l’agriculture co-organisée par le Sénégal et la Banque africaine de développement (Bad) sur le thème «Nourrir l’Afrique : souveraineté alimentaire et résilience» a été présidée par le chef de l’Etat MackySall, président en exercice de l’Union Africaine, au Cicad (Diamniadio) en présence de plusieurs chefs d’Etat et de gouvernement. Le Président sénégalais est persuadé que les pays africains subissent de plein fouet l’effet combiné du changement climatique, de la pandémie et d’une guerre majeure.
Un continent qui a le potentiel et continue d’importer l’essentiel de ses produits alimentaires
«Cette crise sans précédent nous édifie sur l’urgence pour notre continent de mettre fin à sa dépendance alimentaire vis-à-vis de l’extérieur, d’apprendre à se nourrir par lui-même, et mieux encore, de contribuer à nourrir le monde. Nous en avons le potentiel. Nous sommes 1,4 milliard d’habitants établis sur plus de 30 millions de km2, avec plus de 60% des terres arables non exploitées de la planète et d’abondantes ressources hydriques. C’est d’ailleurs tout le paradoxe d’un continent qui continue d’importer l’essentiel de ses produits alimentaires», se désole de constater le chef de l’Etat. Etcomme solution, il préconise :«à court terme, il s’agit de répondre aux besoins immédiats d’importation d’engrais et de produits alimentaires aux conditions normales du marché ; à moyen et long terme, d’améliorer de façon durable l’investissement dans le secteur agricole pour assurer la souveraineté alimentaire de notre continent».
Les 4 piliers pour…
A cet effet, le président en exercice de l’Union Africaine informe avoir déjà mis en place une task-force restreinte sur les objectifs à court terme, qui sera ensuite élargie pour assurer le suivi des engagements à moyen et long termes. «Il me semble important que les différentes initiatives en direction de l’Afrique soient mieux coordonnées au plan continental pour qu'elles soient en harmonie avec les quatre piliers du Programme détaillé pour le développement de l’agriculture en Afrique. Il s’agit de valoriser davantage la recherche, améliorer la mécanisation agricole et la maîtrisede l’eau, et intensifier l’utilisation de méthodes et technologies appropriées, y compris la transformation locale des produits ; d’élargir les superficies exploitées et d’assurer une gestion durable des terres ; d’améliorer l’accès des produits aux marchés, en renforçant les infrastructures de désenclavement et d’interconnexion transfrontalière, ainsi que les équipements de stockage, de conservation et de transformation locale étant donné que 40% de la production est perdue faute de stockage ; de soutenir les petits exploitants, notamment les femmes et les jeunes par un encadrement et un financement adaptés à leurs besoins», déclare le chef de l’Etat qui invite à concilier les besoins légitimes de l’agriculture familiale et ceux indispensables de l’agrobusiness pour la production à grande échelle. Mieux, il indique qu’une attention particulière devrait être accordée à l’accès au foncier pour les femmes et les jeunes.
L’Afrique des solutions
En outre, face à cette crise, le président Sall estime que l’Afrique est à la croisée des chemins. «Il y a le chemin de l’Afrique des problèmes, qui nous maintient dans le statu quo d’une agriculture qui continuera de nous exposer à la précarité alimentaire, et le chemin de l’Afrique des solutions, qui nous met dans la perspective d’une agriculture moderne, et nous conduit, au-delà de la résilience, vers la souveraineté alimentaire. Dakar 2 veut s’inscrire résolument dans la dynamique de l’Afrique des solutions ; une Afrique qui puise dans son énorme potentiel pour se nourrir par elle-même et aider à nourrir le monde. Nous voulons rester combatifs, résolus à surmonter nos obstacles pour relever les défis devant nous», tranche le chef de l’Etat.
M. CISS
MOUSSA FAKI MAHAMAT, PRESIDENT COMMISSION DE L’UNION AFRICAINE
«Comment nous considérer comme hommes libres alors que nous dépendons pour vivre des vivres d’autrui»
Pour sa part, le président de la Commission de l’Union Africaine, Moussa FakiMahamat, a listé les facteurs subjectifs venus aggraver et amplifier les fragilités structurelles. A titre d’exemple, il cite les hésitations des banques et institutions financières, la déficience du secteur privé toujours hésitant et dubitatif vis-à-vis du secteur agricole, le scepticisme des partenaires à l’égard des modèles innovants et de réussite locale. Ce qui fait que la plupart des pays africains sont confrontés à une hausse insoutenable des prix des céréales de consommation courante. «Ces hausses appauvrissent davantage les ménages, aggravent la malnutrition et peuvent générer à terme des tensions sociales», indique l’ancien ministre tchadien qui appelle à une renaissance de l’économie agricole. «Dans le temps africain actuel, la souveraineté alimentaire et nutritionnelle devrait être notre libération de la dépendance alimentaire des fluctuations des marchés des produits céréaliers. Comment nous considérer comme hommes libres alors que nous dépendons, pour vivre, des vivres d’autrui ? Comment un dirigeant peut accepter un tel asservissement pour son peuple ? Ne devrait-on pas jauger notre engagement à son dynamisme et son acharnement à s’émanciper de cette dépendance ?», sérine le président de la Commission de l’Ua selon qui les atouts de la souveraineté alimentaire sont entre nos mains.
AkinwumiAdesina, président de la BAD : «Aidons l’Afrique à se nourrir par elle-même»
De son côté, le président du groupe de la Banque africaine de développement (Bad), AkinwumiAdesina, s’est engagé à hauteur de dix milliards de dollars au cours des cinq prochaines années pour accompagner les chefs d’Etat dans les différents impacts et de livraison de produits alimentaires et agricoles afin de stimuler la production et le commerce de ces produits, conformément aux sollicitations du Président MackySall. A l’en croire, il est temps pour l’Afrique de nourrir l’Afrique. «Aidons l’Afrique à se nourrir par elle-même. L’Afrique peut et doit se nourrir avant de nourrir le monde», dit-il.
M. CISS












