Quand Wade, le plus grand opposant de l’histoire du pays, rencontre Sonko, la star montante de la politique sénégalaise, les regards ne pouvaient se fixer que sur ce tête à tête. Mais au final, ceux qui guettaient un soutien ou un mot d’ordre du patron des libéraux en faveur du candidat des «patriotes» ont dû déchanter. Wade, après avoir encensé le jeune leader politique qui lui rappelle sa jeunesse, s’est contenté de parler du processus électoral et de la mise à l’écart de son fils Karim Wade. Rien donc sur un éventuel soutien que Sonko souhaite.
Me Abdoulaye Wade et Ousmane Sonko se sont rencontrés, samedi. Une rencontre qui a duré plusieurs heures. Dès leur rencontre, le pape du Sopi a lancé à son hôte, après lui avoir serré la main. «C’est dur la campagne (…). Vous êtes un bon patriote, engagé à défendre le Sénégal. Ça me rappelle ma jeunesse. (…). Bon courage, soyez en forme jusqu’au bout», a souligné le leader du Pds. Et Sonko de lui rendre la politesse, en évoquant toute l’estime qu’il lui porte et la convergence de vue, avec lui, sur beaucoup d’aspects. «Vous êtes un exemple pour nous. Vous avez été le meilleur président de la République que le Sénégal ait connu. Sur la question du patriotisme, nous avons été fiers de vous voir prendre certaines positions, qui juraient d’avec ce qu’on avait connu…», déclare le candidat de la coalition «Sonko Président». Ces civilités échangées, les deux hommes entrent dans le vif du sujet, loin des micros, dictaphones et caméras de la presse.
Wade limite la discussion au processus et ses enjeux, ainsi qu’à l’invalidation «injuste» de la candidature de Karim Wade
Au sortir de la rencontre, alors que Wade avait déjà quitté les lieux, Ousmane Sonko, qui s’est adressé à la presse, a rappelé sa «grande estime pour le Président Wade». Une estime qui, pour lui, dépasse le cadre politique, où lui-même n’a fait juste qu’un an. A propos du contenu de leur discussions, le leader de Pastef révèle : «nous nous sommes longuement entretenus, et cet entretien a été très riche pour nous. Il nous a encore prodigué de ses conseils, par rapport à son expérience, à son expertise politique», dit-il. Non sans ajouter que pour un néo-politicien comme lui, «avoir la chance de discuter avec le Président Abdoulaye Wade, qui a eu une longue et riche carrière politique, c’est bénéfique».
A en croire Sonko, Wade et lui ont «discuté du processus électoral et des enjeux qui tournent autour de ce processus électoral, et surtout des écueils qui ne manqueraient pas d’être dressés sur le chemin des candidats issus de l’opposition». Et d’ajouter qu’ils ont «bien entendu et compris», les arguments de Wade, sur plusieurs points qu’il a traités de manière détaillée. Il s’agit, entre autres, des questions du fichier électoral, des cartes d’électeurs qui sont en souffrance, de la carte électorale et des bureaux de vote et du déplacement des électeurs. A en croire Sonko, «sur toutes ces questions, le Président Abdoulaye Wade a donné ses arguments techniques», que lui et son équipe comprennent «très bien». Le challenger de Macky Sall pour la présidentielle du 24 février prochain note que Wade leur a également «exprimé sa position de principe, qui est que le Pds a été injustement écarté de l’élection présidentielle». Là également, Sonko dit être en phase avec le patron des libéraux.
Rien sur un éventuel soutien du Pds que Sonko souhaite avoir
Interpellé sur un éventuel soutien du Pds, le candidat à la présidentielle note : «cela n’est pas encore à l’ordre du jour». En tout cas, il n’en ont pas discuté. Mais, pour lui, si, sur un premier volet, consistant à faire tout pour qu’il y ait une élection transparente, inclusive, ils ont «l’apport du Président Wade et du Pds, qui ne sont pas des nains en politique, c’est déjà une excellente chose». Considérant que le Pds «reste l’une des plus grandes ou la plus grande formation politique sénégalaise», son soutien serait le bienvenu pour sa coalition. «Bien sûr, nous souhaitons que le Pds nous soutienne», lâche le leader de «Sonko Président». Qui reste optimiste, car ayant un contact permanent avec Wade. «Le Président Wade et moi-même entretenons une relation directe. Nous allons continuer à discuter à toutes les étapes du processus, pour évaluer ce qui est en train de se passer, et voir, dans quel sens orienter le combat que nous voulons mener ensemble», conclut-il.
Mbaye THIANDOUM