Ayant pris part à l’enquête sur l’affaire Adji Sarr-Ousmane Sonko, le capitaine de gendarmerie Oumar Touré a démissionné. Dans un communiqué, il dit qu’il n’en pouvait plus de se voir surveiller et pisté à tout moment, juste parce qu’il aurait été soupçonné, «à tort», dit-il, d’avoir fait fuiter le procès-verbal de l’audition des personnes impliquées dans le dossier. Mais curieusement, il demande la démission du ministre de l’Intérieur, celui de la Justice et du Procureur de la République. S’en prenant à Idrissa Seck, le capitaine Touré demande aux manifestants d’attendre vendredi pour sortir et annonce qu’il va lui-même y participer.
«Depuis la fuite du procès-verbal concernant cette enquête, je suis suivi par des individus dont j’ignore la vraie motivation, jusqu’à ce qu’on m’apprenne qu’il s’agissait des éléments de la Direction nationale du Renseignement sénégalais. Pour une affaire privée, j’ai été plutôt très surpris par cette mesure», dit-il. Non sans ajouter que malgré qu’il ait saisi sa hiérarchie depuis le 3 mars 2021 de ses «craintes» pour sa sécurité et celle de sa famille, «aucune mesure n’a été prise et les individus continuent leur forfaiture» en suivant tous ses déplacements. Et pire, il affirme qu’ils sont allés jusqu’à «mettre sous écoute» ses communications et anticiper tous ses faits et gestes. «Ce qui constitue une violation de mes droits constitutionnels», fait-il remarquer. Sur les raisons de cette surveillance dont il fait l’objet, le démissionnaire déclare : «tout cela parce que je suis soupçonné à tort d’être à la solde d’un opposant que je n’ai rencontré que le jour de la remise de sa première convocation dont j’étais porteur, donc en faisant mon travail conformément aux ordres de mes chefs». Et sur le «devoir de réserve» qu’on pourrait lui reprocher de n’avoir pas respecté, il explique : «lorsque l’Etat n’applique pas la réciprocité en respectant ses engagements envers moi, en mettant en danger ma vie et celle de ma famille, je suis en droit de dénoncer et de prendre les Sénégalais à témoin». Dès lors, il porte à la connaissance de la communauté nationale et internationale que tout ce qui lui arrivera, lui et sa famille, sera de la «responsabilité exclusive de l’Etat du Sénégal et de la gendarmerie nationale». Cette dernière, précise-t-il, «n’a rien fait pour faire cesser la violation» de ses droits.
Revenant sur les faits qui lui seraient reprochés, il «défie quiconque de produire la preuve matérielle» de son contact avec le député Ousmane Sonko, en dehors de la remise de convocation. Ainsi, pour lui, «rien ne justifie» qu’on le «surveille comme un vulgaire criminel». D’ailleurs, souligne-t-il, si c’est lui, un officier de gendarmerie,qui peut «subir une telle discrimination pour faire plaisir à un individu», qu’en sera-t-il du Sénégalais lambda ?
Après sa démission, le capitaine Touré s’est rendu à Touba. Depuis sa retraite, il a confirmé sa démission et promis même de prendre part aux manifestations à partir de vendredi prochain. Mais, entre-temps, il voudrait que les manifestants fassent un break. Aussi, il a demandé la démission du ministre de l’Intérieur, celui de la Justice et du procureur de la République.
Mbaye THIANDOUM