Près de 15 jours se sont écoulés depuis le dépôt de la question d’actualité de Guy Marius Sagna et Aminata Touré pour interpeller le Premier ministre et le gouvernement sur le rapport de la Cour des comptes. Mais,aucune réaction jusque-là et puisqu'il y a un délai prescritpour ce genre de procédure, les deux députés demandent au Conseil constitutionnel de trancher.
Aminata Touré et Guy Marius Sagna ont saisi hier le Conseil constitutionnel d’une demande «en arbitrage pour conflit de compétences entre le Pouvoirexécutif et le Pouvoir législatif», pour, disent-ils, pousser le Premier ministre et les membres du gouvernement à venir répondre à leur questionrelative au rapport de la Cour des comptes. S’appuyant sur l’article 85 de la Constitution en son alinéa 2, ces derniers rappellent que les députés peuvent poser au Premier ministre et aux membres du gouvernement des questions d’actualité auxquelles ils sont tenus de répondre. «C'est sur la base de cette disposition que nous avionsdéposé, le 19 décembre 2022, une question d'actualité au gouvernement, laquelle est annexéeà la présente.A ce jour 02 janvier 2023, malgré l'accusé de réception de la question par qui de droit, nous sommesau regret de constater le refus injustifié du gouvernementde se soumettre à ses obligationsconstitutionnelles», font-ils noter avant d’ajouter dans leur argumentaire : «il est évident qu'au regard de la Constitution, ni le Premier ministre encore moins unmembre du gouvernement ne peut se prévaloir d'aucune règle pertinente pour refuser derépondre à une question d'actualité posée par un député. En la matière, le gouvernement aune compétence liée à laquelle il n'est prévue aucune dérogation ni pouvoir d'appréciation».
Pour les parlementaires auteurs de la question d’actualité, le refus du gouvernement de faire suite à leur demande«est d'autant plusindéfendable en droit que le Règlement intérieur de l'Assemblée nationale qui complète lesdispositions constitutionnelles en la matière n'offre non plus au gouvernement ni marge de manœuvre ni échappatoire».
«Il revient au Conseil de rappeler qu'un pouvoir public constitutionnel n'est au-dessus de la Loi»
Guy Marius et Aminata Touré accusent le gouvernement de faire une interprétation discrétionnaire d'une compétence pourtant expressément liée. «Considérant en outre qu'en vertu de l'article 92 alinéa 2 du Règlement intérieur del'Assemblée nationale qu'une question d'actualité n'a plus d'objet dès lors que les faitsauxquels elle fait état datent de plus d'un mois, nous sommes raisonnablement fondés àconclure que le gouvernement en gardant le silence sur la question d'actualité à lui poséeconsidère qu'il n'est lié à aucune obligation de faire suite à la questiond'actualité à lui adressée», écrivent-ils.
C’est pourquoi, disent-ils, ils se tournent vers le Conseil constitutionnel pour solliciter son arbitrage en se basant sur l’article 92 alinéa 1 de la Constitution qui stipule : «le Conseil constitutionnel connaît de la constitutionnalité (...) des conflits decompétence entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif (...)».A les en croire, l'arbitrage du Conseil est d'autant plus nécessaire qu'il y va de notre modèle d'Etatde droit. En effet, soulignent Guy Marius et Aminata Touré, il revient au Conseil constitutionnel de rappeler qu'un pouvoir publicconstitutionnel n'est pas au-dessus de la Loi. « Il mérite en effet d'être rappelé au gouvernement,notamment au Premier ministre, que l'exercice d'une partie du pouvoir exécutif dont il a laresponsabilité est assorti de contraintes juridiques, parmi lesquelles l'obligation de répondreaux questions d'actualité des députés. Autrement dit, le Conseil constitutionnel en tant quegarant ultime de l'Etat de droit a la responsabilité de rétablir l'équilibre des pouvoirs», font-ils savoir.
NdèyeKhadyDIOUF